Toxicomanie : le Subutex®, un traitement controversé
Jérémy n'oubliera jamais la première fois où il a pris de l'héroïne. Il était au lycée. Puis, c'est l'engrenage et le début de plusieurs années de consommation rythmée par la recherche et la prise de drogue. Pour son vingtième anniversaire, Jérémy essaye de décrocher. Traitement à la codéine ou encore cure de désintoxication, rien ne fonctionne pour lui enlever le manque.
"Le Subutex® m'a enlèvé tous les effets de manque"
Pour aider Jérémy à décrocher, le seul médicament qui a fonctionné est le Subutex®, ou buprénorphine à haut dosage. Comme lui, 150.000 patients sont traités avec ce traitement en France. Vingt ans plus tard, l'ancien toxicomane est aujourd'hui stabilisé. "Le Subutex® vient enlever tous les effets de manque que peut avoir l'addiction à n'importe quelle drogue. Il m'a permis de vivre normalement", confie Jérémy.
L'Académie de médecine s'alarme des mauvais usages du médicament
Aux yeux de l'Académie de médecine, les règles d'ordonnance ne sont pas suffisamment respectées. Dans son rapport,l'institution met en cause les héroïnomanes qui se fournissent avec une simple prescription et qui opèrent des trafics sur le dos des organismes payeurs. "Certains vont aller consulter plusieurs médecins et vont se faire prescrire plusieurs ordonnances pour recueillir une quantité très importante de produits qui seront destinés à la revente", explique le Pr Jean Costentin, membre de l’Académie de médecine.
De plus, certains toxicomanes s'injectent le Subutex® au lieu d'une prise par voie orale, ce qui augmente les risques de contamination. "Certains vont jusqu’à avancer le chiffre d’un tiers des bénéficiaires, pour qui ce médicament va être injecté. En fait, on n'a rien gagné. Le sujet est susceptible de contracter l'hépatite ou le sida", ajoute le Pr Jean Costentin.
Remplacer le Subutex® par la méthadone ?
L'une des recommandations principales de l'Académie de médecine serait de prescrire en première intention un autre traitement de sevrage : la méthadone.
Cet opiacé, plus puissant, est délivré uniquement dans des centres spécialisés, ce qui limite les dérives. Mais cette substitution n'est pas toujours justifiée médicalement. "Le patient n'est pas un pion ou un numéro à qui on peut imposer un traitement. On est obligé de prendre en compte son histoire, sa consommation, sa pratique avec le Subutex®. S'il y a un mésusage, on ne peut que l’inciter à aller vers la méthadone, mais c’est un travail de persuasion", explique le Dr Xavier Aknine, médecin généraliste et porte-parole du groupe MG Addictions.
Académie de médecine et addictologues s'accordent tout de même sur un point : la nécessité de mieux former les médecins généralistes, souvent démunis face aux patients souffrant d'addiction aux opiacés.
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