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Vidéo Pérou : vivre à La Rinconada à plus de 5 000 m d'altitude "est un défi à la physiologie de l'organisme humain"

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Temps de lecture : 4min
Article rédigé par franceinfo
Radio France

Comment réagit le corps à très haute altitude, quand il y a moitié moins d'oxygène ? C'est la question étudiée par 17 scientifiques internationaux engagés dans une expédition dirigée par un Français, Samuel Vergès.

"Ici, il y a plus de 50 000 habitants qui vivent avec moitié moins d'oxygène qu'au niveau de la mer et c'est un véritable défi à la physiologie de l'organisme humain", a expliqué lundi 18 février sur franceinfo, Samuel Vergès, physiologiste à l'Inserm au sein du laboratoire Hypoxie et physiopathologies cardiovasculaires et respiratoires, à l'université Grenoble-Alpes, qui dirige une expédition à La Rinconada au Pérou, la ville la plus haute du monde à 5 300 mètres d'altitude.

C'est un véritable mystère scientifique puisqu'on considère que la vie sédentaire est impossible à plus de 5 000 mètres d'altitude. "On cherche à comprendre comment l'être humain arrive à vivre dans ces conditions (…) Un quart de la population souffre de pathologies spécifiques du fait du manque d'oxygène", a ajouté Samuel Vergès. Le but de cette expédition c'est aussi "à terme, aider cette population d'un point de vue sanitaire".

franceinfo : Comment ça se passe pour les membres de l'expédition qui ne sont pas habitués à vivre à cette altitude ?

Samuel Vergès : Pour nous ce n'est pas facile, on est montés à plus de 5 000 mètres d'altitude. Il y a les glaciers qui nous dominent. Le petit matin, toute l'équipe se réveille et tout le monde a des maux de tête. Les nuits sont difficiles, mais on arrive tout de même à travailler et à avoir de grosses journées d'évaluation de la population locale. Même si pour nous, qui sommes des habitants des plaines, on souffre du manque d'oxygène, on étudie comment s'adaptent des habitants qui sont là toute leur vie et qui eux aussi souffrent de ce manque d'oxygène, malgré leur durée de séjour sur ce lieu.

Que cherchez-vous à savoir sur cette population de La Rinconada ?

Ici [à La Rinconada], il y a plus de 50 000 habitants qui vivent avec moitié moins d'oxygène qu'au niveau de la mer et c'est un véritable défi à la physiologie de l'organisme humain. On cherche à comprendre comment l'être humain arrive à vivre dans ces conditions. On sait qu'un quart de la population souffre de pathologies spécifiques du fait du manque d'oxygène, on étudie aussi quelles sont les maladies spécifiques liées au manque d'oxygène avec, à terme, l'idée de pouvoir aider cette population d'un point de vue sanitaire mais aussi avec des répercussions sur nos connaissances générales en terme de santé dans les maladies respiratoires notamment, pour nos hôpitaux de plaine par exemple.

Les habitants qui vivent à La Rinconada y restent-ils en permanence ?

Oui, tout à fait. Le fait qu'ils soient ici est directement lié à l'activité économique avec une mine d'or qui a attiré tout ce monde depuis des dizaines, des centaines d'années. Eux-mêmes sont conscients qu'ils sont dans des conditions de vie très précaires. Ils sont très soucieux pour leur santé. Ils sont très demandeurs des évaluations médicales et scientifiques qu'on peut leur fournir. On essaie d'allier soutien quasi-humanitaire, médical et recherche scientifique pendant plusieurs semaines. On a créé un véritable laboratoire, une quasi-clinique et on évalue toutes les facettes des adaptations et des maladaptations au manque d'oxygène que l'on peut observer dans cette population en réalisant des analyses génétiques, hématologiques, cardiovasculaires. On étudie les habitants dans leurs capacités à faire des efforts physiques dans ces conditions-là. On étudie aussi leur sommeil, car c'est une phase de fragilité face au manque d'oxygène, à l'altitude. On a toutes ces évaluations réalisées sur des dizaines d'habitants qui sont actuellement en cours.

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