Toucher à l'aide médicale d'État "est une faute", critique l'ancien ministre de la Santé François Braun
Toucher à l'aide médicale d'État "est une faute", a critiqué l'ancien ministre de la Santé François Braun sur franceinfo vendredi 29 novembre. La veille, le Premier ministre Michel Barnier a déclaré qu'il souhaitait "sensiblement" baisser les soins pris en charge par l'aide médicale d'État (AME), à laquelle ont droit les personnes sans papiers, accédant à l'une des exigences de l'extrême droite et d'une partie de la droite, en matière d'immigration.
Sur ce sujet qui revient fréquemment sur la table, "il faut être très clair", a prévenu François Braun, "c'est une espèce de totem qui est brandi d'un point de vue politique, mais je le redis, c'est une faute", a jugé l'ancien ministre de la Santé, entre juillet 2022 et juillet 2023 dans le gouvernement Élisabeth Borne.
Un risque de mortalité accrue des personnes sans papiers
Le fait de baisser le nombre de bénéficiaires de l'AME, "ça augmenterait la prise en charge de patients plus graves", prévient François Braun, "donc ça aboutirait à une saturation plus importante de nos services d'urgences". L'ancien ministre présage aussi une augmentation de la mortalité des personnes sans papiers. Il prend l'exemple de l'Espagne qui "en 2012 a supprimé l'équivalent de l'AME". "Ils l'ont vite réintégrée puisqu'il y avait une augmentation de 15% de la mortalité parmi les migrants. Donc, on voit bien que c'est un système qu'il faut surveiller bien entendu pour éviter les dérives, mais qu'il est bien plus humain, mais également plus économique si on veut avoir une vision extrêmement froide de la chose, de maintenir cette aide médicale d'État plutôt que de la restreindre."
François Braun rappelle que des tentatives de réduction du budget de l'AME ont été tentées ces dernières années en France, comme "en 2011, avec le droit de timbre qui voulait faire payer 30 euros par an et par adulte", évoque-t-il. "On s'est rendu compte que certes, ça diminuait de façon apparente le coût, mais ça augmentait de 18% les dépenses puisque les gens n'allaient pas se faire soigner tout de suite et ensuite allaient à l'hôpital aux urgences, où vous savez que bien sûr, on accepte tout le monde, et ça, il faut que ça continue."
Améliorer l'AME en luttant contre les "dérives"
Bruno Retailleau défend, lui aussi, une réforme de l'AME, estimant que les demandes de cette aide médicale explosaient : "On est passé de 320 000 clandestins" bénéficiaires de l'AME en 2020 "à 420 000 l'an dernier", a affirmé le ministre de l'Intérieur sur franceinfo mardi. Un chiffre en trompe-l'œil, rétorque François Braun. "Le coût moyen (de l'AME) par patient reste tout à fait stable depuis dix ans", souligne l'ancien ministre de la Santé. "Si les demandes explosent, c'est parce qu'il y a plus de personnes qui sont en situation irrégulière en France." Il appelle donc l'occupant de la place Beauvau à s'occuper de ses dossiers : "C'est une politique de réduction migratoire, mais absolument pas une politique de réduction des soins."
François Braun, aujourd'hui conseiller de la direction de l'hôpital de Metz-Thionville, estime cependant que si l'AME devait être améliorée, ce serait au niveau de la lutte contre les "dérives". "Il ne faut pas être naïf, dit-il, oui, il y a sûrement des fraudes, mais là aussi, on peut accentuer le contrôle.' Il rappelle que dans un rapport datant de décembre 2023, "le sujet était venu sur la table pour exclure les personnes concernées par une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) par exemple".
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