Suspension du diplôme d'homéopathie à la faculté de Lille : "C'est resté une doctrine en marge du mouvement scientifique"
Le professeur Didier Gosset, doyen de la faculté de Médecine de l'université de Lille, a expliqué sur franceinfo pourquoi il a décidé de suspendre cette année son diplôme d'homéopathie, dans "l'attente de la position" de la Haute autorité de santé.
"L'homéopathie n'a pas évolué, c'est resté une doctrine en marge du mouvement scientifique", a déclaré dimanche 2 septembre sur franceinfo le professeur Didier Gosset, doyen de la faculté de Médecine de l'université de Lille qui a décidé de suspendre pour l'année universitaire 2018-2019 son diplôme d'homéopathie, dans "l'attente de la position" de la Haute autorité de santé (HAS) sur cette pratique.
"Il n'y a pas d'étude qui puisse montrer l'efficacité en dehors de son effet placebo", a indiqué Didier Gosset. Pour lui, il s'agit "de rester éthique. Ce qui n'est pas éthique n'est pas scientifique".
franceinfo : Vous avez pris la décision de suspendre pour l'année universitaire 2018-2019 l'enseignement de l'homéopathie. Pourquoi maintenant alors qu'à Bordeaux on n'enseigne plus cette discipline depuis en 2009 ?
Didier Gosset : Effectivement c'est peut-être un peu tardif, vous avez raison. Mais il se trouve qu'il y a un nouveau débat sur l'homéopathie, tout récemment au mois d'août. Par ailleurs, nous sommes interrogés par un certain nombre de médecins et d'étudiants. L'idée est de mettre en adéquation nos valeurs et notre conduite. Nos valeurs, c'est la rigueur scientifique. On ne peut pas enseigner ce qui n'est pas conforme à une médecine qui ne serait pas fondée sur les preuves. Il y a 30, 40 ans dans les années 1980 toutes les facultés de médecine de France se sont mises à faire des diplômes d'homéopathie avec l'idée d'encadrer cette pratique et que ce serait mieux encadré au sein de la faculté plutôt que dans des officines extérieures non contrôlées. Le temps a passé, les connaissances médicales ont évolué. L'homéopathie n'a pas évolué, c'est resté une doctrine en marge du mouvement scientifique. Il n'y a pas d'étude qui puisse montrer l'efficacité en dehors de son effet placebo. Les études sont rares, pas très solides, faites sur des petites populations. Elle est souvent présentée abusivement comme efficace. L'idée c'est de rester éthique. Ce qui n'est pas éthique n'est pas scientifique.
La faculté de Lille attend la position de la Haute autorité de santé sur le remboursement des traitements homéopathiques. Qu'est-ce que cette décision pourrait changer ?
La Haute autorité de santé a été interrogée sur les questions de remboursement. C'est une question politique qui sera jugée par les politiques mais qui va se fonder sur un certain nombre d'avis autorisés, notamment de sociétés savantes. La conférence des doyens des facultés de médecine qui est saisie et va également mettre en place un observatoire plus général d'un certain nombre de pratiques comme par exemple l'aromathérapie. À la lueur de cette réflexion collective, on verra ce qu'il y a lieu de faire. On connaîtra la position officielle qui sera prise.
L'enseignement de l'homéopathie était-il porteur au sein de votre faculté ?
Le fait d'arrêter cet enseignement ne vas pas révolutionner la santé publique en France. Il y a quelques médecins qui s'inscrivaient annuellement souvent pour modifier leurs pratiques au fil du temps. Cela reste tout à fait marginal. Ce qui est important dans l'homéopathie, ce n'est pas tellement le granule, mais l'effet placebo. Cet effet placebo dépend du patient, du médecin et de leur relation. Ce qui est important et il faut le valoriser, c'est le temps passé auprès du patient à discuter. C'est l'écoute, c'est la qualité de la relation malade/médecin. La position de la faculté de Lille est une position académique qui met en conformité notre mode de pensée avec nos pratiques pédagogiques.
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