"Le gouvernement prend acte", "une satisfaction", "un coup de force"... Les réactions politiques après la décision du Conseil constitutionnel sur la loi immigration

Le Conseil constitutionnel a censuré très largement la loi immigration, dont de nombreuses mesures de durcissement adoptées en décembre.
Article rédigé par franceinfo
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L'Assemblée nationale, le 11 décembre 2023. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Après avoir examiné 49 des 86 articles du projet de loi immigration, le Conseil constitutionnel a largement censuré le texte, dans une décision rendue publique jeudi 25 janvier. Dans le détail, 32 articles, soit plus du tiers du texte, font l'objet d'une censure totale ou partielle "comme 'cavaliers législatifs'", et trois autres articles sont censurés totalement ou partiellement sur le fond, selon la décision des Sages

Le gouvernement "prend acte"

"Le Conseil constitutionnel valide l'intégralité du texte du gouvernement", écrit sur X le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, alors que le Conseil constitutionnel a en grande partie rejeté les articles introduits par les sénateurs. "Le gouvernement prend acte, comme j'ai pu l'indiquer lors des débats, de la censure de nombreux articles ajoutés au Parlement, pour non-respect de la procédure parlementaire".

"Les articles du texte initial du gouvernement sont validés", écrit sur X l'ancien ministre du Travail, qui a participé à l'écriture de la loi immigration, Olivier Dussopt. "Je suis très heureux que toutes les mesures permettant l'intégration par le travail soient jugées conformes à la Constitution", termine-t-il.

"Une satisfaction" pour la majorité

"Nous avons des règles dans notre pays, nous avons des valeurs et c'est ce que nous a rappelé le Conseil constitutionnel. Donc il faut s'en féliciter", a réagi sur franceinfo le député Modem du Finistère Erwan Balanant. Par leur décision, les Sages ont dit "qu'en réalité on avait un texte initial du gouvernement qui était un texte d'équilibre et qui réglait un certain nombre de questions", estime Erwan Balanant, qui avait voté contre la loi. "Appliquons ce qui a été considéré comme conforme à notre Constitution", a réagi la député Renaissance des Hauts-de-Seine Constance Le Grip, à franceinfo depuis l'Assemblée nationale.

"Ce soir, pour l'essentiel, les principes sont saufs", salue sur X l'ancien ministre de la Santé Aurélien Rousseau, qui avait démissionné après le vote de la loi immigration.  "Un entrelacs entre la satisfaction de la décision rendue et une forme de colère sans doute", écrit-il. "L’édifice démocratique est fragilisé et les coups de boutoirs se feront toujours plus forts même si, ce soir, pour l’essentiel, les principes sont saufs"

Pour le rapporteur du texte, le député Renaissance Lionel Mendes, la version édulcorée du Conseil constitutionnel "satisfait un peu plus que ce qui est sorti de la commission mixte paritaire". "Le texte du gouvernement est resté tel quel, il est toujours présent et il n'a pas été censuré", poursuit-il sur France Culture.

Le Rassemblement national demande "un référendum"

"La seule solution, c'est le référendum sur l'immigration", affirme Jordan Bardella sur X, après la censure de nombreux articles de la loi immigration par le Conseil constitutionnel. "Par un coup de force des juges, avec le soutien du président de la République lui-même, le Conseil constitutionnel censure les mesures de fermeté les plus approuvées par les Français : la loi immigration est mort-né", écrit-il.

Marine Le Pen a estimé jeudi que "seule une réforme de la Constitution permettra de répondre aux enjeux migratoires", après que le Conseil constitutionnel a censuré une large partie du projet de loi immigration. "La rédaction en vigueur de la Constitution ainsi que la jurisprudence actuelle, ne permettent pas de protéger les Français de l'immigration incontrôlée", a jugé la cheffe de file des députés RN, invoquant les mesures censurées sur le fond par le Conseil. 

Le président du mouvement Reconquête Éric Zemmour, a déclaré sur X, "il ne restera rien d'autre dans cette loi que la régularisation de 10 000 clandestins de plus par an, sans compter le regroupement familial". Il ironise ensuite : "Merci Macron, merci Darmanin, merci Marine Le Pen et merci Eric Ciotti." La candidate Reconquête aux élections européennes du 9 juin, Marion Maréchal, déclare sur X que "ceux qui ont prétendu que cette loi réduirait l'immigration se sont bien moqués des Français. Le 9 juin sera un référendum : chaque bulletin Reconquête sera un bulletin contre l'immigration". 

"Une réforme constitutionnelle indispensable" et "un nouveau texte" nécessaire pour Les Républicains

"Le Conseil constitutionnel a censuré la loi immigration. Ils ont jugé en politique plutôt qu’en droit", a pour sa part dénoncé jeudi sur X le président des Républicains Éric Ciotti. "Cette censure était attendue par Emmanuel Macron et la gauche, poursuit-il. Une réforme constitutionnelle apparaît plus que jamais indispensable pour sauvegarder le destin de la France".

Le parti Les Républicains qui demande aussi un deuxième texte sur l'immigration. "Le Conseil Constitutionnel vient de censurer la voix des Français", estime le président du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau. Le Conseil constitutionnel "annule les mesures plébiscitées par les Français, sous le prétexte hautement discutable que ces mesures ne figuraient pas dans l’objet du projet de loi initial". Le patron des sénateurs LR demande au gouvernement "de soumettre d’urgence un nouveau texte qui permette de protéger vraiment les Français du chaos migratoire".

Dans un entretien au journal Le Parisien, Laurent Wauquiez, président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes a dénoncé jeudi "un coup d'Etat de droit", à propos du  Conseil constitutionnel. "Petit à petit, s'est installé ces dernières décennies dans notre pays un coup d'Etat de droit, dont cette décision du Conseil constitutionnel n'est qu'une des illustrations", affirme le possible candidat LR à la présidentielle de 2027. "Ce n'est pas l'Etat de droit qui est à l'oeuvre, mais une idéologie qui consiste à abattre toutes les formes d'autorité, celle de l'Etat en premier lieu", ajoute-t-il, estimant que le Parlement doit avoir "le dernier mot"

"Il y a un péché originel, c'est que le gouvernement n'a pas voulu exposer un projet sur l'immigration qui corresponde dès le départ aux attentes de nos concitoyens", dénonce Philippe Gosselin, député Les Républicains de la Manche, sur franceinfo. Il déplore "une forme de duplicité du président" qui "a mis son gouvernement en difficulté". "Ça va se payer tout ça, les élections européennes vont être un exutoire et je pense qu'il serait temps que le gouvernement respecte ses engagements", notamment sur l'Aide médicale d'État (AME), assène-t-il.

"Il y a eu tromperie sur la marchandise dès le départ par le gouvernement. En réalité, la partie de son texte sauvegardée ce n'est pas le grand projet immigration qu'attendent nos concitoyens."

Philippe Gosselin, député LR de la Manche

à franceinfo

La loi "doit être retirée", "une tache indélébile" et une "véritable leçon d'État de droit" pour la gauche

"Le Conseil constitutionnel vient de censurer plus du tiers de la loi immigration", écrit le coordinateur national de La France insoumise Manuel Bompard. "Il rappelle que les pires délires racistes de Macron et Le Pen sont contraires à nos principes républicains, poursuit-il. La loi est totalement amputée. Elle n’a aucune légitimité. Elle doit être retirée."

La présidente du groupe La France Insoumise à l'Assemblée nationale, Mathilde Panot a réagi sur X : "Énorme camouflet pour Macron-Darmanin-Le Pen". Elle pointe que "le Conseil constitutionnel censure 1/3 des articles de la loi et rappelle que la préférence nationale est incompatible avec notre République. Le racisme n’est pas constitutionnel." "Le verdict est tombé. Une bonne partie des articles ont été censurés et cette loi n'a pas de raison d'être promulguée, a pour sa part réagi la députée LFI Danièle Obono sur franceinfo. Il faut revenir à la raison. Il est heureux que les pires délires xénophobes et racistes ont été écartés du texte."

Le Premier secrétaire du Parti socialiste exprime sur le réseau social X sa "satisfaction après la décision du Conseil constitutionnel". Olivier Faure estime que "le gouvernement portera comme une tache indélébile l'appel à voter une loi s'alignant sur les positions historiques de l'extrême droite sous la pression de LR"

"Les Sages ont fait preuve de sagesse et ils ont démontré que nous avions au gouvernement 'Les sous-doués font la loi'", a réagi sur franceinfo Benjamin Lucas, député Nupes des Yvelines, membre de Génération.s. Le député salue "une victoire juridique", même si cela "n'efface pas ce qu'était la déchéance morale de ce gouvernement le 19 décembre", jour de la validation de la loi.

"Les fondamentaux de notre République rappelés à Macron et son gouvernement", a réagi la secrétaire nationale d'EELV Marine Tondelier. La censure de "l'infâme loi immigration" est une "véritable leçon d'État de droit envoyée par le Conseil", estime Marine Tondelier. "Le Conseil constitutionnel a rappelé les fondamentaux de notre République", réagit la députée EELV Sandrine Rousseau qui fait part de son "soulagement" : "Plus de préférence nationale, de quotas, de caution étudiante ou de réforme du regroupement familial."

Cette censure d'une grande partie de la loi immigration est une "baffe monumentale pour le gouvernement", estime le sénateur communiste de Paris Ian Brossat, sur X. "La démonstration de leur incompétence, de leur lâcheté, et de leur rupture avec les valeurs de notre République. Quand on joue avec le feu, on se brûle", ajoute-t-il.

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