Allègement des restrictions sanitaires contre le Covid : "Il ne faut pas considérer que la partie est gagnée d'avance", prévient un infectiologue
"Si on se rend compte qu'au bout, on peut accepter 15 000 morts comme on accepte 15 000 morts de la grippe et bien on pourra faire comme avec la grippe", estime Benjamin Davido alors que le ministre de la Santé prévoie de nouveaux allègements des mesures sanitaires.
"Il ne faut pas tomber dans une complaisance et considérer que la partie est gagnée d'avance", a alerté mercredi 16 février sur franceinfo Benjamin Davido, médecin infectiologue, directeur médical et référent Covid-19 à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches, après l'allègement des restrictions sanitaires et les annonces d'Olivier Véran sur franceinfo.
franceinfo : Olivier Véran a annoncé qu'il serait peut-être possible de ne plus porter le masque en intérieur à partir de mi-mars. Qu'en pensez-vous ?
Benjamin Davido : Cela me semble plus légitime que les annonces faites pour le 28 février qui sont probablement un peu prématurée. C'est la première fois qu'on va annoncer des décisions de levée de restrictions sans aucun indicateur, aucun chiffre. Il faut admettre qu'on est dans une situation très particulière. Plus d'un Français sur deux a été triplement vaccinés et c'est la norme pour être protégé efficacement contre Omicron. On a un nombre considérable de contaminations qui fait qu'un million de Français ont croisé le virus. Arithmétiquement, au bout de 60 jours, vous arrivez à cette fameuse immunité collective. C'est probablement une circonstance très particulière, en lien avec cette vague, qui nous permettra je l'espère d'ici la fin du mois de mars d'atterrir. Fin mars on devrait se trouver dans une situation où l'hôpital récupérera son niveau d'avant, ce qui permettra d'avancer.
La situation s'améliore, selon Olivier Véran, même s'il y a encore beaucoup de malades. Vous faites le même constat ?
Oui, mais il ne faut pas tomber dans une complaisance et considérer que la partie est gagnée d'avance parce que le virus et ses variants nous ont toujours joué des tours.
"On est à peu près à un peu plus de 30 000 malades hospitalisés en France, une première depuis mars 2020."
Benjamin Davido, infectiologueà franceinfo
On voit s'amorcer une décrue des hospitalisations et surtout on n'a pas expérimenté avec Omicron la saturation des réanimations, ce qui est l'élément clé pour gérer cette épidémie. On voit se dessiner un pic des hospitalisations avec une décrue et la dynamique nous permet de penser qu'à la fin du mois de mars on sera dans une situation beaucoup plus facile. Avec l'arrivée du printemps on va vivre plus dehors, notre mode de vie va faire que les contaminations seront différentes.
La réouverture des boîtes de nuit vous inquiète-t-elle ?
Je ne peux pas dire qu'elle m'inquiète parce que le fait de pouvoir manger debout, ne pas mettre de masque dans les restaurants est déjà une réalité. Vous avez un tel nombre de contaminations qu'on a du mal à remonter le contact tracing. La vraie question est de savoir si, quand on aura pu reprendre les hospitalisations et libéré suffisamment de lit d'hôpitaux, on ne pourra pas revenir à la vie d'avant et supprimer l'ensemble des mesures. Pour cela, il faut que les allègements se fassent progressivement et que la vague soit passée. Si on se rend compte qu'au bout, on peut accepter 15 000 morts comme on accepte 15 000 morts de la grippe et bien on pourra faire comme avec la grippe. Ne pas fermer les boîtes de nuit, ne pas mettre de masque en intérieur. Donc, il faut être extrêmement prudent lorsqu'on arrive au pic de la vague des hospitalisations pour dire qu'on va triompher parce qu'à chaque fois qu'on l'a cru le virus nous a rattrapé.
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