"Cela donne surtout une ambiance d'hôpital, ça me déprime" : masqués, les collégiens reprennent leur quotidien au temps du Covid-19
À quoi ressemble la vie des élèves, une semaine après la rentrée scolaire marquée par le coronavirus ? Franceinfo a passé une journée à leurs côtés, au collège Paul Landowski, à Boulogne-Billancourt, près de Paris.
"Bonjour ! Le masque bien sur le nez s'il-vous-plaît !" Dès l’ouverture du portail du collège Paul Landowski, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), le surveillant rappelle les règles aux élèves. Le port du masque, obligatoire pour tous contre le Covid-19, c'est évidemment le gros changement de la rentrée, et ça n'est pas toujours agréable à porter. "Parfois c'est un peu gênant que dans la cour, on ne peut pas l'enlever, on ne s'entend pas très, très bien, fait remarquer une adolescente. C'est un petit peu suffocant à force."
Le masque, un frein à la compréhension
Pour le premier cours de la journée, le professeur d'anglais fait entrer les élèves dans la classe. "OK, so let's go !", lance-t-il, masque sur le visage. On travaille la prononciation du mot "Kangourou", à l'anglaise. Qu'est ce que ça change d'avoir un professeur masqué ? "On ne voit pas très bien l'articulation, ça c'est gênant", juge une élève.
On ne l'entend pas super bien, du coup on a besoin de voir les mots dans sa bouche mais on n'y arrive pas.
Une élèveà franceinfo
Dans la classe d'à côté, on travaille les vocalises et les gammes. Pour cette première séance de chant, en cours de musique, là aussi, le masque c'est pas très pratique. "J'aime bien chanter et c'est un peu soûlant le masque, parce qu'on ne chante pas bien avec, cela bloque la voix", fait remarquer un jeune garçon. Les enfants entonnent d'une seule voix La complainte de l'heure de pointe, de Joe Dassin. "Un peu plus fort", lance le professeur au piano. "Ce n'est pas très simple de chanter avec un masque, effectivement, concède-t-il. Ce que les élèves entendent manque de précision, et ça empêche une respiration confortable."
Pour le flirt, place à l'imagination
À la récréation, masque obligatoire, aussi ! Les filles gloussent entre elles au fond de la cour, regardent les garçons du coin de l'oeil. Ces masques, "cela donne surtout une ambiance d'hôpital, ça me déprime", rétorque l'une d'elles. Pour draguer, ça change la donne. "C'est beaucoup plus compliqué avec le masque, surtout les nouveaux du collège, on ne sait pas à quoi ils ressemblent, sourit une adolescente. Il y a plein de gens dans ma classe, je connais leurs yeux, mais le reste... Donc c'est très, très frustrant." Pour sa copine, la technique infaillible : "On imagine ce qu'il y a en dessous." Quelques déceptions ? "Souvent."
Je pensais qu'il y avait un garçon du collège très beau, mais finalement, en enlevant son masque... Il était très moche.
Une élèveà franceinfo
Le coup de sifflet retentit dans la cour. "Léo, Victor, vous gardez vos affaires avec vous", lance le professeur d'EPS. "Vous vous asseyez chacun au niveau d'un plot". En baskets et tenue de sport, les élèves s'exécutent, tandis que le professeur se met à lire à voix haute le réglement. L'accès aux vestiaires est dorénavant interdit, il faut directement arriver en tenue, mais aussi avoir sa gourde remplie d'eau : comme pour les vestiaires, "on ne va pas à l'intérieur pour boire." Quelques aménagements ont été effectués pour cette rentrée. "On a enlevé l'acrosport, parce qu'on devait faire des pyramides à plusieurs, les contacts étaient obligatoires, explique l'enseignant. On a enlevé les activités de ce type là, comme la boxe aussi."
Éviter les attroupements
Mais le point de stress des familles, comme de l’équipe encadrante, c'est bien la cantine, où les élèves se retrouvent à l'heure du déjeuner. Pour y rentrer, les règles sont strictes : "niveau par niveau, et classe par classe surtout", répond la CPE. Pas facile d’éviter l’attroupement. Heureusement, certains parents acceptent de garder leur enfant le midi.
Ils ont entendu l’appel de la principale Marie-Laure Barraud-Gauthier à ce sujet. Alors que les fermetures d'établissements se multiplient en France après des cas de Covid-19, son but : ne laisser aucun enfant sur le bord du chemin. "Dans la gestion des gestes barrières, les élèves adhèrent quand même très facilement, mais je ne veux pas perdre certains élèves parce que si on était amené à fermer des classes ou l'établissement, ça serait encore compliqué", assure la proviseure. Pour l’instant tous les projets pédagogiques et voyages scolaires sont en suspens.
Une fois les cours terminés, si certains rentrent directement chez eux, gardent leur masque au fast-food, dans la rue, pour d'autres, difficile de respecter la règle. Dans le square situé à dix mètres du collège, un groupe de filles s'amuse en regardant des vidéos sur les réseaux sociaux. Toutes sont démasquées. "C'est vrai qu'on profite un peu de cet instant pour l'enlever parce que sinon on a vraiment trop chaud", concède l'une. "Pour dire la vérité, on se fait des câlins, on se fait des bisous, on ne respecte pas vraiment", avoue l'autre.
Ils n’ont pas vraiment le choix bien sûr, mais ces collégiens ont finalement très vite intégré ces mesures sanitaires, même si elles ne sont pas toujours respectées à la lettre, ils vivent simplement leur vie d’adolescents.
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