Coronavirus : la Suède a échoué sur son pari de l'immunité collective face à la pandémie
L’épidémie de Covid-19 ne reflue pas au même rythme partout en Europe. La situation reste préoccupante au Royaume-Uni et en Suède. Stockholm semble donc avoir échoué dans sa stratégie très particulière d’immunité de groupe.
Depuis début juin, les chiffres sont édifiants : la Suède déplore 40 morts par jour en moyenne. C’est autant que la France, sauf que les Suédois sont sept fois moins nombreux que nous. Leur taux de mortalité est donc, c’est arithmétique, sept fois supérieur au nôtre en ce moment. En plus, les médecins redoutent un nouveau rebond épidémique après les rassemblements de ces derniers jours à Stockholm en solidarité avec le mouvement Black Lives Matter.
L'Allemagne et les Pays-Bas refusent l'accès aux Suédois
La Suède figure désormais au 5e rang mondial en termes de taux de mortalité lié au virus. Même si les comparaisons en la matière sont hasardeuses parce que tous les pays ne comptent pas la même chose, on peut au moins en tirer une conclusion : la stratégie suédoise n’a pas fonctionné. Le calcul délibéré consistant à laisser le virus se propager, sans confinement, avec des écoles et des commerces ouverts, en misant sur une immunité collective, ce calcul n’a pas porté ses fruits.
La Suède, avec 4 717 morts à ce jour, compte quatre fois plus de victimes que ses voisins scandinaves. Et surtout, le reflux est donc très lent, beaucoup plus lent qu’ailleurs en Europe. La capitale, Stockholm, reste particulièrement touchée. Résultat : l’Allemagne et les Pays-Bas refusent de laisser entrer les citoyens suédois sur leur sol.
L'efficacité économique en question
L’échec de cette stratégie commence à faire débat dans le pays, en particulier sur le sort des personnes âgées : 90% des décès concernent des plus de 70 ans. Et sur cette population, les trois quarts des morts ont eu lieu à domicile ou en maison de retraite. De nombreux médecins estiment que des vies auraient pu être sauvées avec un transfert à l’hôpital en soins intensifs. Des voix se sont donc élevées depuis fin mai, dans la communauté scientifique, pour dénoncer cette stratégie mise en place par le conseiller du gouvernement, l’épidémiologiste Anders Tegnell.
La critique porte aussi sur l’inefficacité économique de cette stratégie. Elle n’a pas permis d’éviter le plongeon économique. Tout simplement parce que la Suède dépend beaucoup de ses exportations. Donc comme l’économie mondiale s’est arrêtée, l’économie suédoise s’est arrêtée aussi, de force. Le PIB devrait chuter de 10% cette année, comme en France.
Critique modérée du gouvernement
La controverse bascule progressivement sur le terrain politique. Le leader de l’extrême droite, Jimmy Akesson, est le plus offensif et demande des comptes au gouvernement social-démocrate. Une commission d’enquête indépendante est mise en place. Mais la Suède est une société de consensus. La critique y reste donc modérée : 48% des Suédois continuent de faire confiance au gouvernement.
Pour autant, Anders Tegnell maintient son pari. L'épidémiologiste pense que cette stratégie d’immunité collective va finir par fonctionner à terme. Il dit que si c’était à refaire, il préconiserait sans doute une stratégie de compromis entre le laissez faire et le confinement total. Mais il pense que la Suède est malgré tout en train de développer une immunité de groupe. Donc si une deuxième vague du virus apparaît, la Suède sera de loin, selon lui, le pays le mieux protégé.
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