: Vidéo "Les années sida, à la mort, à la vie" : comment les associations de lutte contre le VIH ont tenté de briser le tabou de la maladie
Au début des années 1980, un vent de liberté souffle sur la jeunesse française, galvanisée par l'arrivée au pouvoir de la gauche. Mais l'émergence, à l'époque aux Etats-Unis, d'une mystérieuse maladie infectieuse, va bouleverser la planète et toucher en premier lieu la communauté homosexuelle. Le syndrome de l'immunodéficience acquise (sida), dernier stade de l'infection par le VIH (virus de l'immunodéficience humaine), est isolé par des chercheurs français de l'Institut Pasteur en 1983. Le documentaire Les années sida, à la mort, à la vie, réalisé par Lise Banon, diffusé dimanche 26 mars à 22h50 sur France 5, raconte les quinze premières années de cette pandémie et l'engagement de militants pour tenter de sensibiliser les populations et les responsables politiques.
Le manque de réactivité des pouvoirs publics
Si les premiers cas de la maladie touchent essentiellement les hommes homosexuels dans l'indifférence générale, rapidement des cas sont aussi détectés chez des hétérosexuels. Des personnes toxicomanes, hémophiles et transfusés sont également touchées de plein fouet. Pour autant, aucune politique de prévention n'est mise en place rapidement. Aucun lieu spécifique n'est dédié à la détection de ce virus alors que l'épidémie galope : à peine 200 malades recensés en 1984, 1 200 deux ans plus tard.
En dehors de laboratoires privés, le seul endroit pour se faire dépister gratuitement consiste à se rendre dans des centres de don du sang. Des lieux qui "n'avaient pas envie de voir des séropositifs donner leur sang", confie dans le documentaire Didier Lestrade, journaliste et co-fondateur d'Act-Up Paris en 1989. "Mais c'était le seul moyen, et pour moi, je considérais déjà que le dépistage devait être là. J'ai utilisé ce biais pendant un an et demi pour savoir ce qui se passait vis-à-vis de moi, de mes partenaires. De pouvoir en parler, de dédramatiser aussi la peur de se faire dépister. Au départ, quand même, c'était quelque chose de très angoissant", raconte encore Didier Lestrade qui a appris sa séropositivité à 28 ans en 1986.
La "maladie de la honte"
Il faudra quatre ans pour qu'enfin l'Etat s'empare du problème. Mais aucun traitement n'est encore découvert, provoquant une peur diffuse au sein de la population, une stigmatisation des personnes séropositives et par extension, des homosexuels.
L'un des principaux défis, est aussi d'apprivoiser la peur de l'opinion publique. "Le VIH touche à deux tabous : la mort et la sexualité", observe dans le documentaire Mary Bassmadjian, qui a aussi découvert sa séropositivité en 1986. Donc, j'avais peur du regard que l'on allait porter sur moi. Parce qu'effectivement, on avait fait des femmes hétérosexuelles contaminées des droguées, des travailleuses du sexe, des 'Marie-couche-toi-là', des pestiférées (...) Pour ces raisons-là, je ne souhaitais pas évoquer ma séropositivité."
Afin de pallier la défaillance des pouvoirs publics, des associations se créent. L'une des plus importantes, Aides, voit le jour en 1984 sous l'impulsion du sociologue Daniel Defert (mort le 7 février 2023). Elles mobilisent médecins et chercheurs pour mener des actions d'information et de prévention. Quarante ans plus tard, la maladie reste taboue, même si un traitement efficace, la trithérapie, a vu le jour à partir de 1995 et si un traitement préventif, la PrEP est désormais disponible.
Depuis le début de l'épidémie, plus de 40 millions de personnes sont mortes du sida dans le monde, dont 40 000 en France, selon Sida info service. Aujourd'hui encore, selon l'Onusida, plus de 38 millions de personnes vivent avec le sida dans le monde – dont 174 000 en France – et 650 000 personnes en meurent chaque année.
Le documentaire Les années sida, à la mort, à la vie réalisée par Lise Banon est diffusé dimanche 26 mars à 22h50 sur France 5.
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