Alerte aux dérives sectaires dans le domaine de la santé
Respirianisme, reiki, kinésiologie, psychothérapies non reconnues… En 2017, les modes et les méthodes de soin assimilées à des dérives sectaires ont bondi. Dans son rapport 2016-2017 remis jeudi 22 mars au ministère de l’Intérieur la Miviludes (la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) indique en effet que 40% des signalements enregistrés l’année dernière proviennent de particuliers inquiétés par certaines activités paramédicales.
Une mise en garde contre les praticiens non reconnus
La Miviludes évoque d’abord un développement des "offres des pseudos psychothérapeutes", avec 97 signalements en 2016. Selon le rapport, après les attentats du 13 novembre 2015, les charlatans se sont multipliés. "Est apparue sur Internet une liste de plus de 250 « thérapeutes contre la terreur » proposant des « séances gratuites pour les victimes des attentats ». Or dans cette liste, on trouve très peu de psychologues ou psychothérapeutes inscrits au répertoire ADELI, inscription qui garantit que le praticien a les diplômes et une formation reconnus, et permet d’éviter les pseudos-thérapeutes", note le document. Certains de ces thérapeutes autoproclamés profitent en outre des difficultés psychologiques de leur "patient" pour lui extorquer des détails personnels ou le couper de son entourage, explique la Miviludes.
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Le reiki et la kinésiologie, des dérives thérapeutiques
Le document se concentre par ailleurs sur le reiki et la kinésiologie, qui "connaissent un développement sans précédent en France". Ces pratiques, dérivées de croyances japonaises et chinoises, permettraient au malade de guérir de nombreuses maladies de lui-même. La Miviludes insiste sur leur non-scientificité et sur leur dangerosité : "Les victimes sont souvent confrontées à des fragilités psychologiques [et] se mettent en quête de bien-être ou de guérison", explique le rapport. Le rapport s’appesantit particulièrement sur les dangers de la kinésiologie, qui "a fait l’objet d’un avis sévère du Conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes". Il rappelle en outre que l’Inserm a conclu que "ni la kinésiologie appliquée professionnelle, ni la kinésiologie énergétique n’ont fait à ce jour la preuve de leur efficacité".
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Afin de lutter plus efficacement contre la prolifération de ces pratiques, la Miviludes affirme travailler conjointement avec les Agences régionales de Santé et l’ensemble des professionnels de santé. "L’attention est portée sur les contournements ou les failles de la réglementation qui peuvent mettre en danger les patients", précise-t-elle. Car "le risque […] tient parfois moins à la méthode elle-même qu’à la personnalité de celui qui se présente comme thérapeute", estime le rapport. Le document préconise donc d’interdire la réalisation de certains soins quand le praticien n’a pas les compétences requises.
Entretien avec Serge Blisko, médecin généraliste et président de la Miviludes, diffusé le 22 janvier 2016.
La kinésiologie est-elle une médecine de charlatan ?
Le "bien-être", une notion floue
Enfin, la Miviludes met en garde contre certaines pratiques alimentaires assimilées à tort à un mode de vie plus sain. Le rapport évoque dans un premier temps le crudivorisme (l’unique consommation d’aliments crus) et le respirianisme (la croyance selon laquelle un être humain peut survivre en ne se nourrissant que d’air et de lumière), qui ont actuellement le vent en poupe. "Ces nouvelles pratiques représentent un marché très lucratif pour ceux qui savent l’exploiter : stages payants, ventes de produits, substituts ou compléments alimentaires, vente d’ouvrages, ou de divers appareils", note le rapport. La Miviludes évoque par ailleurs les "stages « jeûnes et randonnées »", souvent proposés lors de salons estampillés "bio" ou "zen", qui peuvent selon elle "s’avérer dangereux pour des personnes porteuses de pathologies ou de fragilités et faute d’un encadrement médical".
Selon le rapport, ces salons, où certains charlatans font la promotion de leur activité, se multiplient. "Le public […] est séduit par l’argument de la solution alternative et « naturelle » loin du système de soin institutionnel et de l’industrie, sans être conscient ou voulant ignorer qu’il existe aussi dans les propositions dites alternatives une logique commerciale", explique la Miviludes. Celle-ci évoque par ailleurs "la multiplication des […] ouvertures de cabinets, instituts ou centres de médecine alternative", et estime que la documentation relative au secteur du "bien-être" est encore trop rare. "Au-delà du risque sectaire, il y a bien un enjeu de santé publique", conclut la Miviludes.
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