La polémique sur la fresque porno au CHU de Clermont-Ferrand en quatre actes
La porte-parole d'Osez le féminisme, association qui avait dénoncé la présence de cette peinture dans la salle de garde des internes, se dit victime de harcèlement et de menaces.
Nouveau rebondissement dans la polémique sur la fresque pornographique au CHU Gabriel-Montpied de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). La porte-parole d'Osez le féminisme, association qui a dénoncé la présence de cette peinture dans la salle de garde des internes, se dit victime de harcèlement et de menaces, mercredi 21 janvier. Elle a l'intention de porter plainte. Retour sur cette affaire en quatre actes.
Acte 1 : Osez le féminisme dénonce la fresque pornographique
La fresque en question est présente sur le mur de la salle de repos des médecins de garde depuis une quinzaine d'années. Elle représente Wonder Woman en plein gang bang avec Batman, Flash, Superman et Superwoman. L'aspect pornographique de l'image n'a dans l'absolu rien de choquant pour ces praticiens : comme le souligne l'ouvrage L'Image obscène, les salles de garde françaises sont recouvertes de dessins X en tous genres. Des bulles ont toutefois été rajoutées récemment, porteuses de messages violents faisant référence à la loi santé défendue par la ministre Marisol Touraine : "Tiens, la loi Santé !", "Prends-la bien profond !"
Postée sur la page Facebook du groupe Les médecins ne sont pas des pigeons, la semaine dernière, l'image fait vite réagir Osez le féminisme. Dans son communiqué, l'association, qui y voit la mise en scène d'un "viol", "demande au Conseil national de l’Ordre des médecins d'agir au plus vite et de faire supprimer cette fresque et d'agir vis-à-vis de ses auteurs." "La présence de ce genre de fresque fragilise durablement la confiance que les femmes peuvent avoir dans leur praticien", dénonce notamment Osez le féminisme.
Son indignation trouve un écho chez Laurence Rossignol, secrétaire d'État à la Famille, qui parle de "viol collectif". Et la ministre de la Santé condamne cette fresque, qu'elle qualifie de "particulièrement choquante", y voyant une "incitation au viol inacceptable", selon son entourage.
Acte 2 : les internes se justifient
Le message est supprimé de la page Facebook, et l'avocat du syndicat des internes du CHU de Clermont-Ferrand tente d'éteindre la polémique. "En accord avec le doyen de la faculté de médecine, la direction du CHU a décidé que cette fresque sera intégralement effacée dans les prochains jours", indique Me Jean-Sébastien Laloy. Ce dernier précise "qu'à aucun moment, la ministre de la Santé n'est représentée dans ce détournement déloyal et choquant".
Dans les commentaires sous le post Facebook, supprimé depuis, le ton est moins conciliant. De nombreuses personnes défendent son aspect humoristique. Un des soutiens du groupe de médecins note que Wonder Woman effectue une masturbation sur l'un des autres personnages, signifiant par ce geste qu'elle est consentante et qu'il ne s'agit pas d'un viol. Selon Mélanie Marquet, présidente de l'Intersyndicat national des internes (ISNI), la personne au centre symbolise "chaque interne se faisant ‘baiser’ par la loi santé". Interrogé sur ce sujet, mardi, le médecin et journaliste santé Michel Cymes abonde : "Cette fresque ne représente pas un viol, c'est juste une tradition", assure-t-il sur RMC.
Acte 3 : la fresque est recouverte
La direction du CHU indique que des "suites juridiques adéquates, disciplinaires, voire judiciaires sont engagées à l'encontre du ou des auteurs présumés responsables de ces agissements inacceptables et condamnables". Dans la foulée, la fresque est retirée, dès lundi, et cette image postée sur la page Facebook du groupe, avec ce mot-clé : "Je suis la fresque", en allusion au slogan "Je suis Charlie".
Acte 4 : la porte-parole d'Osez le féminisme victime de harcèlement
La porte-parole d'Osez le féminisme, Anne-Cécile Mailfert, devient alors la cible du mécontentement d'internautes. Elle affirme à Metro News avoir reçu des dizaines de textos et d’appels sur son portable, au soir du mardi 20 janvier, après que son numéro de téléphone portable a été divulgué sur la page Facebook du groupe, une information retirée depuis. Certains messages sont "relativement polis", dit-elle, mais d’autres "plus menaçants, me disant 'On n’en a pas fini avec vous'". Une psychiatre ferait partie des "harceleurs" qui l’ont appelée.
"Nous défendons des positions clivantes et pourtant, nous n’avons jamais été traités ainsi. Nous avons souvent été critiqués mais jamais harcelés, c’est une première", assure-t-elle à Metro News. Elle n'a pas encore détaillé les modalités de sa plainte, mais se montre déterminée : "Des médecins ne doivent pas se sentir au-dessus des lois."
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