Campagne massive de tests : "Ça ne doit pas faire reculer le dépistage des gens symptomatiques", s'inquiète une infectiologue
Pour Odile Launay, membre du comité scientifique vaccin Covid-19, la priorité est de permettre à ces patients qui ont des symptomes, et leur entourage, de se faire tester "dès que possible pour leur permettre de s'isoler".
Jean Castex, Gérald Darmanin et Olivier Véran ont détaillé jeudi 10 décembre les modalités du déconfinement qui entrera en vigueur le 15 décembre. Les déplacements entre région sont de nouveau autorisés et un couvre-feu sera mis en place de 20h à 6h. Le ministre de la Santé a par ailleurs annoncé le lancement de quatre opérations de dépistage à grande échelle. Elles auront lieu au Havre, à Charleville-Mézières du 14 au 19 décembre, puis à Roubaix et Saint-Etienne, le 11 janvier. "Ça ne doit pas faire reculer le dépistage des gens symptomatiques", a plaidé ce jeudi sur franceinfo Odile Launay, professeure en maladies infectieuses à l'Université de Paris, et aussi membre du comité scientifique vaccin Covid-19.
franceinfo : Votre réaction à ces mesures qui vont entrer en vigueur mardi prochain ?
Odile Launay : Je crois qu'on s'attendait tous à ce que ces mesures soient prises parce qu'effectivement, on a constaté qu'après une descente assez rapide du nombre de nouveaux cas et du nombre d'hospitalisations, les choses se sont ralenties, voire maintenant sont arrivées à un plateau. Ce plateau est le corollaire d'un virus qui circule de façon encore très active avec de nouvelles contaminations. Et si on ne maintient pas certaines règles et en particulier l'interdiction de se réunir très nombreux dans des espaces clos, et bien on va repartir avec à nouveau une augmentation des cas et une saturation rapide des hôpitaux.
Il y a quelques semaines, la situation semblait s'améliorer. Pourquoi ça n'a pas continué ?
Le confinement tel qu'il a été proposé pour cette deuxième vague est un confinement plus souple que ce qu'on a eu lors la première vague, avec au départ finalement, une évolution plus favorable que celle à laquelle on pouvait s'attendre. Alors est-ce que c'est lié aux conditions météo et aux conditions de vie, probablement au froid même ?
On est confrontés à une circulation du virus qui reste très importante, beaucoup plus que lors du premier confinement.
Odile Launayà franceinfo
Donc, il y a, à la fois des modalités de confinement qui sont différentes, une situation météorologique différente et, encore une fois, ce n'est pas propre à la France : on voit que dans les pays qui nous entourent, la situation est tout à fait semblable.
Des dépistages de masse vont être menés dans quatre métropoles avant et après Noël. C'est une bonne chose ?
Je crois que ce sont des initiatives un peu pilotes qui ont pour objectif d'évaluer justement ce type de processus. C'est possible si on a la capacité de tester tout le monde, mais ça ne doit pas mettre en péril, faire reculer le dépistage des gens qui sont symptomatiques, qui, eux, doivent avoir accès aux tests le plus vite possible lorsqu'ils sont symptomatiques et pouvoir tester les personnes contacts dès que possible pour leur permettre de s'isoler. Donc, je crois que ce sont des initiatives qui vont être mises en place et dont on pourra évaluer l'intérêt. Mais elles ne doivent pas faire reculer les dépistages et le test des gens symptomatiques et de leurs contacts, dès que possible.
Donc, le ministre de la Santé a eu raison de dire aux Français de ne pas se précipiter dans les laboratoires ou les pharmacies pour effectuer des tests avant le réveillon de Noël ?
Je crois qu'il y a deux questions. Il y a la question, effectivement, de la saturation des laboratoires et des structures qui sont capables de faire ces tests. Et puis, il y a aussi le risque d'une fausse sécurité, c'est-à-dire qu'on va se faire tester une semaine avant de partir en vacances ou rencontrer sa famille. Mais ça ne veut pas dire que dans l'intervalle, on ne va pas être en contact avec le virus. Donc oui, le test est intéressant, mais il ne doit pas non plus donner le sentiment, une fois qu'on est négatif, qu'on est complètement à l'abri et surtout à l'abri de transmettre le virus à quelqu'un de plus fragile que l'on pourrait être amené à rencontrer à l'occasion de cette période de fin d'année.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.