Suppression de 4 000 postes d'enseignants : face à la colère syndicale, le ministère de l'Education rouvre le chantier des rémunérations

L'intersyndicale a été reçue mercredi par la direction du cabinet de la ministre, Anne Genetet, qui souhaite remettre la question salariale sur la table des négociations. Une nouvelle réunion est prévue le 21 octobre.
Article rédigé par Lucie Beaugé
France Télévisions
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La nouvelle ministre de l'Education nationale, Anne Genetet, à l'Elysée, le 1er octobre 2024. (AMAURY CORNU / HANS LUCAS / AFP)

Un coup de pouce sur les salaires pour calmer la grogne sociale ? Alors que le projet de loi de finances pour 2025 prévoit la suppression de 4 000 postes de professeurs, le ministère de l'Education nationale a annoncé aux syndicats enseignants, mercredi 16 octobre, son intention de lancer un chantier sur la rémunération du personnel enseignant et sur ses conditions de travail. L'intersyndicale avait déposé lundi une "alerte sociale", préalable à un préavis de grève, pour contester les économies prévues dans le prochain budget.

Sept syndicats (FSU, Unsa, FO, CFDT Education, CGT Educ'action, Snalc et Sud Education) ont donc été reçus par le cabinet de la ministre, dont l'entourage assure ne pas avoir "attendu" la grogne pour se pencher sur le sujet. Une prochaine réunion avec l'ensemble des organisations syndicales est prévue le 21 octobre pour préparer la rentrée 2025.

Revaloriser les AESH et les salaires en milieu de carrière

Le ministère de l'Education nationale dit avoir fait part mercredi de quatre axes de travail, à commencer par une revalorisation des salaires en bas de grille, notamment les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et les assistants d'éducation (AED), en transposant sur leur fiche de paie, dès le mois de novembre, l'augmentation du smic. Une mesure qui s'ajouterait au financement de 2 000 nouveaux AESH, prévu par le budget 2025. Le ministère estime à 50 000 le nombre d'AED qui bénéficieront de la hausse du salaire minimum.

Anne Genetet prévoit également de réévaluer les progressions de salaire pour pallier le tassement, en milieu de carrière, de la rémunération des enseignants. Le ministère précise que plus de 100 000 professeurs seront concernés d'ici 2027, avec une hausse de salaire de 150 à 350 euros nets par mois. Une revalorisation est toutefois déjà à l'œuvre pour ces professeurs depuis 2023 à travers la hausse des promotions "hors classe", un grade qui permet une augmentation de salaire et une progression de carrière plus rapide. Elle avait été annoncée par Pap Ndiaye, mais n'était prévue que jusqu'en 2025, comme l'avait récemment rappelé le ministère sur son site.

Une volonté de rééquilibrer les postes

Des revalorisations sont par ailleurs envisagées pour le personnel de direction et de santé scolaire. Enfin, le ministère ambitionne de faire appel à davantage de CPE (conseiller principal d'éducation) et d'assistants d'éducation dans les établissements concernés par des faits de violences. Selon le ministère, tous les syndicats ont accepté "d'ouvrir un nouvel agenda social" et de "reprendre un dialogue" sur ces axes de travail.

"Nous n'avons eu aucune annonce sur les carrières et les rémunérations, signale toutefois Caroline Brisedoux, secrétaire nationale de la CFDT Education, Formation, Recherche publiques. On nous a simplement annoncé l'ouverture d'un dialogue social sur le sujet". Elle précise à franceinfo que la réunion a été "tendue".

Avec 63 milliards d'euros de budget l'an prochain, l'Education nationale reste le premier poste de dépenses de l'Etat, globalement stable. La rue de Grenelle assure donc avoir "des marges de manœuvre" pour financer ses objectifs de revalorisations salariales ou pour augmenter les postes de CPE. Le ministère mise ainsi sur un rééquilibrage avec des "créations de postes nettes", alors que les 4 000 suppressions ne concerneront que les enseignants, principalement en maternelle et élémentaire. Anne Genetet a par ailleurs assuré dans un entretien à la Tribune dimanche que "des évolutions" concernant les suppressions de postes étaient encore possibles lors du "débat parlementaire" sur le budget 2025.

Face à l'inquiétude des syndicats, son cabinet a réitéré cette ouverture mercredi. En ne s'engageant pas sur une baisse du nombre de suppressions de postes, "le ministère ne mesure pas la gravité de la crise que subit l'école publique", fustige auprès de franceinfo Maud Valegeas, cosecrétaire fédérale de Sud Education.

"L'occasion d'améliorer le système scolaire français" 

Depuis l'annonce du projet de loi de finances pour 2025, ce rabotage du nombre de professeurs est décrié par l'ensemble des syndicats. Le ministère estime, de son côté, que la baisse de la démographie scolaire, avec notamment 21,4 élèves par classe en primaire (maternelle et élémentaire) dans les écoles à la rentrée prochaine, justifie de ne pas remplacer des départs en retraite ou de ne pas renouveler des contractuels.

Il est par ailleurs prévu, selon l'entourage d'Anne Genetet, de répartir les suppressions de postes en fonction des disciplines afin de préserver celles qui sont en tension. Quant aux fermetures de classe que cela va engendrer, le ministère explique que des arbitrages seront faits, académie par académie, entre décembre et février. Des arguments balayés par l'intersyndicale, qui juge que la diminution du nombre d'élèves en primaire doit justement être "l'occasion d'améliorer le système scolaire français", en ne touchant pas aux emplois.

Actuellement, la France compte les classes les plus chargées de l'Union européenne avec deux élèves de plus que la moyenne européenne en primaire, et trois au collège. Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, a également dénoncé sur X le bilan d'Emmanuel Macron depuis 2017 concernant le taux d'encadrement. Son syndicat avance le chiffre de 8 865 suppressions de postes dans le second degré et rappelle que les effectifs d'élèves ont augmenté dans le même temps.

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