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L'Oeil du 20H - Retraites : 30 000 enseignants lésés ?

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L'Oeil du 20H - Retraite : des professeurs lésés
Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
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Pour pallier la pénurie d'enseignants au début des années 1990, Lionel Jospin, alors ministre de l'Education Nationale, lance une réforme alléchante : proposer aux étudiants qui s'engageraient à passer les concours de l'enseignement une allocation mensuelle qui comptera de surcroît pour leur retraite. Sauf qu'une erreur dans le décret d'application de la loi prive aujourd'hui des milliers d'enseignants de ces trimestres.

Il y a 34 ans, pour pallier la pénurie d’enseignants, le ministre de l’Education Nationale de l’époque lance une réforme alléchante : un coup de pouce financier pour les aspirants professeurs, qui devait aussi leur ouvrir des droits pour la retraite, comme le promettait la loi. Des trimestres qui se sont volatilisés, comme vous le raconte l’Oeil du 20H.

Près de Belfort, voilà 30 ans que Benoît Cornu est professeur de physique chimie. Une vocation née sur les bancs de la fac, lorsqu’il entend parler de la possibilité de toucher une allocation pendant ses études. 

Sélectionné sur dossier, il s’engage à abandonner ses petits boulots et à passer le concours pour devenir professeur, en échange de 5700 F par mois, soit 800 euros

Un revenu qu’il a touché pendant 20 mois, jusqu’à son concours, et qui devait en plus compter pour sa future retraite. Sauf qu’aujourd’hui, les trimestres correspondants n’ont pas été enregistrés.

Il y a un trou dans la raquette entre 1992 et 1993, période où j'étais allocataire de l'IUFM. En ce qui me concerne il manque 7 trimestres, c’est beaucoup ... C'est deux années qu’on va peut-être me prendre

Benoît Cornu, enseignant et maire de Ronchamp (sans étiquette)

C’est pourtant écrit noir sur blanc, dans la loi du 26 juillet 1991 : 

"Les périodes pendant lesquelles ont été perçues des allocations d'enseignement (...) sont prises en compte pour la constitution et la liquidation du droit à pension de retraite (...)."

Loi du 26 juillet 1991, Article 14

Mais le décret d’application, paru 2 mois plus tard, ne parle plus que de “bonification d’ancienneté” pour ces professeurs. Autrement dit, des bonifications qui n’ouvrent aucun droit à la retraite.

L’Etat a t-il fait une erreur dans sa copie ?

Nous avons posé la question au ministre de l’éducation de l’époque, Lionel JospinDans sa réponse par mail, Lionel Jospin ne répond pas précisément à nos questions. Il soutient que ce système de bonification a été utilisé car il existait déjà dans d’autres professions.

Des bonifications d’ancienneté existaient déjà pour certains personnels administratifs de l’Éducation nationale, mais pas pour les enseignants. C’est sans doute par analogie que le décret a été ainsi rédigé

Lionel Jospin, ancien Ministre de l'Education Nationale (1988-1992)

Résultat, sans un nouveau décret, pas de retraite complète pour ces professeurs.

Laurent Bovis représente un collectif d’anciens allocataires. Il estime qu’ils seraient 30 000 à être concernés. 

Malgré tout, les courriers adressés ces derniers mois aux actuels ministres du travail et de l’Education nationale, sont restés sans effets.

Quand on voit qu'une réforme des retraites aujourd'hui s'organise très vite, qu'un décret d'application passe en 24h, on comprend encore moins que dans notre cas, il faille attendre plus de 32 ans pour qu'un nouveau décret voit le jour

Laurent Bovis, enseignant et responsable du collectif "Enseignants allocataires années 90"

Contacté, le ministère de l’Education Nationale affirme avoir engagé des démarches pour rédiger le décret manquant. Celui-ci devrait voir le jour d’ici la fin de l’année. 






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