: Reportage "Je sens une légère vibration, mais ça ne fait pas mal" : l'électrostimulation, une nouvelle solution pour atteindre le cerveau sans chirurgie ?
Et si la stimulation électrique permettait demain aux médecins d'atteindre des zones du cerveau très profondes ? Avec un objectif très concret : traiter certaines maladies comme les troubles obsessionnels, les addictions ou même l'apathie, sans avoir recours à la chirurgie, très invasive, au niveau du crâne. En Suisse, une équipe de neuroscientifiques à l'Ecole polytechnique (EPFL) à Genève travaillent sur ce projet, et viennent de publier mercredi 29 mai leurs premiers résultats dans l'une des revues du prestigieux magazine scientifique américain Nature.
Pour cette étude, Pierre Vassiliadis demande à des volontaires de répondre à des tests, avec en jeu, des récompenses fictives. Ici, Camilo, étudiant en sciences, est scruté : "On regarde comment ils prennent des décisions basées sur l'effort et la récompense que l'on propose", décrypte Pierre Vassiliadis, avant de préciser que le "but du jeu" ici est de stimuler le striatum, la partie du cerveau qui implique le circuit de la récompense.
Ce striatum se trouve au centre du crâne, entre les deux oreilles. Or, pour l'atteindre, il fallait jusqu'à présent ouvrir le cerveau, avec la chirurgie. Ici à l'Ecole polytechnique, on teste donc l'électrostimulation afin de l'atteindre. Pour cela, les chercheurs ont placé sur la tête de notre volontaire quatre électrodes qui envoient de tout petits champs électriques : "Je sens une légère vibration du côté gauche, mais ça ne fait pas mal...", rassure Camilo.
"Comme lorsque vous jetez deux pierres dans l'eau"
"Les deux paires d'électrodes vont créer deux champs électriques qui vont permettre de cibler, de stimuler uniquement une zone profonde du cerveau, comme le striatum, et pas du tout le reste du cerveau. En fait, c'est comme lorsque vous jetez deux pierres dans l'eau : elles vont chacune créer une vague. Et à l'endroit où les vagues se rencontrent, cela crée une interférence. Ici, nous stimulons uniquement la zone où se rencontrent ces deux 'vagues', ces deux champs magnétiques", décrypte le professeur Friedhelm Hummel, qui dirige cette recherche.
Les chercheurs n'en sont, pour le moment, qu'à établir la preuve de concept. Mais ils espèrent qu'en stimulant électriquement le striatum, on pourrait soigner à l'avenir des patients ayant des TOC, des troubles de l'apprentissage, des addictions voire des patients apathiques, qui manquent de motivation dans leur vie de tous les jours. "Dans la perspective où le patient viendrait, par exemple, plusieurs fois par jour pendant une, deux ou trois semaines pour un traitement, on peut imaginer qu'en appliquant cette stimulation de façon répétée, on va générer de la plasticité et potentiellement mener à des améliorations qui pourraient persister après la stimulation. C'est ce qu'on espère !", précise Pierre Vassiliadis.
Une deuxième équipe de chercheurs, de l'Imperial College de Londres cette fois, travaille à stimuler électriquement de la même façon l'hippocampe, une autre zone profonde du cerveau, impliquée notamment dans la maladie d'Alzheimer.
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