Cet article date de plus de quatre ans.

Coronavirus : les difficultés de l'enseignement à distance en Pologne

En Pologne, les écoles sont fermées depuis mi-mars et au moins jusqu’au week-end de Pâques face à la pandémie de coronavirus. Mais entre les carences en équipement et un manque de formation des professeurs, l'enseignement en ligne se met difficilement en place. 

Article rédigé par franceinfo - Thomas Giraudeau, édité par Théo Hetsch
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Des habitants confinés profitent du soleil à leur balcon, le 28 mars 2020, à Varsovie. (JANEK SKARZYNSKI / AFP)

Pas sûr que cela réconforte les enseignants français qui bataillent avec les plateformes numériques et le dispositif "Ma classe à la maison"... mais leurs homologues polonais connaissent au moins autant de difficultés. Depuis mercredi 25 mars, l’éducation en ligne est obligatoire en Pologne, où les autorités ont pris des mesures strictes contre le coronavirus. Les enseignants et les enfants doivent en théorie poursuivre le programme scolaire. Mais peu d'outils sont à leur disposition pour cela et l'application laisse donc à désirer.

Le premier frein concerne les foyers polonais. Les inégalités d’accès à Internet sont criantes dans le pays : les élèves des grandes villes sont plutôt favorisés, alors qu'à la campagne, suivre les cours en vidéo peut s'avérer difficile. Selon les statistiques nationales, 13 % des foyers polonais n’ont même pas du tout accès à Internet. Quant à l'équipement informatique, il laisse également à désirer : "Nous avons un seul ordinateur portable pour quatre personnes qui travaillent, mes 3 enfants et moi. Quand un de nous est sur l’ordinateur, les autres doivent se débrouiller sur les smartphones", explique ainsi Kristina, une mère de famille qui élève seule ses trois enfants à 40 kilomètres de Varsovie. Elle tente de se débrouiller malgré tout.

Ce n’est pas facile parce qu’ils ont cours au même moment. Donc je fais des va-et-vient d’un enfant à l’autre pour les aider un peu.

Kristina, mère de famille avec trois enfants

à franceinfo

Impossible de faire beaucoup de devoirs sur les téléphones. Le ministère de l’Éducation va donc débloquer mercredi 1er avril près de 40 millions d’euros de fonds européens pour équiper les enfants. Une plateforme éducative est également désormais en ligne, comme l'a expliqué le ministre de l'Éducation nationale polonais, Dariusz Piontkowski.

"On a beaucoup de problèmes techniques"

Le deuxième frein concerne les professeurs, qui n'ont pas tous été formés aux plateformes de cours en ligne. Cela varie suivant les établissements, si les directeurs d’écoles ont eu le temps et la volonté de former les enseignants à cela. Ainsi, certains d'entre eux, à l'image de Edyta Nalecz-Dzwigala, professeure de français dans un lycée réputé de Varsovie est un peu perdue : "Je fais partie de l’ancienne génération, si je peux dire. Je ne manie pas parfaitement tous ces outils", avoue l'enseignante. "On a beaucoup de problèmes techniques, de connexion, d’accès. Ça bug quoi... Donc on se débrouille. Ça demande beaucoup de travail", déplore-t-elle, en estimant en tout cas impossible, dans ces conditions, de suivre entièrement le programme scolaire habituel.

Pourtant, les examens équivalents en France du brevet et du bac, sont toujours programmés à la date prévus, ils n’ont pas encore été décalés. Le ministère de l’Éducation explique même qu'ils pourraient avoir lieu en ligne : le brevet est prévu fin avril, tandis que les épreuves du bac s'étalent durant le mois de mai. Ces dates-là sont pour le moment maintenues, malgré les inégalités criantes entre les élèves et les conditions incertaines dans lesquelles ils pourront passer les examens :

Trois de mes élèves ne se sont jamais connectés. Leurs parents s’en fichent qu’ils assistent ou pas aux cours en ligne.

Joanna Dobkowska, institutrice à Varsovie

à franceinfo

"Ça fait deux semaines que ça dure et je n’ai aucun moyen de les forcer à être là", se lamente Joanna Dobkowska, institutrice à Varsovie. "À l’école, c’est plus facile pour les élèves de se concentrer. Mais en ce moment, ils sont chez eux, parfois seuls, et n’assistent pas à mes cours". Pour elle aussi, il faut reporter les examens. Ses élèves, âgés de 12-13 ans, ont surtout besoin selon elle d’être ensemble, de comprendre ce qu’il se passe, d’être rassurés par un adulte. Leurs parents, parfois, auraient bien besoin également d'être rassurés : beaucoup sont terrifiés à l’idée de perdre leur emploi.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.