Fin de vie : des euthanasies clandestines pratiquées à l'hôpital public
Pour faire face à la douleur de patients en fin de vie, certains médecins pratiquent des euthanasies dans les hôpitaux publics. L'un d'eux, Denis Labayle, a accepté de témoigner à visage découvert pour le magazine Envoyé Spécial.
Pour répondre à la douleur des patients en fin de vie, certains médecins pratiquent des euthanasies à l'hôpital public. L'un d'entre eux a accepté d'en parler à visage découvert, pour le magazine Envoyé Spécial, diffusé sur France 2. Denis Labayle a été chef de service pendant 26 ans en gastro-entérologie dans un grand établissement d'Île-de-France. Aujourd'hui, il lève un tabou : il existerait des euthanasies dans certains hôpitaux publics. "On n'en parle jamais. Disons qu'on en parle avec le collègue avec qui on travaille (...). Les gens n'ont pas été formés pour parler des choses essentielles, de la souffrance, de la mort", affirme Denis Labayle, qui poursuit : "On sait que ça se fait couramment. Alors, ça dépend des services, ça dépend du médecin, ça dépend de l'ambiance de l'équipe."
Des associations de tranquillisants et de morphiniques à forte dose
Confronté à des patients atteints de maladies très graves, il a fait face à des souffrances que son équipe et lui ont jugées inacceptables. "C'est très simple pour moi, j'ai une philosophie, c'est répondre à la demande du patient. C'est-à-dire que s'il veut avoir absolument l'équivalent de la loi Léonetti, qu'il soit déshydraté, sans alimentation et qu'il meurt en 15 jours/trois semaines. C'était épouvantable pour l'équipe. Anti-éthique pour moi. Mais si les gens le réclamaient, je l'appliquais. Par contre, beaucoup de gens me disent : 'Écoutez, on voudrait partir vite, ça suffit, on a suffisamment souffert.' Bien sûr qu'on accélérait, et qu'on accélérait en fonction des demandes des personnes", confie le médecin, qui ajoute que les "produits les plus efficaces ne sont pas disponibles pour nous", et que ces produits, comme ceux utilisés en anesthésie, sont de "plus en plus contrôlés et comptabilisés au niveau des blocs opératoires" depuis la loi Léonetti.
"Alors, on arrange avec des associations de tranquillisants, de morphiniques à forte dose qui ont, au bout d'un certain temps, à une certaine dose, un effet létal", explique Denis Labayle, conscient d'avoir enfreint la loi, disant qu'il avait "conscience d'être humain". Selon les parlementaires qui ont travaillé sur la question, il y aurait entre 2 000 et 4 000 euthanasies clandestines chaque année en France.
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