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Journée mondiale sans tabac : "Il faut augmenter nettement le prix du paquet", lance le président de l'Alliance contre le tabac

Loïc Josseran, président de l'Alliance contre le tabac, estime sur franceinfo que si le nombre de fumeurs stagne, c'est à cause du prix des cigarettes, pas assez élevé, et de la vente de tabac auprès des mineurs.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
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Une personne fume une cigarette à la table d'un bar. (SALESSE FLORIAN / MAXPPP)

"Il faut augmenter nettement le prix du paquet", lance mercredi 31 mai sur franceinfo Loïc Josseran, le président de l'Alliance contre le tabac. A l'occasion de la journée mondiale sans tabac, Santé publique France révèle que 12 millions de personnes fument quotidiennement en France. Un chiffre qui stagne depuis 2019. La faute, selon Loïc Josseran, à l'absence "d'une politique volontaire" de la part du gouvernement sur le prix du paquet de cigarettes mais également en raison de la vente de tabac auprès des mineurs.

franceinfo : La France compte 12 millions de fumeurs quotidien selon Santé publique France, ce chiffre se maintient à un niveau élevé depuis 2019. Pourquoi stagne-t-il ?

Loïc Josseran : La première raison, c'est qu'il avait été observé à l'issue de la crise Covid que la prévalence en France était repartie à la hausse. Le côté rassurant, c'est que cette hausse s'est stabilisée mais à un niveau élevé. Nous n'avons pas encore retrouvé de baisse. La deuxième explication, c'est probablement la stagnation du prix du paquet puisque seules quelques augmentations techniques, rattrapant l'inflation, ont été mises en œuvre. En revanche, une politique fiscale volontaire, dynamique sur plusieurs années avec un prix cible, que nous estimons à 15 € en 2027, permettrait d'envoyer un signal fort en matière de a de consommation. C'est vraiment l'attentisme actuel, qui dure depuis maintenant quasiment 2020, sur la fiscalité qui est responsable aujourd'hui de cette stagnation de la consommation.

Il faut augmenter le prix du paquet de cigarettes ?

Il faut augmenter le prix, il faut l'augmenter nettement. C'est un élément fort de la prévention. L'Organisation mondiale de la santé le dit. Cette prévention doit également s'appliquer sur l'interdiction des "puff", qui est aujourd'hui une vraie porte d'entrée dans le tabagisme. Et puis, je pense qu'il y a un élément qui reste très, très fort dans notre pays : c'est le fait que ce produit tabac est toujours facilement accessible aux mineurs. Normalement, le tabac devrait être strictement interdit à la vente aux mineurs. Or, il n'en est rien. Je rappelle simplement que les deux tiers des buralistes en France vendent du tabac aux mineurs sans aucun contrôle. C'est absolument redoutable puisque on fait rentrer dans le tabagisme sciemment, volontairement, les plus jeunes pour s'assurer d'une consommation qui va s'inscrire dans le temps avec une addiction forte et qui, elle, va faire la prévalence de demain. Si on n'y prend pas garde, la génération sans tabac voulue par le président de la République en 2032, ne sera qu'une chimère et nous avons déjà devant nous les premiers éléments de cette prochaine génération de fumeurs qui est déjà là.

Pour vous, l'État ne s'en donne pas moyens ?

Non, même si l'Etat a été volontaire. On a, c'est vrai en France, un arsenal de contrôles du tabac qui est fort. On a l'interdiction de la vente aux mineurs, même si elle n'est pas respectée. On a l'augmentation des prix qui a été régulière, mais qui n'est plus faite aujourd'hui. Il y a des mesures heureusement sur lesquelles on ne peut pas revenir, comme le paquet neutre par exemple ou l'interdiction de fumer dans les lieux publics. Tout ça, ce sont des mesures qui sont importantes, qui sont efficaces mais il faut continuer à développer des mesures de prévention efficaces, agir sur cette prévention, innover. Il y a une mesure qui peut être intéressante : c'est la commercialisation du tabac. Ce qui veut dire que, à partir d'une certaine année de naissance, on n'a plus le droit d'acheter du tabac. Interdire l'achat d'un produit dont on n'a pas la consommation et qu'on n'a jamais utilisé, est-ce en soi une restriction de liberté ? Je n'en suis pas certain. Mais ça, l'industrie le sait très bien et elle sait que si elle ne vend pas aux enfants, elle périclita très rapidement. Donc elle se doit de vendre aux enfants.

Donc si on on va l'attaquer véritablement sur cette logique de commercialisation et on soustrait les plus jeunes de façon stricte à l'influence de cette industrie et à l'achat du tabac, là, je pense qu'on fera un pas énorme vers une baisse spectaculaire et rapide de la prévalence. C'est ce qu'ont fait notamment les Néo-zélandais avec un succès très fort. Aujourd'hui, si on voulait contrebalancer les effets du tabac, d'un point de vue financier, il faudrait un paquet à 40 €. Le tabac, ça coûte à l'État, à nous tous 120 milliards d'euros par an. C'est 2 000 € pour chaque fumeur mais aussi pour chaque non-fumeur. Donc ça coûte à tout le monde : à l'échelle individuelle, ça coûte en santé mais à l'échelle collective, ça nous coûte aussi, nous, financièrement. C'est quelque chose qui nous concerne tous.

Il y a une autre piste que vient de mettre sur la table le ministre de la Santé : les prescriptions en pharmacie de cigarette électronique comme substituts nicotiniques. Vous en pensez quoi ?

Cela pourra aider effectivement des fumeurs à sortir du tabac. En revanche, il ne faut pas perdre de vue que là, si on pense sortir du tabac en faisant juste évoluer les modalités de sevrage ou les outils accessibles au remboursement pour le sevrage, on est loin du compte. Là, on est en train de parler de vider la piscine olympique à la petite cuillère alors que de l'autre côté, l'industrie du tabac nous la remplit à la lance à incendie. Il faut aller plutôt s'occuper d'une façon forte de la lance à incendie et peut-être augmenter la taille de la petite cuillère plutôt que de courir après une industrie qui aura fait tous ses bénéfices et qui aura rendu malades plusieurs générations et détruit l'environnement. Je pense qu'il faut aller dans le dur, sur l'accès aux produits et sur la prévention chez les plus jeunes. C'est là que ça se joue si on veut arrêter cette épidémie tabagique, pédiatrique dans les 10 à 15 ans qui sont devant nous.

Selon Santé publique France, six fumeurs quotidiens sur dix souhaitent arrêter. Avez-vous des conseils pour eux ?

Qu'ils n'hésitent pas à se faire accompagner, à utiliser de la substitution nicotinique. Pourquoi pas, c'est vrai, une cigarette électronique, c'est un moyen valide de l'arrêt du tabac. Mais qu'ils n'hésitent pas à en parler aux professionnels de santé qui sont autour d'eux, à leur pharmacien, de façon à se faire aider, à se faire conseiller, à aller vers Tabac Info Service également pour être en mesure de d'avancer sereinement dans leur sevrage. Et toujours penser que même si c'est un peu difficile, la vie ensuite sans tabac est tout aussi plaisante, voire davantage qu'une vie avec le tabac et on en profite largement plus.

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