Variant Delta du Covid-19 : l'épidémiologiste Philippe Amouyel prône une "vaccination en masse" avant les vacances
Selon ce professeur de santé publique au CHU de Lille, la quatrième vague épidémique aura forcément lieu.
Le Premier ministre Jean Castex et Olivier Véran, ministre de la Santé, se rendent jeudi 24 juin dans les Landes où le variant indien représente 70% des cas positifs détectés. "C'est maintenant qu'il faut réagir pour éviter qu'il ne s'étende", alerte Philippe Amouyel, professeur de santé publique au CHU de Lille et directeur de la Fondation alzheimer. L'épidémiologiste juge "essentiel" de relancer la campagne de vaccination.
franceinfo : Pourquoi ce virus se concentre sur les Landes ?
Philippe Amouyel : Il n'y a pas de réponse pour ce département, mais souvent, l'épidémie démarre de manière focale, c'est-à-dire à un endroit particulier. On l'a vu lors de la première et de la deuxième vague, y compris dans cette troisième vague que nous avons subie. Et puis elle s'étend progressivement à l'ensemble du territoire.
Dans ce département des Landes, un Ehpad en particulier a été touché. Sur les 23 résidents qui ont contracté le virus, 21 étaient entièrement vaccinés c'est-à-dire avec deux doses. Faut-il s'en inquiéter ?
Lorsque vous êtes vacciné, vous êtes protégé contre le virus, mais vous n'êtes pas nécessairement protégé contre l'infection par le virus. C'est-à-dire que si le virus vous infecte, vous allez lutter. À un moment, vous êtes porteur et potentiellement, mais à un risque très faible, transmissible, ce qui explique l'immunité collective. En revanche, on est dans une zone où le virus circule dans un endroit de personnes qui sont concentrées dans un milieu plutôt fermé qui est l'Ehpad. À ce moment-là, le virus peut s'étendre. Maintenant, il faut voir l'implication que cela va avoir sur cette population qui, normalement, doit faire des formes moins graves que s'il n'avait pas été vacciné.
Est-ce qu'il y aura forcément une quatrième vague ?
Bien sûr.
"Le variant Delta va prendre le pas sur le variant britannique appelé maintenant variant alpha, parce qu'il est 60 % plus contagieux que celui-là même qui était 60 % plus contagieux que les variants qu'on a connus tout au début de l'épidémie."
Philippe Amouyel, épidémiologisteà franceinfo
Maintenant, il faut savoir dans quelle dimension et dans quelle ampleur. Aujourd'hui, on est à un taux d'incidence qui n'a jamais été aussi faible en France, qui est à 24. Donc, on est en dessous des seuils d'alerte de 50. C'est une excellente chose et donc c'est maintenant qu'il faut réagir pour éviter qu'il ne s'étende.
Il provoque moins de formes graves ?
Pour le moment oui. Ce qu'on voit actuellement au Royaume-Uni, c'est qu'en effet, il n'y a pas de saturation des systèmes de réanimation. L'augmentation est importante, mais n'a rien à voir avec ce qu'on a connu au mois de février, par exemple. Donc, on est au bon moment pour anticiper cette progression et mettre en œuvre toutes les mesures qui vont nous permettre d'éviter justement cette quatrième vague.
Qu'est-ce qu'il faut faire, une vaccination en masse ?
La vaccination en masse, c'est quand même le mantra de l'été. Il va falloir absolument qu'on se vaccine et qu'on se vaccine à deux doses, parce que ce variant indien résiste quand même à une dose donc il faut accélérer sa deuxième dose avant de partir en vacances.
La vaccination reste donc une protection essentielle, mais les rendez-vous pour les premières doses baissent en France. Mauvaise nouvelle ?
Ce n'est pas une bonne nouvelle. On s'y attendait un peu parce qu'on avait vraiment l'impression qu'il y a plus de Covid-19. On a une grande bouffée de liberté. Ce qu'il faut, c'est maintenant s'y remettre. En plus, avec l'arrivée de ce variant Delta, il faut vraiment, et c'est ce que fait le gouvernement, focaliser toute l'attention là-dessus pour relancer cette campagne de vaccination. C'est essentiel.
Est-ce que cela remet en cause la levée des restrictions sanitaires ?
Celles que l'on a levées actuellement, non, c'est-à-dire la fin du couvre-feu ou l'ouverture des restaurants. En revanche, il faut continuer à surveiller celles qui sont prévues pour la fin du mois, peut-être les repousser un peu comme l'ont fait les Anglais. Et puis surtout, le meilleur geste barrière reste le masque dans les milieux fermés, dans la sphère privée, avec des gens qui ne sont pas vaccinés. Il est important de continuer à bien respecter ces mesures barrières.
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