La diplomatie française tente une nouvelle médiation dans le conflit entre Arménie et Azerbaïdjan
L'objectif affiché par le Quai d'Orsay est ambitieux : "Une paix juste, durable, respectueuse de l'intégrité territoriale et des principes du droit international." Ce ne sera pas facile entre ces deux pays qui sont à couteaux tirés. Deux guerres les ont déjà opposés au cours des 30 dernières années. L'Arménie redoute d'être abandonnée à son sort. Elle est trois fois plus petite, trois fois moins peuplée et beaucoup moins puissante économiquement que l'Azerbaïdjan.
La ministre des Affaires étrangère, Catherine Colonna va se rendre dans chaque camp. D'abord, mercredi 26 avril à Bakou, en Azerbaïdjan, pour rencontrer le très autoritaire président Ilham Aliev, puis le jeudi à Erevan en Arménie pour des échanges avec le Premier ministre Nikol Pachinian. La ministre des Affaires étrangères en profitera aussi pour se recueillir au mémorial du génocide arménien dont on commémorait lundi 24 avril le 108e anniversaire.
Le volontarisme de la diplomatie française dans ce dossier n'est pas nouveau. À l'automne 2022 à Prague, Emmanuel Macron avait initié une rencontre directe entre les deux dirigeants arménien et azerbaïdjanais, mais sans que ce soit vraiment suivi d'effets.
Le Haut-Karabakh sous blocus azerbaïdjanais
La tension est même fortement remontée depuis le mois de décembre et que l'Azerbaïdjan empêche l'accès au territoire du Haut-Karabakh. Cette zone montagneuse disputée entre les deux pays, mais peuplée très majoritairement d'Arméniens (environ 120 000) revendique son autonomie sous le nom d'Artsakh. Depuis quatre mois, la zone subit un véritable blocus, encore renforcé ces derniers jours depuis que l'Azerbaïdjan a établi un check-point à l'entrée du corridor de Latchine. Cette bande de terre de seulement cinq kilomètres de large relie le Haut-Karabakh à l'Arménie.
Sur place, tout manque : des tickets de rationnement ont dû être mis en place, l'électricité et le chauffage sont restreints, le chômage est massif. L'Azerbaïdjan affirme vouloir à la fois enrayer un trafic d'armes et une exploitation illégale des mines de la région. Mais ce blocage contrevient à une décision de la Cour internationale de la justice. Pour l'Arménie, l'objectif réel de l'Azerbaïdjan, est une "épuration ethnique" : contraindre tous les Arméniens du Haut-Karabakh à fuir pour reprendre le contrôle du territoire. Les accrochages dans la zone frontière font régulièrement des morts.
L'équilibrisme des Européens
La diplomatie a donc bien du mal à s'imposer. Les Européens font de l'équilibrisme. Ils sont tentés de défendre l'Arménie : les liens historiques sont plus forts et le régime est autrement plus démocratique. Mais le réalisme économique les pousse à ménager l'Azerbaïdjan, gros fournisseur de gaz : l'été 2022, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, avait qualifié l'Azerbaïdjan de "partenaire fiable". L'Arménie n'a pas digéré cette formule et dénonce "un deux poids deux mesures" des Européens vu leur implication en Ukraine.
La clé d'une éventuelle résolution du conflit se trouve sans doute davantage à Moscou. La Russie, le parrain de la région, théoriquement garant de la paix entre les deux pays avec de nombreux soldats déployés dans la zone. Mais Moscou est concentré sur l'Ukraine. L'Arménie et le Haut-Karabakh sont donc aussi des "victimes collatérales" de la guerre en Ukraine.
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