Des parents condamnés par le tribunal d’Amiens à huit et dix mois de prison avec sursis pour violences et insultes homophobes sur leur fils

La victime explique avoir subi des violences psychologiques et physiques après avoir dévoilé son homosexualité.
Article rédigé par franceinfo - Avec France Bleu Picardie
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Temps de lecture : 4min
Le palais de justice d'Amiens. (THOMAS SAMSON / AFP)

Des parents ont été condamnés vendredi 4 octobre par le tribunal d’Amiens (Somme) à huit et dix mois de prison avec sursis probatoire pour violences et insultes homophobes sur leur fils, a appris France Bleu Picardie. Lorsque le père de 42 ans et la mère de 44 ans ont appris l’orientation sexuelle de Lucas, leur fils, les insultes et les violences ont débuté au domicile de la famille, à Harbonnières.

Le 10 avril, les enquêteurs sont saisis après un signalement de l’assistante sociale du lycée. La victime explique subir des violences psychologiques et physiques depuis qu’il a dévoilé son homosexualité. À la maison, il entend aussi des propos homophobes : "C’est ce qui va lui arriver à ce pédé", en évoquant le VIH, ou encore : "Il est encore au téléphone avec sa tarlouze".

La mère a reconnu à la barre que "l’ambiance familiale était compliquée. Ce n’est pas l’homosexualité en soi qui était un sujet, même si c’est vrai que quand vous l’apprenez, on tombe de sa chaise, c’est plus le maquillage, les artifices autour". Lucas se maquille en effet, met des boucles d’oreilles. "On a essayé de lui expliquer les règles à la maison, sur le maquillage, se souvient la mère. Mais lui voulait se mettre en avant." "À 17 ans, il est dans une phase d’affirmation de lui-même, vous ne croyez pas ?", lui rétorque la présidente du tribunal.

"Je ne sais pas ce que j’ai fait pour que tu sois gay"

Son père "ne sait pas" expliquer ses propos. Mais dans un SMS adressé à son fils quand celui-ci lui a annoncé qu’il était gay, il a écrit : "C’est ce que je redoutais de pire dans la vie, j’ai honte de moi, je ne sais pas ce que j’ai fait pour que tu sois gay." À la barre, il finit par lâcher : "J’ai eu un garçon, c’est pour avoir un garçon, pas une fille."

Sur les violences physiques, il assure que "cela n’a rien à voir avec l’homosexualité", mais parce que Lucas venait de se disputer avec sa mère. "Est-ce que vous pensez que c’est facile, pour un adolescent dans cette société, de découvrir son homosexualité ?", interroge la procureure. "Encore plus dans une famille qui passe son temps à le dénigrer ? Est-ce que vous pouvez comprendre que Lucas traverse quelque chose de difficile ?" "Oui", répondent les parents. "Peut-être que plus que passer votre temps à le traiter de PD, de tafiole, de tarlouze, vous auriez pu lui parler ?"

Lucas déclare alors que "le côté féminin peut déranger : je me maquillais en partant, je me démaquillais avant de rentrer. Mon côté arrogant, c’était un moyen de défense, cela a été très compliqué mentalement. Je continue à avoir un suivi psychologique." Depuis, le fils a quitté la maison et coupé les ponts avec ses parents.

"L’appréciation de l’homosexualité au cours du temps, c’est quelque chose de fluctuant, estime Me David Dalmaz, avocat de la défense, On n'est pas dans le Marais, il y a une grande différence entre Harbonnières, Ham, Chaulnes, et la rue de Bretagne. L’homosexualité, c’est encore quelque chose de tabou, de hors norme." Le tribunal condamne finalement le couple à huit et dix mois de prison avec sursis probatoire, avec obligation de suivre des soins et de verser 1 500 euros de dommages et intérêts à Lucas.

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