30 ans de la mort de Françoise Dolto : on lui reproche "l'exact inverse" de ce qu'elle a dit sur l'éducation des enfants
Françoise Dolto a dit "qu'on devrait poser des limites aux enfants, qu'ils devaient être à la périphérie du couple", rapporte la psychanalyste et pédopsychiatre, Caroline Eliacheff. Or, on lui reproche d'avoir permis l'émergence de "l'enfant-roi", ce qui est totalement l'inverse, explique-t-elle sur franceinfo.
La pédiatre et psychanalyste Françoise Dolto est morte il y a 30 ans jour pour jour, le 25 août 1988. Mais trois décennies après sa disparition, son héritage et ses théories font toujours débat. Celle qui a prôné la première le fait de considérer l'enfant comme "un sujet à part entière" est accusée par ses détracteurs d'avoir inventé "l'enfant-roi".
Mais pour Caroline Eliacheff, psychanalyste et pédopsychiatre, proche de Dolto et auteure de Françoise Dolto : une journée particulière, invitée de franceinfo samedi 25 août, on a reproché à Françoise Dolto "l'exacte inverse de ce qu'[elle] a dit". "Le fait que Françoise Dolto soit sortie de son cabinet, et qu'elle ait popularisé la psychanalyse auprès de tous les parents, est quelque chose qu'on ne lui pardonne pas d'une certaine manière", a-t-elle avancé comme explication.
Le fait que le nom et l'héritage de François Dolto restent, trente ans après sa mort, toujours sujets à débat, voire à empoignades, est-ce une preuve de l'importance qu'elle a pu avoir ?
Caroline Eliacheff : Je ne suis pas sûre qu'il y ait encore des empoignades. Je pense au contraire qu'elle est assez oubliée. Les empoignades c'est fini, on ne se bat plus pour savoir si c'est elle qui a fait ceci ou cela. Et je crois que c'est plutôt le signe qu'un certain nombre de choses qu'elle a laissées ont été tellement intégrées que les gens n'ont plus besoin de se référer à elle.
Comment est-ce que vous résumeriez son approche et en quoi tout cela a pu transformer la vie de certaines familles françaises à partir des années 1970 ?
Avant de pouvoir résumer, encore faudrait-il savoir ce qu'elle a fait. Or aujourd'hui très peu de personnes sont capables de vous dire l'ensemble des choses qu'elle a faites. Elle a véritablement révolutionné, elle et d'autres - car il ne faut non plus être "doltolâtre" et penser qu'à elle seule, elle a fait la révolution - mais elle a révolutionné la vision que les adultes avaient des enfants. Et comme cette vision des adultes sur les enfants a été transformée, les enfants eux-mêmes en ont été transformés.
Que pensez-vous, avec le recul, de toutes les critiques que l'on a pu lui faire, le fait d'avoir favorisé, par exemple, la permissivité et l'émergence de "l'enfant-roi" ?
Il y a deux choses. L'arrivée de "l'enfant-roi" c'est une réalité, on l'a vu et on le voit dans nos cabinets. Mais dire que ce serait à cause de ce que Françoise Dolto a dit, c'est là qu'il y a un contre-sens. Elle a dit exactement l'inverse c'est-à-dire qu'on devrait poser des limites aux enfants, que les enfants ne pouvaient pas tout faire, qu'ils devaient être à la périphérie du couple, ce que l'on ne voit pas beaucoup aujourd'hui. L'exact inverse. Donc, quand on entend cela, on se dit que c'est un symptôme. C'est bizarre de reprocher à quelqu'un l'exact inverse de ce qu'il a dit. Alors qu'est-ce que cela veut dire ? Je n'ai pas vraiment la réponse. Mais je pense quand même que le fait que Françoise Dolto soit sortie de son cabinet, et qu'elle ait popularisé la psychanalyse auprès de tous les parents, est quelque chose qu'on ne lui pardonne pas d'une certaine manière.
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