Éducation : à Marseille, les "écoles laboratoires" voulues par Emmanuel Macron divisent toujours le monde enseignant
Une expérimentation, lancée par le chef de l'état en septembre dernier à Marseille, est censée donner plus de libertés aux établissements volontaires afin de lancer des innovations pédagogiques et d'avoir plus la main sur le recrutement des enseignants. Mais depuis son lancement, le dispositif est loin de faire l’unanimité.
Une salle avec une balance, des jeux de cube, de numération, du matériel pour aider les enfants à appréhender les mathématiques... C'est pour créer ce "laboratoire de maths" que Marie-Laure Mercun, directrice de l'école maternelle Menpenti à Marseille, a répondu à l'appel à projet lancé par Emmanuel Macron en septembre dernier. L'enseignante apprécie la marge de manœuvre supplémentaire apportée par ce nouveau dispositif. "On a toujours des axes à respecter pour faire les projets d'écoles, explique-t-elle, tandis que là, c'était vraiment une liberté pour qu'on puisse choisir quelque chose, le monter de A à Z. Clairement, on n'aurait pas eu les moyens financiers pour avoir tout ce matériel."
Près de 59 écoles ont répondu positivement à l’appel à projet – dont la moitié en éducation prioritaire renforcée – sur les 472 que compte la cité phocéenne. Près de 2,5 millions d’euros ont spécifiquement été débloqués par l’État. L'école Menpenti, qui compte huit classes, a déjà bénéficié de 3 000 euros pour du mobilier, 4 000 euros pour du matériel pédagogique, soit près de 10 000 euros en tout, assure la directrice.
Une opportunité "arrivée à point nommé"
Dans son école de 17 classes en éducation prioritaire dans le centre-ville de Marseille, Alain Bertoli aussi s'est lancé dans l'expérimentation. Son idée ? Utiliser la musique pour aider les enfants atteints de troubles dys, comme la dyslexie. Son programme existe depuis 2018 mais risquait de disparaître, faute de financement. Grâce à l'expérimentation, il vient de toucher une première enveloppe de 20 000 euros. "Cette opportunité est arrivée à point nommé", se félicite le directeur. Mais au début, la participation au programme a provoqué des débats, en salle des maîtres. "C'était la fameuse critique sur le fait que le directeur recruterait les enseignants, et ça, forcément, ça posait question", confie-t-il.
"Je ne vois pas, dans le fonctionnement actuel du projet, ce qui peut poser problème. Je trouve que c'est plutôt positif."
Alain Bertoli, directeur d'école à Marseilleà franceinfo
Au final, il ne fait que participer à une commission, qui donne un avis. Ensuite, l'enseignant postulant doit passer par la procédure classique et nationale de recrutement.
Un projet fortement critiqué
Mais au-delà des volontaires, ce projet d'"écoles laboratoires" de Marseille est fortement critiqué, depuis le départ. "Ce qu'on dénonce nous, ce n'est pas que des écoles aient des moyens supplémentaires, c'est que quelques écoles aient des moyens supplémentaires, regrette Virginie Akliouat, représentante du syndicat Snuipp dans les Bouches-du-Rhône. Pour nous, ce qui se passe à Marseille est vraiment une vitrine de ce que le président candidat souhaite faire sur son second quinquennat."
"Ce qui est certain, c'est que les budgets mis à Marseille ne seront jamais généralisés à l'ensemble de la France puisque sinon l'État ferait très vite faillite."
Virginie Akliouat, représentante du syndicat Snuipp dans les Bouches-du-Rhôneà franceinfo
C'est le risque d'une école à deux vitesses : certaines choyées et d'autres non. "Il faudrait, avant de proposer soi-disant des projets innovants, que peut-être on se préoccupe de fournir les éléments de base, tacle Cécile Baron, membre du collectif des écoles de Marseille et de la fédération de parents FCPE. Le ministère de l'éducation nationale n'est même pas capable de fournir le service public de base pour la plupart des écoles aujourd'hui en France." La représentante de parents d'élèves dénonce une mise en concurrence des écoles.
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