Birmanie : un rapport dénonce l'intensification des atrocités commises par l'armée pour terroriser la population

Des enquêteurs de l'ONU dénoncent, dans un rapport sorti mardi, une "escalade" des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, perpétrés par l'armée birmane contre la population partout dans le pays.
Article rédigé par Julie Pietri
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
La Birmanie continue sa descente aux enfers depuis 2021, dans une indifference quasi totale. Corps d'un réfugié rohingya noyé dans la rivière Naf, à Teknaf, le 6 août 2024. (- / AFP)

Tortures, viols, violences sur enfants, attaques aériennes sur des écoles et des hôpitaux... Après avoir remis leur rapport annuel, des enquêteurs de l'ONU affirment, mardi 13 août, qu'il y a actuellement en Birmanie "des niveaux horribles de brutalité et d'inhumanité", pour "punir" et "terroriser" la population civile. Depuis le putsch de 2021, c'est l'escalade : une "intensification à un rythme alarmant" a causé plus de trois millions de déplacés en six mois, fuyant ces violences, disent les rapporteurs de l'ONU.

Médecins sans frontières s'inquiète particulièrement pour les Rohingyas. Cette minorité musulmane, privée de citoyenneté depuis les années 80, est persécutée, discriminée depuis des décennies. Elle n'a accès ni à la santé, ni à l'éducation et ne possède pas de liberté de circulation. Les Rohingyas ont même été victimes de "violences génocidaires" en 2016-2017. Quelque 750 000 personnes avaient fui alors à pied, surtout vers le Bangladesh voisin. Affamés, assoiffés, le corps marqué par les sévices, beaucoup vivent toujours aujourd'hui dans des camps de réfugiés.

Des Rohingyas enrôlés de force puis victimes de représailles

MSF a observé en ce mois d'août l'arrivée de Rohingyas blessés côté Bangladesh, à Cox's Bazar. Portant des blessures de guerre, des traces d'obus, de mortiers, de balles, une quarantaine de personnes ont gagné la frontière en quelques jours au début du mois, dont une grande partie de femmes et d'enfants, qu'il a fallu soigner. Pour MSF, "les Rohingyas payent un prix de plus en plus élevé dans ce conflit". Ils sont pris au piège dans des combats, plus particulièrement dans l'État de Rahkine, à l'Ouest, une véritable guerre qui oppose l'armée officielle birmane et les rebelles de l'Armée d'Arakan.

En fait, pour combattre les rebelles, les Rohingyas sont régulièrement enrôlés de force, ou contre la promesse de papiers d'identité. Adultes et garçons sont donc enrôlés dans cette armée birmane qui les a si violemment persécutés. Et ils sont ensuite victimes de représailles par les groupes armés d'opposition.

Au final, ils se retrouvent avec leurs villages incendiés et sont victimes d'exécutions. Ces derniers jours, des civils qui tentaient de fuir le pays en bateau ont été ciblés, par centaines, par des drones et par l'artillerie de l'armée d'Arakan. C'est du moins ce que racontent des témoins et ces informations sont très difficiles à vérifier, car il n'y a plus d'observateur indépendant sur place.

Des ethnies prises au piège entre les deux camps

La population rohingya n'est pas la seule à subir les violences, les Rakhine, qui sont eux bouddhistes, subissent aussi ce conflit de plein fouet, explique la directrice Asie d'Human Rights Watch. Les deux camps, armée birmane et armée d'opposition, ont "recours à des discours de haine, des attaques contre des civils de différences ethnies et des incendies criminels massifs pour chasser les gens de leurs maisons et de leurs villages", ce qui fait planer une nouvelle fois "le spectre du nettoyage ethnique".

Human Rights Watch demande un accès la zone et la tenue d'une enquête internationale indépendante.

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