Plainte de Judith Godrèche : que dit la loi sur la prescription des faits reprochés ?

L'actrice a porté plainte contre les deux réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour "viol sur mineure" pour des faits qui remontent à la fin des années 80.
Article rédigé par Steven Gouaillier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Judith Godrèche au festival de Cannes en mai 2019. (LOIC VENANCE / AFP)

Elle en parle comme d'un "loup qui s'est déguisé en grand-mère dans Le Petit Chaperon rouge". Dans un entretien accordé à France Inter jeudi 8 février, Judith Godrèche a réitéré ses accusations contre Benoît Jacquot et les abus dont elle explique avoir été victime de la part du réalisateur, âgé de 39 ans lors de leur rencontre en 1986, alors que l'actrice venait d'avoir 14 ans.

Après son dépôt de plainte mardi auprès de la Brigade de protection des mineurs, le parquet a ouvert une enquête pour des infractions de viol sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité, viol, violences par concubin et agression sexuelle sur mineur de plus de 15 ans par personne ayant autorité, pour des faits qui s'étalent de 1986 à 1992.

L'actrice a également déposé plainte pour viol sur mineure contre un autre réalisateur, Jacques Doillon, pour des faits survenus lors du tournage de La fille de 15 ans, sorti en 1989. Judith Godrèche y raconte notamment comment "tout d'un coup, il décide qu'il y a une scène d'amour, une scène de sexe entre lui et moi (...) J'enlève mon pull, je suis torse nu, il me pelote, me roule des pelles". Benoît Jacquot comme Jacques Doillon nient ces accusations. Dans les deux cas, les faits dénoncés semblent prescrits.

Des règles durcies depuis les années 80

Aujourd'hui, pour une accusation de viol sur mineur, le délai de prescription prévu par la loi pour les crimes sexuels, c'est-à-dire le délai pendant lequel la victime peut saisir la justice, avait été porté par la loi du 3 août 2018 à 30 ans au lieu de 20. Contrairement aux plaintes pour viol sur une personne majeure, ce délai ne débute pas à la date de l'infraction mais bien à partir de la majorité de la victime.

Ainsi, comme l'indique le site service-public.fr, "la victime peut porter plainte jusqu'à ses 48 ans (âge de sa majorité + délai de prescription de 30 ans)". Si cette règle a aujourd'hui cours, la loi précise que "le délai de prescription de 30 ans ne s'applique pas aux infractions prescrites avant le 6 août 2018". Dans le cas de Judith Godrèche, l'actrice étant aujourd'hui âgée de 51 ans et les faits antérieurs à 2018, les accusations semblent davantage devoir relever des délais de prescription du code pénal établi avant 1994.

La "prescription glissante" en cas de nouvelle victime

En revanche, le délai de prescription peut être rallongé depuis le vote de la loi du 21 avril 2021, grâce à la "prescription glissante". Dans le cas d'un viol ou d'une agression sexuelle sur mineur, "si l'auteur (...) commet sur un autre mineur, avant l'expiration du délai de prescription, un nouveau viol ou une nouvelle agression sexuelle ou atteinte sexuelle. Dans ce cas, le délai de prescription du viol initial est prolongé jusqu'à la date de prescription de la nouvelle infraction". En d'autres termes, en cas de nouveau délit ou crime sexuel pendant le délai de prescription, la première victime peut bénéficier du délai accordé à la deuxième.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.