Covid-19 : ce que l'on sait sur Israël, cité en exemple pour la vaccination
Chercheurs et gouvernements du monde entier ont les yeux tournés vers Israël, champion du monde de la vaccination. Premiers effets des vaccins, situation sanitaire... Quelle est précisément la situation actuelle dans le pays ?
Depuis quelques semaines, des dirigeants et épidémiologistes du monde entier suivent de près les données vaccinales et épidémiologiques en Israël. Le pays a en effet non seulement commencé sa vaccination très tôt – dès le 20 décembre – mais il vaccine surtout vite et massivement. Avec quels premiers effets ? Quelle est la situation épidémiologique dans le pays ? Focus sur les dernières données.
Près d'un tiers de la population a reçu une première dose
Depuis le début de la campagne de vaccination en Israël le 20 décembre et d'après les données du ministère israélien de la Santé au 27 janvier, 30% de la population (2,7 millions de personnes) a déjà reçu une première dose de vaccin et 15% (1,3 millions de personnes) a déjà reçu une deuxième dose. Israël est, rapporté à la taille de la population de ce petit pays de 9,3 milions d'habitants, très largement en tête du taux de vaccination contre le Covid-19 dans le monde, devant les Emirats Arabes unis et le Royaume-Uni, ainsi que le montrent les courbes comparatives de Our World in Data.
Après avoir débuté sa campagne de vaccination en ciblant d'abord les professionnels de santé et les personnes âgées et à facteurs de risque, le pays l'a étendue aux plus de 40 ans puis aux adolescents de 16 à 18 ans afin, entre autres, de faciliter le déroulé du baccalauréat.
Le gouvernement israélien a commandé un total de 14 millions de doses auprès des laboratoires Pfizer-BioNTech et Moderna. Et il a décidé de conserver le délai entre les deux doses recommandé par les fabricants (trois semaines pour Pfizer-BioNTech, quatre semaines pour Moderna). La campagne de vaccination se déroule par ailleurs dans le cadre d'une collaboration avec le géant américain Pfizer. En échange d'une livraison rapide, Israël lui fournit des informations sur le niveau d'immunité et sur les effets secondaires potentiels du vaccin. Le pays dispose d'importantes banques de données médicales numérisées. Tous ces éléments expliquent pourquoi le pays est scruté de près par des chercheurs et décideurs du monde entier.
Les premières études montrent une chute du taux d'infection chez les vaccinés
Plusieurs études et communiqués publiés ces derniers jours montrent une baisse des infections après une dose et une baisse plus forte après deux doses du vaccin Pfizer-BioNTech. Ces données sont préliminaires et doivent encore être confirmées.
Le 13 janvier, l’institut de recherche de la Clalit, la principale des quatre caisses d'assurance maladie israélienne, a ainsi rendu publics les éléments d’une étude préliminaire des effets du vaccin Pfizer. L'étude a comparé les données de 200 000 personnes âgées de 60 ans ou plus, ayant reçu une première dose de vaccin, à un groupe de taille équivalente n'ayant pas encore été vacciné. Il en ressortait que, 14 à 17 jours après la première dose de vaccin, on enregistrait une chute de 33% du taux d’infection des personnes vaccinées. Une baisse non observée sur un groupe de taille équivalent non vacciné.
Le Maccabi Healthcare Services, autre caisse de santé israélienne, a de son côté indiqué depuis avoir observé une baisse encore plus importante des infections après une seule dose : une baisse de 60% environ, 13 à 21 jours après la première injection, chez les 430 000 premières personnes à l'avoir reçue. La même organisation a, le 25 janvier, indiqué que seuls 20 patients sur 128 600 (0,015% des patients) ayant reçu les deux doses du vaccin Pfizer étaient infectés par le virus au moins une semaine après avoir reçu la deuxième et dernière dose. "Si cela continue ainsi, il se pourrait que l'efficacité du vaccin soit encore supérieure à ce que pensait Pfizer au vu des essais cliniques" a déclaré l'analyste à l'origine de l'étude au journal The Times of Israël. Des données similaires ont été rapportées par le Comité de conseil national israélien sur le Covid-19.
"On suit toutes les personnes qui sont positives au coronavirus: ont-elles été vaccinées ou non ? On a remarqué que des personnes vaccinées ont été malades, mais c’était après la première injection. Car après trois semaines et la deuxième injection, seulement 2,6% des personnes vaccinées sont tombées malades."
Pr Nadav Davidovitch, directeur de l'école de santé publique de l'université Ben-Gourion, membre du comité de conseil national israélien sur le Covid-19franceinfo
"Cela montre que le vaccin marche très bien chez les personnes âgées, qui ont été les premières vaccinées et tend à démontrer une protection très élevée du vaccin", indique de son côté à franceinfo Hervé Bercovier, professeur de microbiologie à l'Université hébraïque de Jérusalem.
La situation sanitaire reste malgré tout très préoccupante
La campagne de vaccination intervient dans un contexte de rebond épidémique et de troisième vague qui ont conduit, le 27 décembre, à confiner pour la troisième fois la population. Ce troisième confinement est un paramètre à prendre en compte pour analyser les données. Depuis le 26 janvier, l’aéroport Ben-Gourion est fermé pour au moins six jours. Les vols de passagers en provenance et à destination de l'étranger sont suspendus "afin d'empêcher l'entrée de variants du virus et aussi pour s'assurer que nous avançons rapidement dans notre campagne de vaccination", a précisé le Premier ministre Benyamin Netanyahou.
En parallèle à cette campagne de vaccination et malgré le confinement, le nombre de cas et d'hospitalisations ont depuis décembre augmenté, ce qui a pu alimenter les doutes sur l'efficacité du vaccin. Ainsi, le nombre de nouveaux cas positifs de Covid-19 détectés a nettement augmenté entre la mi-novembre et le 17 janvier, ainsi que le montrent les données de Our World in Data.
La courbe des décès confirmés est similaire, en hausse entre le 9 décembre et aujourd'hui (avec un décalage classique de quelques semaines entre la hausse des cas détectés et la hausse des décès). Le nombre de patients gravement touchés est, d'après les données du ministère israélien de la Santé, sur un plateau haut depuis le 17 janvier, après une hausse continue.
Il est encore trop tôt pour mesurer l'impact, en particulier sur les variants
Pour autant, on ne peut conclure de ces données que la vaccination serait peu efficace. En effet, à ce stade, un Israëlien sur dix seulement a reçu les deux doses de vaccin. Or, d'apres les préconisations des laboratoires Pfizer et BioNTech, le vaccin doit être injecté à deux reprises, à trois semaines d'intervalle, pour permettre une efficacité à 95% du vaccin. "La population, confirme en Israël le Pr Bercovier, n'est pas encore protégée. Tant qu'on n'aura pas 80 à 90% de personnes ayant reçu les deux doses du vaccin, en particulier les plus de 65 ans, on n'aura pas d'effet important." Le professeur de microbiologie s'attend à un impact réel à partir de début février.
La campagne de vaccination intervient en outre dans un contexte où Israël est confronté à une circulation des variants britannique et sud-africain du virus, ainsi qu'à l'apparition du variant californien, sans garantie à ce jour que le vaccin ait dans ce contexte le même taux d'efficacité. "On estime que 30 à 50% des cas actuels en circulation chez nous sont désormais dûs au variant britannique" précise le Pr Bercovier.
Le ministre israélien de la Santé, Yuli Edelstein, a admis le 26 janvier devant des parlementaires de la Knesset que les nouvelles infections et les admissions à l'hôpital pour des complications graves ou critiques du Covid-19 atteignaient désormais un nombre record. Mais il a assuré qu'aucune forme grave n'avait été constatée parmi les Israéliens éligibles au certificat de vaccination – un document délivré par l'État une semaine après l'administration de la deuxième dose.
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