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Blum, Gambetta, Halimi… Qui sont les grandes figures de la République mises à l'honneur par Emmanuel Macron ?

Le président a rendu hommage vendredi aux 21 personnalités qui ont marqué l'histoire de la République française à l'occasion des 150 ans de la proclamation de la IIIe République.  

Article rédigé par franceinfo
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Emmanuel Macron et son épouse Brigitte Macron devant le Panthéon lors de l'entrée de Simone et d'Antoine Veil, le 1er juillet 2018.  (LUDOVIC MARIN / AFP)

Le 4 septembre 1870, la IIIe République était proclamée après la défaite de Napoléon III à Sedan. Emmanuel Macron a célébré ces 150 ans dans un discours sur le "patriotisme républicain", en mettant à l'honneur 21 personnalités, célèbres ou moins connues, qui ont marqué l'histoire de la République française. Pas la peine de fouiller dans vos lointains cours d'histoire, franceinfo vous rappelle qui sont ces figures emblématiques, classées par ordre de naissance.

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Jean Bodin, juriste et théoricien politique (1529-1596)

"Parce que la République prend forme déjà dans les textes de Bodin à la Renaissance". Voilà en quels termes Emmanuel Macron a présenté Jean Bodin, ce vendredi, lors de son discours au Panthéon. Un hommage appuyé à l'un des premiers philosophes français à avoir pensé, au XVIe siècle, l’Etat et ses principes de "bon gouvernement" avec son oeuvre Les Six Livres de la République.

Il détaille ainsi le concept de souveraineté et influencera plus tard Hobbes et Locke : l’Etat, selon Jean Bodin, est perpétuel, absolu, et indissociable de l’indépendance. Lors des guerres de religion, il se fait l’avocat de la tolérance et s’oppose au roi qui voulait poursuivre le combat contre les huguenots.

Voltaire, philosophe irrévérencieux (1694-1778)

François-Marie Arouet, devenu Voltaire, est un homme de lettres et philosophe ardent défenseur des libertés individuelles. Ainsi le président de la République Emmanuel Macron évoque dans son discours "La Liberté de moquer, de caricaturer, dont Voltaire soutenait qu’elle était la source des autres".

Brillant polémiste et auteur de pamphlets mordants, Voltaire passe tour à tour de l’Académie française à l’exil au fil de la parution de ses textes. La plus célèbre de ses oeuvres reste Candide. Voltaire a été transféré au Panthéon en 1791, treize ans après sa mort.

Nicolas de Condorcet, mathématicien (1743-1794)

Très vite, le marquis de Condorcet se distingue par ses aptitudes pour les mathématiques. A 22 ans, il publie son premier ouvrage sur le calcul intégral et entre à l’Académie royale des sciences à l'âge de 26 ans. A la Révolution, l’homme de sciences se mue en figure politique. Il siège à l’Assemblée législative en 1791 et défend activement la cause des femmes et notamment leur droit de vote.

Il présente un projet de décret sur l’instruction publique, avançant des idées très en avance sur son temps sur l’universalité de l’enseignement. Arrêté après que les Girondins ont perdu le contrôle de la Convention, il se donne la mort en prison le 29 mars 1794.

Jean-Jacques Rousseau, l'inspirateur des droits de l'homme (1712-1778)

Jean-Jacques Rousseau est un écrivain et philosophe francophone (né à Genève, en Suisse) du siècle des Lumières. On considère que ses œuvres principales ont préparé la Révolution française, comme Du contrat social (1762) qui analyse le concept de "volonté générale" et inspire La déclaration des droits de l’homme de 1789.

Il écrit également au sujet du bonheur et de la bonté naturelle des hommes, dans Le Discours sur les Sciences et les Arts (1750), et expose des idées nouvelles sur l’éducation. Critiqué par ses contemporains, notamment par Voltaire, Rousseau finit sa vie en France, dans la maladie et l’isolement. Il est inhumé au Panthéon en 1794.

L’abbé Grégoire, révolutionnaire (1750-1831)

Homme de foi et de politique, Henri Grégoire s’est battu pour l’égalité des droits après la Révolution française. Prêtre catholique, il vote en 1789 la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, alors même que celle-ci ne fait pas explicitement référence à la religion. Député à la Convention nationale, il fait abolir l’esclavage en 1794 et milite pour la diffusion de la langue française contre les langues régionales, rappelle Emmanuel Macron lors de son discours : "L'abbé Grégoire, qui repose ici lui aussi, ne disait-il pas que le français, lui, est l'idiome de la liberté".

Lors du jugement de Louis XVI, il se prononce pour une condamnation, mais réclame l’abolition de la peine de mort. Jamais l’abbé Grégoire n'a souhaité choisir entre la religion et la patrie, ce qui lui a valu de solides inimitiés dans la hiérarchie catholique. Ainsi, plus d'un siècle et demi après sa mort, l’Eglise refuse de s'associer au transfert de ses cendres au Panthéon, en 1989.

Victor Hugo, symbole de la langue française (1802-1885)

Son influence littéraire, idéologique et politique fait de Victor Hugo l’un des plus importants écrivains de langue française. Poète, dramaturge, romancier, il est un des chefs de file du romantisme, connu pour ses pièces de théâtre dont Ruy Blas (1838) et ses romans Notre-Dame de Paris (1831) et Les Misérables (1868).

Fervent républicain, il s’exile en 1851, et pendant dix-neuf ans, à cause de son hostilité à Napoléon III. Après son retour en France en 1870, il est élu député en 1871 puis sénateur. Il oeuvre pour la justice sociale et contre la peine de mort. La IIIe République lui réserve des funérailles grandioses pour le transfert de sa dépouille au Panthéon le 1er juin 1885, dix jours après sa mort.

Alexandre Dumas, écrivain prolifique (1802-1870)

Jusqu’à ses 13 ans, Alexandre Dumas reçoit peu d’éducation, si ce n’est celle de ses lectures religieuses. Il est pourtant engagé comme clerc de notaire pour sa jolie calligraphie… et devient finalement un des écrivains français les plus prolifiques et les plus populaires du XIXe siècle.

Il doit sa célébrité à des romans-feuilletons, comme Les Trois Mousquetaires ou Le Comte de Monte-Cristo, et nourrit ses oeuvres de ses récits de voyage. Candidat malheureux aux élections législatives de 1848, il croule sous les dettes et doit s’exiler quelques années en Belgique, avant de revenir en France, où il continue de publier de nombreux ouvrages jusqu'à sa mort. 

Léon Gambetta, père de la IIIe République (1838-1882)

Avocat à Paris, Léon Gambetta se fait remarquer en 1868 par une virulente plaidoirie contre le régime de Napoléon III, dans le procès du journaliste Charles Delescluze. Un an plus tard, Léon Gambetta est élu député de l'arrondissement parisien de Belleville sur un programme radical : liberté totale de la presse, suffrage universel, école gratuite, laïque et obligatoire…

Lorsque la nouvelle de la défaite des troupes françaises à Sedan face aux Prussiens parvient à Paris, début septembre 1870, Léon Gambetta prend activement part aux des manifestations populaires. Aux côtés de deux autres députés républicains, Jules Favre et Jules Ferry, Léon Gambetta, il contribue à proclamer la IIIe République et instaure un gouvernement provisoire de la Défense nationale, dont il est ministre de l'Intérieur. Léon Gambetta est aujourd'hui considéré comme le fondateur de la IIIe République. Il repose au Panthéon.

Émile Zola, l'écrivain engagé (1840-1902)

L’écrivain Emile Zola est considéré comme le chef de file du mouvement naturaliste : les 20 volumes de son oeuvre Les Rougon-Macquart, publiés entre 1870 et 1893, dépeignent la société française sous le Second Empire. Après avoir fait carrière dans l’édition auprès de la librairie Hachette, il s’illustre comme critique d’art pour différents journaux.

Quand l’affaire Dreyfus divise la France, Emile Zola s’engage pour Alfred Dreyfus et contre l’antisémitisme et publie "J’accuse …!" Cet article historique paraît en janvier 1898 dans L'Aurore. Contraint à l’exil après une condamnation pour diffamation, il meurt à son retour à Paris. Ses cendres sont transférées au Panthéon en 1908.

Jean Jaurès, l'unificateur du socialisme (1859-1914)


Figure du socialisme français, agrégé de philosophie après ses études à l’Ecole normale supérieure, il devient en 1885 le plus jeune député de France et commence à défendre les ouvriers, notamment en proposant un projet de retraites ouvrières et en soutenant la grande grève des mineurs de Carmaux, en 1892. Jean Jaurès a également contribué à unir le mouvement socialiste français en participant à la création de la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière). Il a également fondé le quotidien L'Humanité. Jean Jaurès est assassiné par le nationaliste Raoul Villain le 31 juillet 1914 alors qu’il tente d’empêcher le déclenchement de la Première Guerre mondiale, notamment en se liant aux autres partis de l’Internationale ouvrière. Il est inhumé au Panthéon en 1924.

Marie Curie, double prix Nobel de physique et de chimie (1867-1934)

Née Sklodowska à Varsovie, Maria quitte la Pologne, où les femmes ne sont pas autorisées à l'université pour suivre des études de mathématiques et de physique en France. Avec son futur mari, le physicien Pierre Curie, elle étudie le phénomène radioactif : ils découvrent ensemble le radium et le polonium. Elle est la première femme à recevoir deux prix Nobel de physique (1903) et de chimie (1911) pour ses recherches sur la radioactivité. Nommée à la tête de la chaire de physique générale, Marie Curie se consacre pendant la guerre à la radiographie pour soigner les soldats blessés. Elle décède d'une leucémie en 1934, après une vie au contact du radium. Elle est inhumée au Panthéon depuis 1995.

Charles Péguy, le poète de la misère sociale (1873-1914)

Influencé très tôt par la figure de Jean Jaurès, Charles Péguy devient membre du Parti socialiste en 1895. Encore étudiant à l'Ecole normale supérieure, il milite contre la misère et l'exclusion. Cet écrivain est surtout connu pour ses essais et ses poèmes, dans lesquels il fait part de ses inquiétudes sociales. Il s'associe avec Léon Blum et fonde la maison d'édition socialiste la Société nouvelle de librairie et d'édition. En 1898, Charles Péguy s'engage en faveur du capitaine Dreyfus et combat pour sa réhabilitation. 

Léon Blum, le père des congés payés (1872-1950)

Léon Blum demeure l'une des principales figures du socialisme au XXe siècle. Lors du congrès de Tours, en 1920, il s'oppose aux bolchéviques en rejetant la troisième Internationale et prend la tête de la SFIO (Section française de l'internationale ouvrière), ancêtre du Parti socialiste.

Il s'illustre en 1936 en concluant avec le PCF les accords électoraux qui permettent au Front populaire de remporter les élections. Sa présidence, entre 1936 et 1938, est marquée par de grandes avancées sociales : les premiers congés payés, la semaine de 40 heures et les conventions collectives.

Félix Eboué, le premier résistant de la France d'outre-mer (1884-1944)

Descendant d'esclaves africains affranchis, résistant de la première heure, Félix Eboué s'est illustré en tant qu'administrateur des colonies françaises par une volonté de laisser les populations locales conserver leurs traditions. Fils d'un chercheur d'or de Guyane, il rejoint Bordeaux pour ses études secondaires puis Paris, où il étudie le droit.

Il intègre l'administration des colonies et devient, après un passage au Soudan, le premier Noir gouverneur de Guadeloupe, en 1936. Deux ans plus tard, il devient gouverneur du Tchad. Dès l'appel du 18 juin 1940, il se rallie au Général de Gaulle, qui le nomme la même année gouverneur général de l'Afrique équatoriale française. Décoré de la Croix de l'ordre de la Libération en 1941, ce grand humaniste est inhumé au Panthéon depuis 1949.

François Mauriac, l'écrivain antifasciste (1885-1970)

L'œuvre littéraire de François Mauriac, admis à l'Académie française en 1933 et prix Nobel de littérature en 1952, est profondément teintée des thèmes de la vie provinciale et des souffrances du chrétien face au monde moderne. Ses positions en tant que journaliste sont beaucoup plus engagées. Dans les années 1930, il dénonce le fascisme, notamment en Espagne, et condamne le régime de Vichy. A partir des années 1950, éditorialiste pour Le Figaro et L'Express, il soutient Pierre Mendès France, puis De Gaulle et la politique de décolonisation. 

Marc Bloch, l'historien résistant (1886-1944)

Agrégé d'histoire en 1908, Marc Bloch est mobilisé lors de la Première Guerre mondiale. Il est ensuite nommé professeur d'histoire médiévale à la faculté de Strasbourg. Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, il est mobilisé comme capitaine d'état-major. Un temps exclu de la fonction publique après le décret du 3 octobre 1940 sur le statut des juifs, il peut reprendre son enseignement en 1941 pour services scientifiques exceptionnels rendus à l'Etat français.

Il rejoint rapidement la Résistance à Montpellier, où il a été muté. Il met en place des comités de libération dans la région de Lyon. Le 8 mars 1944, il est arrêté et torturé par la Gestapo. Il est fusillé le 16 juin avec d'autres résistants. Cofondateur de l'école et de la revue des Annales, il a renouvelé en profondeur l'historiographie et figure parmi les plus grands historiens du XXe siècle.

André Malraux, l'homme de lettres devenu ministre (1901-1976)

Intellectuel, écrivain et homme politique français, André Malraux est connu pour son roman La Condition humaine, qui obtient le prix Goncourt en 1933. C’est aussi un militant : dans sa jeunesse, il rejoint en Indochine un journal anticolonialiste, combat en 1936 les fascistes auprès des républicains espagnols, avant de rejoindre la Résistance en 1944.

Après la guerre, il s’engage en politique aux côtés du général de Gaulle et est nommé ministre de la Culture entre 1959 et 1969. Célèbre pour son oraison funèbre lors du transfert de Jean Moulin au Panthéon, André Malraux y est lui-même inhumé en 1996.

Joséphine Baker, du music-hall au contre-espionnage (1906-1975)

Au départ, Joséphine Baker n'était qu'une chanteuse de music-hall parmi d'autres, qui avait quitté son Missouri natal pour tenter sa chance à New York. En 1925, elle est repérée par la créatrice d'un spectacle musical parisien, la Revue nègre, et s'envole pour la France. Joséphine Baker devient alors une icône de la scène artistique parisienne… avant de devenir, pendant la Seconde Guerre mondiale, agent du contre-espionnage, bénévole de la Croix-Rouge et membre de l'armée de l'air au service de la France libre.

Elle mène son dernier combat aux Etats-Unis pour défendre la cause des Afro-Américains aux côtés de Martin Luther King. "Joséphine Baker, née américaine, choisit la France pour la faire briller de son talent et de son énergie, souligne Emmanuel Macron. Elle aimait sa patrie. Au point de risquer sa vie pour elle, en entrant dans la résistance."

Pierre Mendès France, l'adversaire du gaullisme (1907-1982)

Il entre au Parti radical en 1924. Avocat puis député de l'Eure à 25 ans, il devient aussi un économiste reconnu. Durant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint Charles de Gaulle à Londres et le Comité français de libération nationale. En 1944, il est nommé ministre de l'Economie, mais démissionne un an plus tard à la suite du refus du Général d'appliquer sa politique de rigueur. Il travaille ensuite au sein d'institutions internationales et est élu président du FMI en 1948.

Nommé chef du gouvernement en 1954, il met fin à la guerre d'Indochine et accorde l'autonomie à la Tunisie. Mais ses tentatives de réformes en Algérie et sa conception dirigiste de l'économie provoquent la destitution de son gouvernement en 1955. Opposé à la Constitution de 1958 proposée par De Gaulle, il milite ensuite au Parti socialiste unifié et soutient la candidature de François Mitterrand en 1974 et 1981. Ses "causeries au coin du feu", dans lesquelles il expliquait, chaque samedi à la radio, sa politique aux Français, sont restées célèbres.

Aimé Césaire, le poète de la négritude (1913-2008)

Aimé Césaire, né en Martinique, fonde dans l’entre-deux-guerres le mouvement littéraire de la négritude avec Léopold Sédar Senghor, qui rassemble des écrivains francophones noirs. Profondément anticolonialiste, l’écrivain, dramaturge et poète veut lutter contre l'assimilation culturelle et promouvoir la culture africaine. Après l’obtention de son agrégation de lettres, il fonde la revue Tropiques. Député de la Martinique pendant quarante-huit ans, Aimé Césaire reste maire de Fort-de-France de 1945 à... 2001.

Gisèle Halimi, l'icône du féminisme (1927-2020)

Avocate, députée et femme de lettres franco-tunisienne, Gisèle Halimi a consacré sa vie à la lutte pour les droits des femmes. En 1971, elle fonde le mouvement Choisir la cause des femmes aux côtés de Simone de Beauvoir. Le procès de Bobigny, en 1972, marque un tournant dans ses combats : l’avocate obtient l'acquittement de trois femmes accusées d’avortement illégal, trois ans avant la loi Veil sur l’IVG. Elle contribue en 1980 à une loi criminalisant le viol. Gisèle Halimi est morte le 28 juillet 2020. Une pétition réclame le transfert de ses cendres au Panthéon. 

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