Nicolas Sarkozy sous bracelet électronique : que va-t-il se passer pour l'ex-chef de l'Etat après sa condamnation définitive dans l'affaire des écoutes ?
C'est la première fois qu'un ex-chef de l'Etat français est condamné à de la prison ferme. La Cour de cassation a rejeté, mercredi 18 décembre, le pourvoi de Nicolas Sarkozy dans l'affaire des écoutes. Il est ainsi définitivement condamné, tout comme son ancien avocat Thierry Herzog et le haut magistrat Gilbert Azibert, pour corruption et trafic d'influence à trois ans d'emprisonnement, dont un an ferme sous bracelet électronique. "Je veux redire ma parfaite innocence et demeure convaincu de mon bon droit. Ma détermination est totale sur ce dossier comme sur les autres. La vérité finira par triompher. A ce moment-là, chacun aura à rendre compte devant les Français", a écrit Nicolas Sarkozy sur X peu après l'annonce de la décision de la haute juridiction.
Son avocat, Patrice Spinosi, a lui annoncé qu'il va saisir la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), contestant notamment toujours la légalité des écoutes au cœur du dossier. "Mes droits de justiciable ont été bafoués tant au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que de celle du Conseil constitutionnel. Le recours que je forme devant la CEDH pourra conduire hélas à faire condamner la France", a justifié Nicolas Sarkozy. En attendant, voici les étapes judiciaires qui attendent l'ancien chef de l'Etat.
Une convocation devant le juge de l'application des peines
Dans sa décision du 17 mai 2023, devenue définitive mercredi, la cour d'appel de Paris a condamné Nicolas Sarkozy à trois ans d'emprisonnement, dont un an de prison ferme et deux ans de prison avec sursis. Il écope également de trois ans d'inéligibilité (interdiction de voter, d'être élu et d'exercer une fonction juridictionnelle).
Le sursis ne s'applique pas, sauf si le condamné commet une nouvelle infraction dans un délai de cinq ans. Concernant la partie ferme, la cour d'appel a décidé de l'aménager directement sous le régime de la "détention à domicile sous surveillance électronique" (DDSE), le terme technique du bracelet. Il reste néanmoins à en déterminer les modalités.
Le parquet général de la cour d'appel va donc saisir pour cela un juge de l'application des peines (JAP) à Paris. Ce JAP va ensuite convoquer Nicolas Sarkozy pour qu'il comparaisse devant lui, en principe sous 20 jours (mais ces délais peuvent varier).
Des modalités d'application fixées dans les quatre mois ?
Lors de ce rendez-vous, le condamné doit fournir des justificatifs que le JAP va examiner afin de déterminer le lieu de l'assignation (le domicile) et les horaires de sortie, en semaine et le week-end. Par exemple, un condamné peut être autorisé à sortir de chez lui entre 7 heures du matin et 18 heures, afin de pouvoir se rendre à son travail. Peuvent aussi être ajoutées des obligations spécifiques, comme ne pas exercer un métier en lien avec l'infraction ou payer les dommages et intérêts auxquels il a été condamné (il n'y en a pas dans le dossier Bismuth).
Le JAP va ensuite rendre une ordonnance qui fixe ces modalités, une décision dont le condamné ne peut pas faire appel. Le juge va aussi déterminer la date à laquelle le bracelet va être posé. Selon la loi, l'ordonnance doit être rendue dans les quatre mois après la décision de condamnation. Mais, là encore, les délais peuvent varier selon les cas, d'autant que Nicolas Sarkozy doit comparaître en janvier au tribunal de Paris dans l'affaire du financement libyen, ce qui pourrait repousser l'application de sa condamnation.
Le jour prévu de la pose du bracelet, des agents de surveillance, qui dépendent de l'administration pénitentiaire, se rendent au domicile du condamné. Ils règlent le système sur place et posent l'appareil. A compter de ce moment, si le condamné n'est pas chez lui à l'horaire fixée, une alerte se déclenche.
Le bracelet électronique est l'aménagement numéro un en France. Au 1er novembre 2024, 15 591 personnes en portaient un, sur un total de 96 569 personnes écrouées, selon les chiffres du ministère de la Justice.
Une possible demande de libération conditionnelle
S'il veut changer d'emploi, de lieu de résidence ou s'il veut se déplacer à l'étranger, le condamné doit demander une autorisation préalable au JAP. Ensuite, au fil des mois, le juge devra décider s'il octroie des réductions de peine au condamné, en se basant sur les rapports du Service pénitentiaire d'insertion et de probation (Spip) qui le suit au quotidien.
Nicolas Sarkozy sera écroué non détenu. Comme il aura plus de 70 ans à partir du 28 janvier, il pourra faire une demande de libération conditionnelle avant la moitié de sa peine. Elle peut être formulée dès le premier rendez-vous avec le JAP ou plus tard. Cette demande serait examinée, mais pas nécessairement accordée.
Plusieurs autres affaires judiciaires en cours
Cette décision de la Cour de cassation intervient moins de trois semaines avant l'ouverture du procès des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle 2007 de Nicolas Sarkozy. Pour ce procès, son casier judiciaire reste vierge, car il l'était au moment des faits reprochés. Mais la décision de la Cour de cassation n'est pas dans l'intérêt de la défense, car Nicolas Sarkozy va se présenter devant les juges avec une condamnation définitive. Quand bien même il ne serait pas placé sous bracelet électronique avant la fin de sa comparution, prévue pour durer quatre mois (du 6 janvier au 10 avril), cette condamnation est lourde symboliquement.
Courant 2025 toujours, la Cour de cassation devra par ailleurs trancher sur le pourvoi de l'ancien président contre sa condamnation à un an de prison dont six mois ferme dans l'affaire Bygmalion, concernant les dépenses excessives de sa campagne présidentielle de 2012.
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