Education : en quoi consiste le "contrat de droits et d'obligations" que Gabriel Attal veut faire signer aux parents d'élèves ?
Un plaidoyer pour la responsabilisation des parents et l'autorité dans l'éducation. Dans un discours à Viry-Châtillon (Essonne), où le jeune Shemseddine avait été battu à mort début avril, Gabriel Attal a déroulé une série de mesures destinées à vaincre "une addiction d'une partie de nos adolescents à la violence", jeudi 18 avril. Comme souvent, l'ancien ministre de l'Education nationale a placé ce domaine au cœur de son discours, appelant à préserver l'école comme un "sanctuaire" : "Lorsqu'on gêne les cours, lorsqu'on défie l'autorité, lorsqu'on dégrade, qu'on menace, voire que l'on agresse, cela ne doit jamais rester sans conséquence", a-t-il lancé.
Le chef du gouvernement a notamment promis la création d'un contrat d'engagement entre les établissements et les parents d'élèves. Invité de BFMTV, jeudi soir, il a esquissé les contours de ce document, qui vise à "rappeler à chaque famille ses droits et ses obligations vis-à-vis de l'institution scolaire et de l'éducation de ses enfants", a expliqué le Premier ministre. Si la question n'est pas tranchée, il "trouverait logique" que l'élève le signe aussi, a-t-il ajouté. Sans préciser, en revanche, quelles classes d'âge seraient concernées.
Les syndicats sceptiques avant une concertation
Si l'élève montre un "défaut manifeste d'assiduité" ou que les parents ne participent pas "à l'éducation de leurs enfants", à l'instar d'absences aux réunions avec les professeurs, Gabriel Attal souhaite que le "contrat de droits et d'obligations" permette des sanctions. Les cas les plus graves pourront conduire à une saisine de la justice. Le Premier ministre a aussi évoqué la possibilité d'apposer d'une mention sur le dossier Parcoursup des élèves très perturbateurs, et de leur retirer des points aux examens tels que le brevet, le CAP ou le bac.
S'il souhaite que le contrat d'engagement entre "en vigueur à la rentrée prochaine, en septembre", les contours de cette mesure restent toutefois à définir. Elle fera l'objet d'une concertation en amont avec "les chefs d'établissement, représentants des enseignants, parents d'élèves", a assuré jeudi le Premier ministre.
Les réactions des syndicats de l'Education nationale sont d'ores et déjà mitigées. "Je trouve que c'est léger", a déclaré le président du Snalc, Jean-Rémi Girard, sur BFMTV, au sujet de l'éventail de mesures détaillées par Gabriel Attal. Il a notamment exprimé son scepticisme au sujet du contrat d'engagement, rappelant que les parents "signent déjà le règlement intérieur, des chartes, tout un tas de choses". "Ça n'a jamais fait baisser les agressions ou les violences", a-t-il insisté. Un constat partagé par le vice-président de la FCPE, principale association de parents d'élèves, Abdelkrim Mesbahi, jeudi soir sur Europe 1 : "Il y a déjà un règlement intérieur que les parents signent chaque année. On ne comprend pas ces annonces faites sans concertation."
Le Premier ministre "recycle beaucoup de choses existantes", juge aussi la secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat des enseignants du secondaire. Jointe par franceinfo, Sophie Vénétitay rappelle que dans certains établissements, en plus du règlement intérieur, il existe des fiches de suivi pour les élèves ayant montré des problèmes de comportement. "A chaque cours, les professeurs cochent, ou non, des objectifs à valider, comme la ponctualité, l'assiduité ou le respect", explique la responsable syndicale. Tout manquement peut ensuite conduire à un rappel à l'ordre, voire à une exclusion temporaire ou définitive.
Une proposition similaire dans un rapport du Sénat
Jeudi soir, Gabriel Attal s'est défendu, sur BFMTV, de proposer, avec l'idée d'un contrat, une redite de dispositifs déjà existants : "Aujourd'hui, dans le meilleur des cas, la famille signe le règlement intérieur de l'établissement, mais qui concerne plus l'élève dans l'établissement que (...) ses obligations à elle vis-à-vis de l'élève, en termes d'assiduité, de retrait des bulletins scolaires, de participation aux réunions parents-profs..."
Ce projet se rapproche par ailleurs d'une mesure proposée par un récent rapport sénatorial, remis en mars à la ministre de l'Education nationale, Nicole Belloubet. Parmi les recommandations des rapporteurs François-Noël Buffet (Les Républicains) et Laurent Lafon (Union centriste) figurait l'idée de faire signer, "dès la première exclusion" d'un élève, "un protocole d’accompagnement et de responsabilisation des parents", qui préciserait "[leurs] engagements pour permettre l'amélioration du comportement de leur enfant ainsi que les mesures d'accompagnement mises en œuvre au sein de l'établissement".
Les sénateurs proposaient aussi la création d'une sanction pénale contre les parents pour "non-respect répété [par leur enfant] des règles de fonctionnement et de la vie collective des établissements", sur le modèle de celle qui existe déjà en cas de non-respect de l'obligation d'assiduité.
Ne pas imposer à son enfant de se rendre en cours après avoir reçu un avertissement des services de l'Education nationale, et ne pas justifier ses absences ou donner "des motifs inexacts" est aujourd'hui passible d'une amende de 750 euros, voir de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende "si ces absences injustifiées compromettent l'éducation de votre enfant", précise le site de l'administration.
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