Panama : des manifestations contre un contrat gouvernemental d'exploitation d'une mine de cuivre
Le Panama traverse une crise exceptionnelle, depuis maintenant trois semaines. Mardi 7 novembre, deux manifestants écologistes ont été abattus par un habitant excédé. Ils avaient installé un barrage routier pour bloquer l'autoroute interaméricaine qui relie le Panama au reste de l'Amérique centrale. Ces militants manifestaient contre un projet minier très controversé : le renouvellement pour 40 ans de la concession de la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert d'Amérique centrale, attribuée en octobre dernier à une compagnie canadienne.
Cette mine, qui s'étend sur près de 17 000 hectares, exporte 300 000 tonnes de cuivre par an. Située à 240 kilomètres de la ville de Panama, elle génère 4% du PIB du pays et assure 75% des revenus à l'exportation. Depuis l'arrivée au pouvoir du président Laurentino Cortizo en 2019, l'exploitation minière est considérée comme l'un des piliers de l'économie du Panama en terme de créations d'emplois.
Sauf que les militants écologistes considèrent que cette mine, dont le début d'exploitation remonte à 1997, provoque d'énormes dégâts sur l'environnement : eaux des rivières polluées, poissons morts, problèmes de peau pour les paysans qui vivent à proximité. La mine est en outre située sur une zone de protection naturelle où vivent des communautés indigènes. Les habitants du Panama sont très soucieux de l'environnement : c'est l'un des rares pays au monde dont le bilan carbone est négatif (il absorbe plus de CO2 qu'il n'en émet). On y trouve de vastes étendues de forêts tropicales et de mangroves où évoluent 10 000 espèces de plantes et d'animaux. Une biodiversité menacée par la déforestation, mais aussi par les activités extractives.
8 000 emplois directs et 40 000 emplois indirects pourraient disparaître, selon le président
À cela s'ajoutent des problèmes d'ordre politique qui risquent de déboucher sur une crise. Les conditions d'attribution de la concession minière n'ont pas été du tout transparentes. Un premier contrat avait été déclaré inconstitutionnel par la Cour suprême du Panama parce qu'il n'y avait pas eu d'appel d’offres. Le gouvernement a choisi ensuite une procédure accélérée : la loi attribuant la concession a été débattue, votée puis promulguée en seulement trois jours. D'où la colère des militants écologistes qui dénoncent un passage en force.
Le président Laurentino Cortizo met en avant des arguments économiques : en cas de non renouvellement du contrat d'exploitation, le Panama risquerait de perdre 8 000 emplois directs et 40 000 emplois indirects liés à la mine. Cela n’a pas suffi à calmer les manifestants, parmi lesquels de nombreux jeunes investis dans la cause environnementale. Ils ont été rejoints par des syndicats ouvriers, des médecins, des représentants du secteur des transports. Tous estiment que le contrat va à l'encontre des intérêts du pays. Pour tenter de désamorcer la crise, le Parlement a adopté un moratoire sur une toute nouvelle concession minière. Le chef de l'État a même proposé un référendum. Il reviendra au final à la Cour suprême de trancher sur l'avenir de Minera Panama.
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