Retour des mathématiques en première : "C'est important" même si on "a une difficulté à gérer l'hétérogénéité des élèves", selon un professeur
Martin Andler, fondateur de l'association Animath estime que la réforme du baccalauréat a provoqué un "déséquilibre très problématique" en effaçant complètement les mathématiques du tronc commun.
"Je pense que c'est tout à fait important que tous les élèves de la filière générale aient des mathématiques", réagit lundi 14 novembre sur franceinfo Martin Andler, professeur émérite à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et fondateur de l’association Animath. Après le retour des mathématiques pour tous acté en classe de première, il indique qu'il aurait toutefois "préféré un système dans lequel on aurait distingué deux façons de faire des mathématiques plus ou moins approfondies". "Il y a une difficulté à gérer l'hétérogénéité des élèves", selon lui.
franceinfo : Est-ce un soulagement de voir revenir les maths pour tous ?
Martin Andler : Oui et non. Je pense que c'est tout à fait important que tous les élèves de la filière générale aient des mathématiques. Je pense que la manière de procéder n'était pas la bonne notamment parce que ça a complètement déséquilibré la partie de tronc commun, très fortement orienté sur les lettres et les sciences humaines. Les enseignements scientifiques, eux, sont plutôt dans les matières optionnelles. C'est selon moi un déséquilibre très problématique. Le deuxième point, c'est la difficulté à gérer l'hétérogénéité des élèves en mathématiques. J'aurais préféré un système dans lequel on aurait distingué deux façons de faire des mathématiques en première plus ou moins approfondies et avec des objectifs différents.
Une classe d'âge a-t-elle été sacrifiée pour les maths ?
Ils ont été doublement sacrifiés parce que c'est aussi la génération Covid. Le coronavirus a complètement désorganisé les études pendant plus d'une année. Mais en plus, ils ont fait les frais d'une réforme dont certains détails ont très mal été pensés. Ce qu'il faut comprendre, et c'est pour ça que je suis favorable aux mathématiques obligatoires pour tous, c'est qu'une partie des élèves qui ont un profil plutôt littéraire sont aussi des gens qui, dans leurs études et dans leur poursuite de carrière, vont être amenés à devenir professeurs des écoles. Les mathématiques sont donc une discipline extrêmement importante au niveau du premier degré. Il faut absolument que les professeurs des écoles soient à l'aise avec les mathématiques et c'est loin d'être le cas aujourd'hui.
Pourquoi est-ce grave d'avoir un niveau qui baisse à l'échelle d'un pays ou d'une génération en mathématiques ?
Il y a une étude récente du Conseil d'analyse économique qui met en évidence le fait que la productivité du travail a très peu augmenté ces 10 ou 20 dernières années en France. C'est très grave parce que c'est de l'augmentation de la productivité que vient l'augmentation de la richesse. Leur analyse, c'est que le faible niveau des jeunes Français et de l'ensemble de la population en mathématiques en est la principale raison. Il y a beaucoup de métiers dans lequel on a besoin d'une compétence de base en mathématiques, ou en informatique et dans des tas de domaines liés aux mathématiques. Et ça, on pêche nettement là-dessus. L'autre chose, c'est que dans les métiers plus scientifiques, on a de très grosses difficultés de recrutement de cadres et en particulier de jeunes femmes. Donc oui, il y a un vrai sujet.
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