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Nouveaux programmes au collège : c'est vraiment une tout autre histoire ?

Francetv info a comparé le futur programme d'histoire avec celui qui est actuellement enseigné de la sixième à la troisième. 

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Une classe d'un collège de Merdrignac (Côtes-d'Armor), le 13 mars 2015. (MATHIEU PATTIER / SIPA)

Alors que la réforme du collège a fait l'objet d'un décret publié dans le Journal officiel, mercredi 20 mai, les futurs programmes d'histoire suscitent toujours autant d'inquiétudes. L'ancien ministre Jean-Pierre Chevènement accuse le Conseil supérieur des programmes (CSP) de trahir "le récit national", quand l'historien Pierre Nora décèle une forme de "culpabilité nationale", regrettant que l'étude du siècle des Lumières devienne facultative. C'est en effet une nouveauté : certains passages du programme seront obligatoires, d'autres non.

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Avec seulement deux heures et demie de cours par semaine pour l'histoire et la géographie, les professeurs font déjà des impasses, en raison d'un programme chargé. Cette fois, c'est écrit noir sur blanc. "Les professeurs revendiquent leur liberté pédagogique, mais ils vont être embêtés, avec des choix parfois difficiles", explique Florian Nicolas, responsable de l'association française des professeurs d'histoire et de géographie en Midi-Pyrénées. Francetv info a comparé, avec lui, dans le détail le programme d'histoire en vigueur avec le projet en cours d'élaboration. 

Quels sont les thèmes que vont étudier les collégiens ?

De la naissance de l'humanité à la société des années 1960 et 1970, voici les thèmes retenus par le CSP, pour la classe de sixième et pour les suivantes. Les sujets grisés seront obligatoirement étudiés, les autres – sur fond blanc – seront traités selon le choix de l’enseignant.

A titre de comparaison, voici les programmes qui sont actuellement appliqués en sixième, cinquième, quatrième et troisième.

Ce qui change dans les contenus enseignés

• La première guerre mondiale est désormais étudiée en fin d'année de quatrième, plutôt qu'en troisième. "C'est le genre de choses qui a attisé la contestation enseignante", estime Florian Nicolas, car les professeurs n'aiment pas traiter une période aussi importante en fin d'année, alors qu'ils courent déjà après le programme.

• Sur un tout autre plan, le programme de troisième cesse de traiter des relations internationales après la chute du mur de Berlin en 1989. "Pourtant, aujourd'hui, nous avons l'habitude de faire de l'histoire immédiate avec les élèves, en utilisant notamment des sources tirées des médias", regrette Florian Nicolas.

• La construction européenne, elle, semble quelque peu oubliée. A moins, peut-être, qu'elle ne se cache derrière la thématique intitulée "L’Est et l’Ouest au temps de la guerre froide (jusqu’à 1989)" ? "Je ne vois pas d'autre endroit où évoquer ce sujet", déplore notre enseignant. Une place minimale pour le moins étonnante.

• D'autres modifications plus légères sont apportées. En sixième, la préhistoire ("une seule humanité") fait son retour alors que l'Inde des Gupta est oubliée, au profit de la Chine des Han. Les empires byzantin et carolingien sont enseignés un an plus tard, en cinquième, plutôt qu'en sixième, tandis que l'étude d'une civilisation africaine disparaît. Un sous-thème facultatif sur la "place des femmes dans la société" fait, par ailleurs, son apparition en classe de troisième.

• Faute de temps, certains choix s'annoncent difficiles. "A titre personnel, je serai bien embêté pour choisir entre les Lumières ou la Révolution américaine, sachant que les deux sont importants pour comprendre la Révolution française...", développe Florian Nicolas, à titre d'exemple.

Ce qui ne change pas

• Antiquité, période médiévale, moderne et contemporaine : le principe des grands découpages chronologiques de l'histoire n'a pas évolué. L'absolutisme, par exemple, reste enseigné, à titre obligatoire, à la fin du programme de cinquième. "En 2008, lors de la mise en œuvre des programmes actuels, des collègues avaient déjà râlé, en disant que les élèves finiraient l'année sans avoir vu Louis XIV."

• "On abaisse, à travers l’autoflagellation et la repentance, la belle histoire de France", s'est récemment indigné l'UMP Guillaume Peltier. Après avoir comparé point par point les deux programmes, Florian Nicolas est dubitatif : "On n'a pas fait entrer dans les projets de programmes d'autres éléments d'autoflagellation." De fait, les traites négrières (en quatrième), le colonialisme et la guerre d'Algérie (en troisième) étaient déjà enseignés.

• Alors que l'on célèbre son centenaire, le projet insiste sur la présence du génocide arménien dans les cours dédiés à la première guerre mondiale. "Nous ne sommes pas pour rien en 2015", reprend Florian Nicolas, en référence au centième anniversaire de cet événement dramatique. Dans les faits, l'histoire de ce génocide est déjà enseignée en troisième. Rien de nouveau, donc.

• Le sous-thème sur "les débuts de l'islam", en cinquième, a suscité de vives réactions, car ce module revêt un caractère obligatoire. Depuis 2008, pourtant, cette période occupe déjà 10% du programme de cinquième. Les temps estimés d'enseignement ne sont pas précisés dans le projet. Autre obligation la même année : le thème "société, Eglise et pouvoir politique dans l'Occident chrétien". Quant aux débuts du christianisme et du judaïsme, ils restent enseignés de façon obligatoire en classe de 6e.

Ce qui reste en suspens

• Les dotations horaires. Dans le programme actuel, chaque grand thème est accompagné d'une indication horaire. Pour la sixième, par exemple, cela donne 10% du volume horaire pour l'Orient ancien, 25% pour la Grèce, 25% pour Rome, 20% pour le christianisme et le judaïsme, 10% pour le haut Moyen Age et 10% pour les mondes lointains. A chaque enseignant, ensuite, de déterminer le nombre d'heures exact qu'il souhaite consacrer à chaque partie.

• Certains intitulés sont encore imprécis. Un exemple ? Que faut-il comprendre par "le monde vers 1500" ? "En général, quand il y a ce genre d'intitulé, c'est une analyse du monde à partir d'un planisphère", suppose Florian Nicolas. 

• Autre exemple. Que veut dire "Construire, affirmer, consolider la République en France", thème obligatoire de quatrième ? "Aujourd'hui, on balaie tous les régimes politiques du XIXe siècle, pour montrer que la France cherche un régime jusqu'à la République, explique Florian Nicolas. Mais là, vu l'intitulé, cela suggère une période ramenée à la IIIe République, après 1870." Le Conseil supérieur des programmes a encore un mois pour préciser les contours de ces modules.

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