Bio dans la restauration collective : "On est à la traîne", selon le président Fédération nationale d'agriculture biologique

"Le changement d'habitudes est le plus difficile à atteindre. On a parcouru beaucoup de chemin", estime toutefois Philippe Camburet.
Article rédigé par franceinfo
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Un enfant mange à la cantine. Photo d'illustration. (JEAN-PIERRE AMET / MAXPPP)

"Nous, les productrices et les producteurs, on est au rendez-vous. Tout est prêt, il n'y a plus qu'à se lancer", lâche Philippe Camburet, président de la Fédération nationale d'agriculture biologique, sur franceinfo a lâché vendredi 29 décembre, au sujet de l'extension de l’obligation de proposer 50% de produits "durables et de qualité" dont 20% de bio à l’ensemble de la restauration collective au 1er janvier.

"On est à la traîne" dans "la restauration collective publique", déplore celui qui est également agriculteur et producteur de céréales dans l’Yonne puisque malgré la loi EGAlim adoptée en 2021, les 20% de bio dans les cantines ne sont pas atteints. Sceptique, il espère que cela ira "plus vite dans la restauration collective privée"

franceinfo : Il y a donc ce nouvel objectif pour les restaurants d'entreprise et les cantines dans le privé, alors que les objectifs ne sont pas respectés dans le public. Comment est-ce que vous l'expliquez ?

Philippe Camburet : Surtout peut-être de la routine, les habitudes de travailler toujours avec les mêmes fournisseurs pour des menus qui se ressemblent. Le changement d'habitudes est le plus difficile à atteindre. On a parcouru beaucoup de chemin. Beaucoup de collectivités aujourd'hui sont bien au-delà des 20%, la preuve que c'est possible.

"On a de la résistance au changement. C'est pour ça qu'on aimerait davantage d'incitations de la part des pouvoirs publics."

Philippe Camburet, président de la Fédération nationale d'agriculture biologique

à franceinfo

Le ministre de l'Agriculture s'est exprimé dans ce sens récemment pour exhorter les acheteurs publics à mettre plus de bio. La question d'incitations financières se pose. Bien que le coût des produits ne représente qu'un quart du prix d'un repas, il y a encore évidemment, toujours la question du prix. L'État s'est engagé à aider les communes les plus modestes pour que le reste à charge aux familles ne dépasse pas un euro. Mais pourquoi ne pas étendre ce dispositif à l'ensemble des collectivités ? Pour qu'enfin, on arrive le plus tôt possible à ces 20% et qu'on les dépasse largement, si possible.

Vous parlez d'incitations, d'aides financières. Vous n'allez pas jusqu'à demander des sanctions pour ceux qui ne jouent pas le jeu ?

Ces sanctions marqueraient un pas très important. Malheureusement, dans le climat politique entre les collectivités et l'État, je crois qu'on arrivera rarement à un régime de sanctions. On va rester dans l'incitation. Les collectivités vont rester souveraines de leurs choix. C'est en ce sens qu'on aurait aimé une incitation qui démarre beaucoup plus tôt, pour ne pas en arriver à moins de 10% de produits bio, au lieu de 20% dans la restauration collective publique aujourd'hui. C'est en cela, peut-être, que cette loi EGAlim n'avait pas prévu une réticence de la part des acteurs. On aurait peut-être dû prévoir un caractère d'obligation plus fort, voire un régime de sanction derrière.

Ces incitations tomberaient au bon moment, alors que la filière bio connaît des difficultés particulièrement importantes, avec l'inflation ? Les Français se détournent du bio avec la hausse des prix.

Effectivement, l'inflation vient rajouter son lot de difficultés, les Français se sont en partie détournés de la filière bio. De ce fait, on est au rendez-vous de la production mais c'est la consommation qui n'est plus là. Ce serait donc du bon sens de se dire qu'on va manger bio à la cantine, au restaurant d'entreprise. Cela serait le bon sens de répondre à cette demande, parce que les trois quarts des gens veulent manger bio à la cantine, en dehors du foyer. La plupart du temps, ce repas pris en dehors du foyer est le plus équilibré. Profitons d'un repas qui sera sain, dans l'esprit de la loi EGAlim et de la résilience face au changement climatique. Tout ça, c'est lié. Notre assiette, c'est là qu'on a les plus grandes possibilités d'actions pour contribuer à la réduction du changement climatique. Profitons donc de cette nouvelle incitation au 1ᵉʳ janvier pour consommer plus de bio à la cantine. Ça n'en sera que meilleur pour tout le monde. 

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