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Clause de conscience, discernement du patient, soins palliatifs... Quelles sont les pistes du gouvernement pour son projet de loi sur la fin de vie ?

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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La ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, à l'Elysée, le 19 avril 2023. (ARTHUR N. ORCHARD / HANS LUCAS / AFP)
La ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a notamment annoncé dimanche dans le "JDD" que les soignants pourront faire valoir leur clause de conscience.

Agnès Firmin Le Bodo est désormais la voix du gouvernement sur l'épineux sujet de la fin de vie. La ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé a présenté, dimanche 21 mai dans Le Journal du Dimanche (article abonnés), les contours du futur projet de loi, promis par l'exécutif, ouvrant la voie à une aide active à mourir (AAM). Début avril, à la suite des recommandations de la convention citoyenne dédiée, Emmanuel Macron a annoncé que le texte prendrait corps "d'ici la fin de l'été". Saluant le sérieux de leurs travaux, le chef de l'Etat a toutefois rappelé qu'une "convention citoyenne ne se substitue jamais à la délibération parlementaire".

Le projet de loi "comprendra trois blocs : aide active à mourir, soins palliatifs et droits des patients", a décrit la ministre, qui ne tranche pas sur le choix du modèle français, entre euthanasie et assistance au suicide. Le premier acte prévoit de mettre délibérément fin à la vie d'un patient, à sa demande, quand le deuxième donne la possibilité à un médecin de prescrire un produit létal que le malade s'administre lui-même.

"Ce qui importe, c'est que la possibilité encadrée de bénéficier d'une aide active à mourir devienne effective, comme le réclament 75% de nos concitoyens", déclare Agnès Firmin Le Bodo dans le JDD. Clause de conscience des soignants, délai du pronostic vital des patients, âge minimal des personnes concernées... Franceinfo fait le point sur les annonces de la ministre. 

Les médecins pourront faire valoir une clause de conscience

Alors que les médecins sont divisés sur la question de l'aide active à mourir, Agnès Firmin Le Bodo promet que ceux "qui ne souhaitent pas (y) participer (...) devront pouvoir faire jouer une clause de conscience dès la première étape du processus, quand ils doivent se prononcer sur un pronostic vital engagé à moyen terme". Début avril, l'Ordre des médecins a réclamé une clause de conscience au sujet du suicide assisté. Sans préciser s'il s'agit d'une clause spécifique, sachant que les médecins peuvent déjà faire valoir une clause de conscience.

Le Conseil de l'ordre des médecins évoquait une clause "qui pourrait être mise en exergue à tout moment de la procédure". Il souhaite également que "l'évaluation, la décision d'éligibilité pour une aide active à mourir et la responsabilité (soient) collégiales". En revanche, l'Ordre est plus ferme au sujet de l'euthanasie. Il estime qu'un praticien ne peut pas "provoquer délibérément la mort par l'administration d'un produit létal".

Le pronostic vital du patient doit être engagé à "moyen terme"

A quel stade de sa maladie le patient pourra-t-il procéder à une demande d'aide active à mourir ? Agnès Firmin le Bodo affirme dans le JDD que "son pronostic vital devra être engagé à moyen terme". "La loi Claeys-Leonetti ne répond, avec la sédation profonde et continue jusqu'au décès, qu'aux situations où le patient est en grande souffrance avec un pronostic vital engagé à quelques jours", rappelle-t-elle.

Selon le ministère, la durée de vie restante d'une personne dont le pronostic vital est engagé à moyen terme est estimée de "quelques semaines à quelques mois". Dans le cadre de l'accès à l'aide active à mourir, l'enjeu sera donc de définir précisément ce "moyen terme". Dans le JDD, la ministre cite l'exemple de l'Oregon, aux Etats-Unis, "où l'on pratique l'aide active à mourir depuis 25 ans" et où le pronostic vital engagé "doit l'être dans les six mois".

Le discernement du patient sera évalué

Outre ce délai, Agnès Firmin le Bodo liste deux autres critères : une volonté du patient "recueillie à plusieurs reprises" et un "discernement intact". Il faut, selon la ministre déléguée aux Professions de santé, trancher plusieurs autres questions, comme "le délai pour réitérer la demande" après une première requête.

Ces mesures semblent reprendre les recommandations de la convention citoyenne sur la fin de vie. Dans le détail, ses travaux évoquait six étapes : pré-demande auprès d'un soignant, demande auprès d'un médecin, évaluation du discernement, demande réitérée, procédure collégiale composée de soignants, puis accès à l'aide active à mourir. Un point faisait par ailleurs consensus parmi les citoyens participant aux travaux : à tout moment du parcours d'accès à l'aide active à mourir, et jusqu'au dernier instant, le patient est libre de changer d'avis et de renoncer à sa demande.

Les mineurs et les personnes souffrant de maladies psychiques seront exclues du dispositif

Comme l'avait déjà esquissé Emmanuel Macron, au lendemain de la publication du rapport de la convention citoyenne fin de vie, les mineurs ne pourront pas bénéficier des mesures figurant dans la nouvelle loi. "Si une majorité des cancers pédiatriques débouchaient sur la mort de l'enfant il y a dix ans, plus de 80% guérissent désormais", justifie Agnès Firmin Le Bodo. Pour mieux prendre charge les mineurs souffrant de maladies chroniques, elle souhaite créer une unité de soins palliatifs pédiatriques au niveau national.

La ministre ferme également la porte aux patients souffrant de maladies psychiques. "Un pronostic vital engagé à moyen terme signifie qu'il n'y a pas d'espoir de guérison. En matière de souffrances psychiques, la science et la prise en charge évoluent", explique Agnès Firmin Le Bodo. "Plutôt que de figer une liste de maladies ouvrant l'accès à l'aide active à mourir, il faudrait plutôt qualifier l'impact des pathologies concernées", avance-t-elle.

Un "plan décennal" pour les soins palliatifs

Qu'il soit majeur ou mineur, la ministre insiste par ailleurs sur la nécessité de "s'assurer que le patient se soit bien vu proposer une prise en charge palliative". Elle ajoute que "la plupart [des patients] ne souhaitent plus mourir quand ils bénéficient de ces soins". En France, un département sur cinq restait dépourvu d'unité de soins palliatifs (USP) fin 2019, selon le rapport d'activité 2020 du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie.

"Nous préparons un plan décennal, comme en matière de cancer ou de maladies rares, qui entrera en vigueur en 2024", promet Agnès Firmin Le Bodo dans le JDD, confirmant une annonce d'Emmanuel Macron il y a un mois. Un plan qui "sera finalisé le 15 décembre", après "un point d'étape le 13 juillet". Le gouvernement souhaite également mieux former les généralistes aux soins palliatifs et "créer une filière médicale dévolue".

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