Covid-19 en Guadeloupe : quatre questions sur la grève générale contre la vaccination obligatoire des soignants et le pass sanitaire
Un appel à la grève générale illimitée a été lancé lundi sur l'île pour protester contre l'obligation vaccinale et le pass sanitaire.
Troisième jour de grève générale illimitée en Guadeloupe. La mobilisation contre l'obligation vaccinale des soignants et le pass sanitaire se poursuit mercredi 17 novembre, notamment au CHU de Pointe-à-Pitre.
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Comme la Martinique, la Guadeloupe, où l'état d'urgence sanitaire a été levé le 14 novembre au soir, est confrontée à une fronde du personnel soignant. Blocages, heurts... Alors que la situation est tendue dans l'archipel, franceinfo fait le point sur ce mouvement.
1 D'où vient cet appel à la grève ?
L'appel à la grève générale, qui a débuté lundi, a été lancé par un collectif d'organisations syndicales et citoyennes, pour protester contre la vaccination obligatoire pour les soignants et l'interdiction d'exercer qui en découle en cas de non-conformité à cette règle. Ils refusent que "l'ensemble des travailleurs de la santé" reçoivent "leur courrier de suspension".
Une manifestation a rassemblé mardi entre 300 et 400 personnes au CHU de Pointe-à-Pitre. Les accès à l'hôpital de Guadeloupe étaient bloqués pour les voitures, mais les piétons continuaient de circuler. Les pompiers ont de leur côté mené une opération escargot devant le CHU. "La lutte continue, le gouvernement n'entend rien, on est acculés, alors on continuera jusqu'à ce qu'on soit entendus", a déclaré Jocelyn Zou, représentant du syndicat Force ouvrière chez les pompiers. Ils exigent une "dérogation" à l'obligation vaccinale.
2 Où en est la vaccination en Guadeloupe ?
En Guadeloupe, la campagne de vaccination contre le Covid-19 peine à porter ses fruits. Au 10 novembre, seuls 46% des majeurs avaient reçu au moins une dose de vaccin, selon l'Agence régionale de santé. A titre de comparaison, ce chiffre s'élève à 90% à l'échelle nationale, selon le ministère de la Santé.
Concernant les soignants, 85% d'entre eux sont vaccinés, "tous établissements confondus", affirme l'ARS. L'agence déplore toutefois des "poches de résistance". Selon la direction du CHU de Point-à-Pitre, citée par l'AFP, 566 suspensions au total ont été prononcées, tandis que le taux de conformité avec l'obligation vaccinale au sein de l'établissement s'élève à 87%.
Cette réticence vis-à-vis de la vaccination dans l'archipel s'explique par plusieurs facteurs, et notamment le rôle des réseaux sociaux où circulent "beaucoup de 'fake news'", a expliqué mardi sur franceinfo l'ancien président départemental, Guy Losbar. Le souvenir du scandale sanitaire du chlordécone pèse également, détaille Outre-mer La 1ère. En août, le ministre des Outre-mer avait par ailleurs fait un lien entre les réticences à la vaccination et l'attachement de la population à la médecine traditionnelle.
3Le mouvement s'est-il propagé à d'autres secteurs ?
Oui. Les enseignants, les professionnels de l'hôtellerie et de la restauration participent également à cette fronde. Ainsi, le rectorat a été occupé mardi par les syndicats enseignants, "en soutien aux collègues soignants de l'Education nationale", qui devront également recevoir leur vaccin pour continuer à exercer.
Les professionnels des stations-service se sont aussi mobilisés lundi pour soutenir le mouvement de grève. Ils défendent en outre quelques points plus spécifiques de leur secteur d'activité, notamment la révision de leur convention collective et l'ouverture de négociations annuelles.
"Cette grève n'est pas seulement due à l'obligation vaccinale."
Ary Chalus, président du conseil régional de Guadeloupesur franceinfo
Le président de la région Guadeloupe, Ary Chalus, estime que les Guadeloupéens ont plus généralement le sentiment d'avoir été "laissés pour compte" par l'Etat. L'élu assure qu'"avec la situation sanitaire, la Guadeloupe a beaucoup perdu, notamment en matière de taxe spéciale de consommation sur le carburant et le transport", chiffrant cette baisse de revenus à "30 millions d'euros".
Des tensions ont par ailleurs éclaté depuis le lancement du mouvement. Des échauffourées ont opposé lundi des pompiers grévistes et des gendarmes. D'autres incidents entre grévistes et forces de l'ordre ont donné lieu à deux placements en garde à vue pour "des faits de menaces réitérées sur agent de la force publique", a rapporté le parquet de Pointe-à-Pitre.
4Comment le gouvernement réagit-il ?
"Il faut être très ferme", a martelé mardi le porte-parole du gouvernement. "On n'acceptera pas qu'on empêche des personnes d'aller se faire soigner à l'hôpital, on n'acceptera pas qu'il y ait de la pression qui soit mise sur des personnes qui ont fait le choix ou qui vont faire le choix de se faire vacciner", a lancé Gabriel Attal sur France Inter. "L'obligation vaccinale doit s'appliquer en Guadeloupe", avait de son côté insisté le ministre de la Santé, Olivier Véran, le 19 octobre à l'Assemblée nationale.
Echauffourées en Guadeloupe en marge d'une grève contre l'obligation vaccinale et le pass sanitaire : "La petite minorité qui essaie d'instrumentaliser la situation augmente la pression mais face à ça, il faut être très fermes", juge @GabrielAttal #le79inter pic.twitter.com/wa9B8R3NVP
— France Inter (@franceinter) November 16, 2021
Face à cette position, l'ancien président du conseil départemental, Guy Losbar, plaide davantage pour une concertation afin de "tenir compte des réalités locales tout en maintenant cette nécessité de vaccination". Le président de la région Guadeloupe, Ary Chalus, appelle quant à lui "à l'apaisement" et "à la discussion".
En Martinique, qui a également connu ces dernières semaines un mouvement d'opposition à la vaccination, le gouvernement a fait le choix d'envoyer une mission de médiation. Celle-ci a débouché dimanche sur le report de l'obligation vaccinale pour les soignants au 31 décembre.
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