Ce que l'on sait des accusations de violences sexuelles visant deux joueurs du XV de France en Argentine

Les rugbymen Oscar Jegou et Hugo Auradou, actuellement en tournée avec le XV de France en Argentine, ont été arrêtés lundi par la police locale.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Oscar Jegou, lors d'une séance d'entraînement à Mendoza (Argentine), le 5 juillet 2024. (ANDRES LARROVERE / AFP)

Deux joueurs du XV de France dans le viseur de la justice argentine. En pleine tournée avec l'équipe de France, Oscar Jegou et Hugo Auradou ont été arrêtés, lundi 8 juillet, par la police argentine à la suite d'une plainte pour violences sexuelles. "Il y a une enquête en cours", a confirmé le président de la Fédération française de rugby (FFR), Florian Grill, lundi soir. Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait de cette affaire.

Une enquête ouverte pour "agression sexuelle aggravée"

Le XV de France est actuellement en Argentine pour une série de matchs tests, avec un groupe très largement rajeuni et sans ses principaux joueurs, laissés au repos. Selon les informations du média local MDZ, une jeune femme a déposé plainte pour des violences sexuelles commises dans la nuit de samedi à dimanche, quelques heures après la victoire des Bleus contre les Pumas, au Diplomatic Hotel de Mendoza, où logeaient les joueurs et le staff"Il y a beaucoup de preuves génétiques", a affirmé auprès du journal le cabinet de l'avocate qui représente la victime.  

"La déclaration de la plaignante a été longue, avec de nombreux détails sur le déroulement de la soirée", a précisé auprès de L'Equipe Daniela Chaler, procureure en chef des délits contre l'intégrité physique. "Immédiatement, elle a été examinée par une médecin légiste qui a constaté des blessures." A la suite de quoi "il a été décidé d'ouvrir une enquête pour le délit d'agression sexuelle aggravée et d'ordonner la détention", a-t-elle ajouté. La procureure a évoqué mardi des "lésions" qui "sont compatibles avec le récit de la victime", "mais pas nécessairement exclusivement issues d'une agression sexuelle". 

Victoria Alvarez, avocate aux barreaux de Paris et de Buenos Aires, citée par Rugbyrama, précise que si les faits de violences sexuelles aggravées sont retenus, cela correspondrait à ce qui est défini en France comme un "viol aggravé". Les peines encourues pourraient ainsi aller de 6 à 15 années de prison, précise-t-elle, ajoutant que si "des dommages graves" se répercutent "sur la santé mentale ou physique de la victime", les peines pourraient atteindre "de huit à vingt ans" de prison.

Deux jeunes joueurs mis en cause

Les deux joueurs concernés sont le deuxième ligne de Pau Hugo Auradou, 20 ans, et le troisième ligne du Stade rochelais Oscar Jegou, 21 ans, qui ont disputé la rencontre contre les Pumas à Mendoza. En déplacement à Buenos Aires lundi, ils ont été entendus dans leur hôtel avant d'être emmenés au commissariat, rapportent les deux quotidiens. "Une commission de la province de Mendoza se rend à Buenos Aires pour les amener [à Mendoza] et procéder aux actes d'enquête appropriés", a de son côté affirmé Martin Ahumada, porte-parole du parquet de Mendoza. "Si les résultats concordent avec le témoignage de la victime, l'acte d'accusation sera délivré", a-t-il poursuivi.

Hugo Auradou et Oscar Jegou ont été sacrés champions du monde en 2023, dans la catégorie des moins de 20 ans. Oscar Jegou a été suspendu à l'automne 2023 par l'Agence française de lutte contre le dopage, à la suite d'un contrôle positif à la cocaïne. Il avait expliqué avoir pris cette substance dans un cadre festif, ce que l'agence avait confirmé, rappelle La Dépêche. De son côté, Hugo Auradou est le fils de l'ex-deuxième ligne international David Auradou ; il a rejoint le centre de formation de Pau en 2020. Rapidement promu capitaine des Espoirs, il a commencé sa carrière professionnelle à 18 ans avec la Section paloise.

La Fédération dénonce des faits "incroyablement graves"

"Si les faits sont avérés, ils sont incroyablement graves", a réagi le patron de la FFR, Florian Grill, qui est sur place avec le XV de France. "Il faut avoir une pensée pour la jeune femme. C'est à l'inverse de tout ce que le rugby est, de tout ce que le rugby fait, de tout ce que le rugby construit (...) mais il faut laisser l'enquête, qui est nécessaire, se dérouler", a-t-il ajouté. "Si l'enquête établit les faits reprochés, ils constituent une atrocité sans nom. Pensée pour la victime", a écrit mardi matin Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports, sur le réseau social X.

Mathieu Giudicelli, directeur général de Provale, le syndicat national des joueurs de rugby, a exprimé sur franceinfo "son soutien total à la victime présumée". Il dit également "condamne[r] toutes les formes de violences faites aux femmes". Dans un message publié sur X, la Section paloise s'est refusée à tout commentaire, "dans l'attente d'éléments plus précis de la Fédération française de rugby et des premières conclusions de l'enquête en cours". Même réaction du Stade rochelais, le club d'Oscar Jegou, qui s'abstient "de tout commentaire", "en l'absence totale d'information directe sur la procédure en cours", dans un communiqué.

Dans un autre communiqué, publié mardi soir, la Fédération française de rugby a annoncé que le président de la FFR, Florian Grill, et son vice-président, Jean-Marc Lhermet, avaient rencontré les deux joueurs. "Ces derniers ont confirmé avoir eu dans la nuit une relation sexuelle avec la jeune femme mais ont fermement nié toute forme de violence", écrit l'instance. "Pour l'heure, l'enquête suit son cours" et "la Fédération est actuellement dans l'attente des auditions de la victime présumée et des joueurs", ajoute la FFR.

"Pour le groupe, pour la délégation, ça a été vécu comme un traumatisme, une forme de sidération quand on a appris les nouvelles et lorsque la police a débarqué à l'hôtel à Buenos Aires. Ça a été une journée très difficile, très très dure. Un moment très difficile à vivre", a de son côté réagi mardi soir le sélectionneur du XV de France, Fabien Galthié.

Un "enchaînement dramatique" d'affaires pour le XV de France

Après leur victoire samedi à Mendoza, les Bleus devaient partir au complet mardi à Montevideo, en Uruguay, pour jouer un autre match test contre Les Teros, puis revenir à Buenos Aires pour défier à nouveau l'Argentine samedi. Un calendrier très serré, qui a forcé la justice argentine à prendre des mesures rapides avant que les joueurs ne quittent le pays, selon MDZ. Estimant le risque de fuite élevé, compte tenu des faits et de la peine encourue, le ministère public argentin a émis un mandat d'arrêt international, précise L'Equipe

L'arrestation des deux joueurs intervient en outre au lendemain d'une autre affaire : la mise à l'écart de la tournée et le renvoi en France de l'arrière Melvyn Jaminet, après des propos racistes dans une vidéo publiée dimanche et pour desquels il s'est dit "honteux". "Le rugby est anecdotique, tout le reste est accessoire. L'enchaînement est dramatique", a reconnu Florian Grill depuis Buenos Aires.

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