Affaire Vincent Lambert : trois questions sur l'arrêt des traitements, commencé il y a une semaine
Six jours après le début de la cessation de la nutrition et de l'hydratation artificielles du patient dans un état végétatif irréversible, les parents de Vincent Lambert ont annoncé qu'ils ne déposeraient plus de recours pour s'opposer à cette décision médicale.
"La mort de Vincent est désormais inéluctable." Après des années de combat judiciaire pour empêcher l'arrêt des traitements, les parents de Vincent Lambert se résignent à sa mort, dans une lettre ouverte publiée lundi 8 juillet, six jours après le début de l'arrêt des soins décidé par son médecin du CHU de Reims.
Comment se déroule l'arrêt des traitements ?
La procédure constitue à arrêter la nutrition et l'hydratation artificielles, tout en mettant en œuvre une "sédation profonde et continue" jusqu'à sa mort. Cette procédure est encadrée par la loi Claeys-Leonetti de 2016, qui interdit l'euthanasie et le suicide assisté mais autorise l'arrêt des traitements en cas "d'obstination déraisonnable". Selon cette loi, les traitements peuvent être "suspendus" lorsqu'ils "apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie". La décision doit être prise par les médecins de façon "collégiale".
Quand une personne ne peut exprimer sa volonté, comme Vincent Lambert, la "sédation profonde et continue jusqu'au décès" est "une mesure de précaution" pour être sûr "que le patient ne souffre pas", selon les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Pour la sédation, on utilise le midazolam en intraveineuse. Ce médicament de la famille des benzodiazépines est puissant et son action rapide. Avec l'arrêt simultané de l'hydratation et de l'alimentation, la mort survient aux alentours d'une semaine, explique à l'AFP le docteur Bernard Devalois, spécialiste des soins palliatifs.
Va-t-il vraiment "mourir de faim et de soif" ?
C'est l'argument des opposants à l'arrêt des traitements et notamment des parents de Vincent Lambert, soutenus par des associations catholiques. Au-delà du cas Lambert, l'argument est paradoxalement utilisé par les militants pro-euthanasie, qui jugent que la loi Claeys-Leonetti ne va pas assez loin pour les patients incurables. "Malheureusement, ce n'est pas une euthanasie, sinon ça irait plus vite, ça serait un petit peu moins sadique de mon point de vue. Et on donnerait un petit peu plus de droits aux patients", a déclaré François Lambert, son neveu, au micro de RTL.
Partisan de l'arrêt des traitements de son oncle, François Lambert estime que la menace d'une plainte des parents pour "meurtre avec préméditation" "encourage le médecin à prendre son temps, c'est-à-dire à ne pas être accusé d'une euthanasie". "Et pour ne pas être accusé d'une euthanasie, il faut que ça dure le plus longtemps possible, ce qui est à mon avis franchement sadique", déplore-t-il, dénonçant une loi qui avait "été rédigée notamment avec les pro-vie et leur a donné beaucoup de latitude et beaucoup de moyens d'action".
Toutefois, les spécialistes des soins palliatifs réfutent l'argument selon lequel Vincent Lambert est en train de mourir dans des conditions indignes. "Vincent Lambert n'aura ni faim ni soif. Il va mourir naturellement en quelques jours", explique le docteur Bernard Devalois. "Les gens confondent la soif et la sécheresse de la bouche", poursuit-il.
Dans le cas de Vincent Lambert, il n'y a pas de sensation de soif : pour avoir soif, il faut avoir conscience.
Bernard Devaloisspécialiste des soins palliatifs
Par ailleurs, la déshydratation peut renforcer le processus de sédation, car l'insuffisance rénale qu'elle provoque entraîne des phénomènes naturels d'endormissement liés à la non-élimination de certaines substances.
A quoi sera dû le décès de Vincent Lambert ?
La mort de Vincent Lambert sera due à la défaillance des organes, qui cesseront de fonctionner. En raison de l'insuffisance rénale, le potassium s'accumulera dans le sang et finira par provoquer l'arrêt du cœur. L'équipe soignante se doit d'accompagner le patient jusqu'au bout, avec des soins comme la toilette, le toucher-massage, les soins de bouche (compresses humidifiées contre la sécheresse...) ou des gouttes pour réhydrater les yeux.
Ce n'est pas un arrêt des soins, c'est un arrêt du maintien artificiellement en vie.
Bernard Devaloisspécialiste des soins palliatifs
Marie Lambert, la sœur de Vincent Lambert, s'est entretenue lundi matin avec Vincent Sanchez, le médecin du CHU de Reims qui a annoncé l'arrêt des soins. Ce dernier lui a réaffirmé avoir "la certitude" que "Vincent ne souffre pas", grâce notamment "aux produits administrés". "Nous sommes dans la dernière étape du processus. Les effets de la déshydratation se font désormais ressentir mais nous ne savons pas combien de jours cela va prendre. Cette attente est très douloureuse pour tout le monde", ajoute-t-elle.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.