Mises à pied, démission… Les premières conséquences de l'affaire de "la Ligue du LOL"
Mis en cause dans l'affaire de "La Ligue du LOL", deux journalistes ont été mis à pied lundi à titre conservatoire par le quotidien "Libération". D'autres ont été écartés ou ont quitté leur poste.
Ils s'appelaient "La Ligue du LOL". Dix ans après la création de ce groupe Facebook, certains de ses membres font face à des dizaines d'accusations de harcèlement en ligne. Certaines de leurs cibles ont dénoncé ces derniers jours des entraves à leur carrière et un dénigrement systématique et coordonné de la part de membres du groupe ou de leur entourage, étayant leurs témoignages de photos de messages violents. Des femmes, notamment journalistes ou blogueuses féministes, ont été particulièrement visées. Depuis la mise en lumière de ces agissements, plusieurs membres du groupe ont été écartés ou se sont retirés de leurs fonctions professionnelles, lundi 11 février.
Ils ont été mis à pied
A. H. et Vincent Glad, rédacteur et pigiste à Libération, ont été mis à pied à titre conservatoire dans la matinée de lundi. Ce n'est "pas une sanction", précise la direction du quotidien à France Inter. Cela "ne préjuge en rien d'une culpabilité quelconque", ajoute Laurent Joffrin, directeur de la rédaction du quotidien, cité par Le Monde. "Nous prenons cela très au sérieux", dit-il en précisant qu'une enquête interne a été lancée.
Les deux journalistes concernés avaient présenté leurs excuses sur Twitter, dimanche. Vincent Glad a reconnu avoir créé le groupe Facebook "La Ligue du LOL", acronyme de laughing out loud (rire bruyamment), utilisé sur internet pour marquer une intention humoristique ou sarcastique. "On parlait de trolling, c'était du harcèlement, écrit-il. J'ai créé un monstre qui m'a échappé." Vincent Glad a assuré que l'objectif de ce groupe "n'était pas de harceler des femmes. Seulement de s'amuser. Mais rapidement, notre manière de s'amuser est devenue très problématique."
Le site Brain Magazine a également annoncé la suspension de sa collaboration avec Vincent Glad "car continuer à faire bosser des gens qui ont participé, facilité ou laissé faire ce système de harcèlement, ce serait le cautionner". Le média Usbek & Rica a pour sa part annoncé sur Twitter la mise à pied conservatoire du journaliste G. L.. Le directeur de publication ajoute qu'il stoppe "toute collaboration" avec R.L-A.. Ce dernier, qui répond au pseudonyme de @ClaudeLoup sur Twitter, a également été mis à pied à titre conservatoire par Publicis, indique l'entreprise à franceinfo, confirmant les informations du Monde.
Communiqué au sujet de la #ligueduLOL pic.twitter.com/WEnuktMKuo
— Brain Magazine (@brainmagazine) 11 février 2019
Une source proche de la direction des Inrocks a de son côté confirmé que D. D., rédacteur en chef, et F.-L. D., rédacteur en chef adjoint, ont été mis à pied à titre conservatoire.
Il a dû s'expliquer avec une victime
Christophe Carron, rédacteur en chef du site d'information Slate, s'est dit "désolé" d'avoir fait partie de ce groupe. "Je crois n'avoir nui socialement ou professionnellement à personne, ni harcelé quiconque", a-t-il précisé dans un message publié sur Twitter lundi à la mi-journée.
A propos de la Ligue du LOL. pic.twitter.com/DQqyg5Tofn
— Christophe Carron (@krstv) 11 février 2019
"Slate.fr couvrira le sujet sans s'interdire aucun angle. Je ne prendrai évidemment part d'aucune manière ni à la supervision, ni à la rédaction de ces articles", conclut-il. Le site a confirmé cette position dans une série de tweets.
composé principalement de journalistes masculins dont certains se sont livrés en parallèle à du cyber-harcèlement visant des femmes, des personnes racisées, des blogueurs. 2/3
— Slate.fr (@Slatefr) 11 février 2019
Nous en publierons d'autres, Slate ne s'interdira aucun angle sur le sujet. Ces articles seront produits sous la supervision d'Hélène Decommer, rédactrice en chef adjointe de Slate. 3/3
— Slate.fr (@Slatefr) 11 février 2019
Interrogé par franceinfo, Jean-Marie Colombani, cofondateur de Slate, a qualifié de "regrettable" la présence de Christophe Carron au sein de "La Ligue du LOL" : "On l'a découverte à l'occasion [de l'affaire]. Il n'a jamais ni menacé, ni insulté, ni harcelé personne. Son seul tort est d'avoir continué à faire partie de ce groupe, sans prendre garde et s'en écarter." Le dirigeant de Slate a également confirmé que Christophe Carron avait proposé de démissionner. "C'est là qu'on est entré un peu dans les détails, explique Jean-Marie Colombani. Il a répondu aux questions de Lucile [Bellan], qui est une des victimes de 'La Ligue du LOL' [comme elle le raconte elle-même dans un article sur Slate]."
Ils ont été écartés
Le studio de podcasts Nouvelles Ecoutes a de son côté mis fin à sa collaboration avec Guilhem Malissen. Ce dernier avait également "présenté publiquement [s]es excuses les plus sincères" sur Twitter, le lendemain de la révélation de l'existence de "La Ligue du LOL".
— Nouvelles Écoutes (@NouvEcoutes) 11 février 2019
Egalement membre du groupe Facebook, le publicitaire Sylvain Paley était enseignant vacataire au Celsa, une école de communication parisienne. "Au vu des témoignages et déclarations qui le mentionnent depuis le vendredi 8 février, nous l’avons informé que nous suspendions notre coopération jusqu’à ce que nous ayions pu éclaircir la situation", a annoncé l'école dans un communiqué, lundi.
Il s'est retiré de son poste
De son côté, Stephen des Aulnois, rédacteur en chef et fondateur du magazine en ligne de la culture pornographique Le Tag Parfait, a reconnu avoir participé au groupe "dont les actions répétées sont du harcèlement en ligne". Il a également présenté des excuses. "Ma faute est personnelle, mon silence et mon inaction pendant toutes ces années où je savais sont tout aussi coupables", affirme-t-il avant d'annoncer son retrait du poste de rédacteur en chef.
Le — Le Tag Parfait (@letagparfait) 11 février 2019
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