Harcèlement sexuel : Laurence Rossignol souhaite "l'application des lois déjà existantes"
L'ex-ministre des Familles, de l'enfance et des droits des femmes, Laurence Rossignol, a commenté, lundi sur franceinfo, les annonces de Marlène Schiappa sur un projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles.
Pour pouvoir prendre en compte les déclarations tardives de harcèlement sexuel, les associations demandent depuis longtemps que le délai de prescription soit rallongé. "C'est une demande constante", a renchéri, lundi 16 octobre sur franceinfo, Laurence Rossignol, sénatrice PS de l’Orne et ancienne ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes.
La secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a annoncé, dimanche, que le gouvernement entend présenter l'an prochain au Parlement un projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, notamment les violences sur mineurs. Elle devrait acter l'allongement des délais de prescription pour les crimes sexuels sur mineurs.
franceinfo : Le délai de prescription est actuellement de 20 ans à partir de la majorité de la victime. Pourquoi faut-il le changer ?
Laurence Rossignol : La connaissance scientifique a progressé. On a identifié l'amnésie post-traumatique qui fait qu'une victime reste parfois sans savoir ce qui lui est arrivé durant 10, 15, 20 ans de sa vie. Quand j'étais aux responsabilités, j'avais demandé à Flavie Flament et à un magistrat de travailler sur ce sujet. Le rapport avait conclu à l'allongement à 30 ans du délai de prescription. C'est une mesure qui va bouleverser un peu le monde judiciaire, parce que ce n'est pas consensuel. Je pense qu'il faut le faire néanmoins.
La secrétaire d'État Marlène Schiappa a esquissé plusieurs mesures comme des sanctions spécifiques contre le harcèlement de rue. Que faut-il faire à votre avis ?
Je comprends l'intention de la ministre. En parler fait monter le sujet et, surtout, cela incite les femmes à ne pas se laisser faire. Sur le harcèlement de rue, j'aimerais voir le gouvernement plus offensif sur l'application des lois qui sont déjà existantes. Je pense en particulier à la loi sur la pénalisation du client de la prostitution. Le cœur de cette affaire de harcèlement de rue est la représentation que l'on a des femmes dans l'espace public et cette idée selon laquelle une femme sur le trottoir est une femme au trottoir. Je me souviens très bien, souvent, alors que j'attendais à un feu rouge ou à un arrêt de bus, le nombre de fois où on m'a demandé : "C'est combien ?" Cela signifie que toute femme est à prendre. Il faut donc appliquer la loi sur la pénalisation du client. J'attends du ministre de l'Intérieur en particulier, qu'il en donne [l'ordre] à la police et que les parquets s'engagent à faire appliquer cette loi. C'est plus important qu'une nouvelle loi.
Faut-il dénoncer, donner les noms ?
D'abord, je crois qu'il faut accompagner les victimes pour les inciter à dénoncer. Après, il y a des situations où c'est un peu plus compliqué. Ensuite, il est important d'avoir des cellules dans les entreprises où on peut dénoncer. La dénonciation en place publique, c'est aux victimes de le faire et c'est aux témoins de changer le climat.
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