Plan sur les troubles du neuro-développement : "Des effets d’annonce" mais "on ne voit rien sur le terrain", déplore l’association SOS Autisme France
L'executif a présenté la nouvelle stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement (TND) comme l'autisme, l'hyperactivité ou encore les troubles DYS (dyslexie, etc), avec une enveloppe de 680 millions d'euros pour une meilleure prise en charge et un dépistage systématique de tous les enfants avant l'âge de six ans. "C'est une mascarade", estime Olivia Cattan, la présidente de l’association SOS Autisme France car comme à chaque plan, "tout cet argent investi dans cette cause, c'est merveilleux" mais "les parents et les associations ne voient" jamais d'amélioration concrète.
franceinfo : Ces moyens supplémentaires sont-ils une bonne nouvelle ?
Olivia Cattan : J'aimerais bien dire que c'est une bonne nouvelle. Simplement, à chaque fois qu'on fait des effets d'annonce comme ça, on ne voit rien sur le terrain. Pourquoi un nouveau plan autisme à chaque fois sans avoir fait le bilan du précédent ? Toutes les annonces qui ont été faites sont bien mais rien ne se voit sur le terrain, les parents sont obligés de garder leur enfant chez eux.
"Il n'y a pas beaucoup de scolarisation en plus parce que, en fait, quand on dit qu'un enfant autiste est scolarisé, il n'est en réalité scolarisé que deux heures par jour bien souvent, parfois trois fois par semaine, pas tous les jours. Il y en a très peu qui passent en primaire dans les écoles ordinaires."
Olivia Cattan, présidente de l’association SOS Autisme Franceà franceinfo
On n'est pas dans une situation d'inclusion pour l'instant en France. Moi-même, j'ai dû partir à l'étranger parce que je ne trouvais pas de lycée pour mon fils qui avait pourtant 16 de moyenne. Il travaillait très bien, il est Asperger mais il a fallu que je parte à l'étranger parce qu'aucun lycée ne pouvait le prendre. Donc j'aimerais que la Cour des comptes regarde où cet argent va parce qu'on nous annonce tout le temps des sommes astronomiques. Aujourd'hui, on reste sans voix parce qu'on se dit que tout cet argent investi dans cette cause, c'est merveilleux, sauf que les parents et les associations ne voient pas le résultat sur le terrain.
Quels sont les manques sur le terrain ?
Déjà l'accompagnement. Une auxiliaire de vie scolaire va d'un handicap à l'autre, court toute la journée pour s'occuper d'enfants différents. Il n'y a toujours pas d'assistants de vie scolaire (AVS) formés et mieux payés. Et puis si on en est à moins de 1% de personnes autistes aujourd'hui qui sont embauchées, c'est qu'il y a quand même un grand problème. Où sont les filières d'apprentissage qu'on nous a promises depuis le premier quinquennat d'Emmanuel Macron ?
On avait tous beaucoup d'espoir. On nous parlait d'inclusion, nous parlait d'emplois, de filières d'apprentissage... Donc on avait beaucoup d'espoir et on est extrêmement déçu. Je pense que l'argent a été beaucoup mis dans la recherche. Il faut évidemment chercher. Mais là, en tout cas sur le terrain, il faut surtout aider les parents. Il faut surtout donner un avenir à ces enfants. On a eu des vies d'enfants autistes totalement sacrifiées, avec la vie de leurs parents. Parce qu'être parents d'enfants autistes, c'est extrêmement difficile.
Quel est le quotidien des ces familles ?
Ça dépend si l'enfant est scolarisé, si les parents ont réussi à trouver un centre spécialisé pour ceux qui ne peuvent pas aller à l'école, c'est trouver une AVS dans le privé quand il n'y en a pas dans le public. C'est des tocs, des stéréotypies à supporter toute la journée, parfois des violences commises sur les parents, donc des coups de pieds, des coups de poing et des côtes cassées. Et puis, trouver un médecin, c'est très difficile parce qu'il y a très peu de médecins qui sont formés sur l'autisme. Donc ce sont des mois d'attente. Et pour les centres spécialisés, ce sont des années d'attente. C'est bien pour ça que les des gens partent en Belgique ou ailleurs à l'étranger. Ça ne s'est pas arrangé. Rien n'a été arrangé. Donc c'est une mascarade.
Si ça ne suit pas derrière le dépistage, même s'il devient systématisé avant six ans comme annoncé, à quoi bon ?
Si on arrive à dépister les enfants plus tôt, c'est important puisque, plus la prise en charge est mise en place tôt, plus l'enfant va faire des progrès. Le problème, c'est qu'après, il faut trouver les bonnes personnes : les psychologues comportementales qui coûtent cher, qui ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale, les orthophonistes qui sont formés autisme, les psychomotriciennes qui ne sont pas non plus remboursées par la Sécurité sociale.
"C'est bien, on va dépister votre enfant mais on ne va pas trouver de professionnels de santé pour le prendre en charge. Donc ça va être encore aux parents de tout faire."
Olivia Cattan, présidente de l’association SOS Autisme Franceà francienfo
Il y a en fait une injustice : il y a un autisme pour les riches et un autisme pour les pauvres. Ceux qui ont les moyens ont leurs enfants qui s'en sortent mieux et ceux qui n'ont pas les moyens, c'est très difficile pour eux.
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