Violences des mineurs : placement en internat, points retirés aux examens, parents punis... Ce qu'il faut retenir du discours de Gabriel Attal
[RECTIFICATIF. Dans une première version de cet article, nous indiquions que Gabriel Attal avait annoncé une mention "fauteur de trouble" portée dans le dossier ParcourSup d'élèves perturbateurs. Ce terme n'a pas été prononcé par le Premier ministre. Matignon précise qu’une mention figurera bien sur le dossier des élèves concernés, mais celle-ci n’est pas encore définie. Nous présentons nos excuses à nos lecteurs.]
"L'autorité et la règle commune sont trop souvent défiées par certains jeunes." Le Premier ministre, Gabriel Attal, a pris la parole, jeudi 18 avril, depuis le parvis de l'hôtel de ville de Viry-Châtillon (Essonne), ville récemment marquée par la mort de Shemseddine, 15 ans, passé à tabac près de son collège. Quatre jeunes hommes, trois mineurs et un majeur, ont été mis en examen pour "assassinat" le 10 avril.
Emmanuel Macron a demandé mercredi à Gabriel Attal, lors du Conseil des ministres, de lancer une concertation pour trouver des solutions au "surgissement de l'ultraviolence", en particulier parmi les plus jeunes, avec l'objectif d'aboutir à un projet de loi avant l'été.
Le Premier ministre a déroulé jeudi la feuille de route de son gouvernement sur ce "Grenelle" des violences, répartie en trois volets (judiciaire, parents et écrans, prévention). Avec le calendrier suivant : huit semaines de travail collectif, avec un point d'étape dans quatre semaines. "Nous avons besoin d'un sursaut d'autorité", a-t-il ajouté, déplorant "une addiction d'une partie de nos adolescents à la violence". Voici ce qu'il faut retenir de ses annonces.
Un placement en internat pour prévenir la délinquance
Gabriel Attal a d'abord annoncé le possible placement en internat des jeunes aux "mauvaises fréquentations". "Avant qu'un jeune ne tombe dans la délinquance, nous proposerons aux parents" cette solution, pour qu'il soit "loin de son quartier et de ceux qui le poussaient à plonger", a étayé le chef du gouvernement.
Il assure que des "dizaines de milliers de places [sont] désespérément vides" dans des établissements et qu'elles pourront être utilisées pour ces placements. Le Premier ministre a par ailleurs annoncé qu'il se rendrait dans un internat de Nice lundi. Il a aussi rappelé que les collégiens des quartiers prioritaires seraient scolarisés tous les jours de la semaine de 8 heures à 18 heures, dès la rentrée prochaine.
Les parents "démissionnaires" punis financièrement
Pour le Premier ministre, "l'éducation, cela commence à la maison". Il souhaite "responsabiliser les parents démissionnaires", afin qu'ils puissent "répondre des actes de leurs enfants". Il veut en conséquence qu'ils fassent "l'objet de travaux d'intérêt général". S'ils ne se rendent pas aux convocations du juge, Gabriel Attal ouvre la porte à une "amende".
"Ce n'est pas seulement le parent qui vit avec l'enfant qui doit payer", précise-t-il, en référence aux mères seules. "Nous viendrons désormais chercher les deux parents pour payer les réparations. Ce n'est pas parce qu'un des parents a quitté le foyer qu'il doit se laver les mains de l'éducation de son enfant."
Des mesures sur les réseaux sociaux à venir
Au sujet des réseaux sociaux, le chef du gouvernement souhaite aller plus loin que des mesures sur le "bannissement numérique". "Une proposition de loi portée par le député Laurent Marcangeli a été adoptée. Elle fixe la majorité numérique à 15 ans. Il faut désormais la faire appliquer", a-t-il également rappelé.
Gabriel Attal a surtout promis la remise des conclusions d'une commission sur les réseaux sociaux "à la fin du mois". Elle avait été annoncée par Emmanuel Macron en janvier, lors d'une conférence de presse à l'Elysée. "Il y aura peut-être des interdictions, il y aura peut-être des restrictions" et "peut-être aussi des restrictions sur les contenus", avait-il avancé.
La sécurité renforcée dans 350 écoles supplémentaires
"L'école doit rester un sanctuaire où la violence n'a jamais sa place", a martelé le Premier ministre, rappelant que 150 établissements à risques ont d'ores et déjà "vu leur sécurité renforcée". Il a annoncé que "350 écoles supplémentaires" allaient être accompagnées prochainement.
Pour Gabriel Attal, "la bataille de l'autorité se gagne aussi dans les classes". Il a rappelé plusieurs mesures déjà prises, comme la mise en place des cours d'empathie et le doublement des heures d'enseignement moral et civique, et a exhorté la ministre de l'Education, Nicole Belloubet, à faire respecter, dès la rentrée prochaine, des règles de civisme comme "se lever dès qu'un professeur rentre dans la classe".
Des commissions éducatives dès l'école primaire
"Dès la rentrée prochaine, nous instaurons des commissions éducatives dès l'école primaire, avec des sanctions adaptées" à ce niveau, a promis Gabriel Attal. Il souhaite aussi que "les parents signent avec les établissements scolaires un contrat de droits et obligations", qui pourra ouvrir à des sanctions s'il n'est pas respecté. "Nous mettrons les quatre prochaines semaines à profit pour définir les contours de ce contrat et les sanctions auxquelles s’exposeraient les parents", a ajouté le Premier ministre.
Des points retirés aux examens pour les élèves perturbateurs
Le Premier ministre veut également que les élèves perturbateurs voient leur cursus affecté par leurs actions. "Je suis favorable à ce que les jeunes qui perturbent le plus gravement les cours se voient sanctionnés sur leur brevet, leur CAP ou leur bac, et qu'une mention soit apposée sur leur dossier Parcoursup lorsqu'ils ont gravement perturbé la vie de l'établissement", a déclaré Gabriel Attal.
Matignon précise envisager notamment un retrait de points sur les notes obtenues aux examens. Mais ces sanctions ne seront pas irréversibles. "La condition pour effacer cette mention et retrouver ces points sera la réalisation d’activités d’intérêt général au sein de l’établissement scolaire", ajoute le bureau du Premier ministre.
Une remise en question de "l'excuse de minorité"
Le ministre de la Justice va "ouvrir le débat" pour voir si des "atténuations" à "l'excuse de minorité", principe qui fait qu'un mineur est sanctionné moins sévèrement qu'un majeur, sont "possibles" et "souhaitables", a déclaré Gabriel Attal. Eric Dupond-Moretti doit également réfléchir à la mise en place "d'une comparution immédiate devant le tribunal pour les jeunes à partir de 16 ans", au lieu de 18 ans.
"Ma boussole, c'est l'impunité zéro, c'est la sanction immédiate pour certains", a-t-il ajouté. En ce sens, Gabriel Attal veut travailler "à une mesure de composition pénale sans juge pour les mineurs à partir de 13 ans". L'idée serait, s'ils reconnaissent les faits, d'avoir "une sanction plus rapide".
Alors que des travaux d'intérêt éducatif avaient aussi été annoncés pour les moins de 16 ans, lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre précise qu'une circulaire "sera signée dans les prochains jours, pour une entrée en vigueur dès la rentrée des vacances de printemps".
Un renforcement des équipes "Valeurs de la République"
Le Premier ministre a également abordé la question du fait religieux à l'école. "Aujourd'hui, soyons francs, de plus en plus souvent, les troubles ou les violences dont nous entendons parler à l'école ont un sous-texte identitaire ou religieux. Je vous le dis, il n'y aura pas de guerre des religions à l'école, car à l'école, la seule règle qui vaut, c'est la laïcité", a-t-il dit.
Pour respecter cette règle, il souhaite "renforcer les équipes Valeurs de la République", créées pour veiller au respect de la laïcité dans chaque académie. Gabriel Attal veut aussi un "signalement systématique au procureur en cas d'atteinte grave à la laïcité".
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