Cet article date de plus de sept ans.

Info franceinfo Réduction du débit d'eau : Veolia et la Saur à nouveau condamnées

Veolia et la Saur ont été condamnées à verser 4 000 et 9 000 euros aux victimes, selon des informations révélées par franceinfo, mardi matin, pour avoir réduit le débit d'eau à des personnes en situation d'impayée.

Article rédigé par franceinfo - Farida Nouar
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Veolia et la Saur devront verser respectivement 4 000 et 9 000 euros aux victimes, a révélé franceinfo le 5 septembre 2017. (MAXPPP)

Veolia et la Saur ont été condamnées cet été pour avoir réduit le débit d'alimentation en eau dans deux foyers suite à des impayés. Selon les informations révélées par franceinfo, mardi 5 septembre, les deux entreprises de l'eau devront verser respectivement 4 000 et 9 000 euros aux victimes.

Deux cas, une même méthode

Le 13 juin dernier, Veolia s'est ainsi vu condamnée par le tribunal d'instance de Lens à verser 4 000 euros de dommages et intérêts à un habitant d'Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais. Au RSA, l'homme n'était plus capable de payer ses factures. En février, Veolia décide donc de réduire son débit d'eau par lentillage, la pose d'une lentille réduisant le diamètre du branchement de l'alimentation en eau. Ce n'est qu'au mois de mai, après 88 jours sans réel accès à l'eau, que l'homme a pu récupérer son débit normal.

C'est par le même procédé que la Saur a réduit le débit chez une habitante de Perpignan, dans les Pyrénées-Orientales qui a vécu pendant 15 mois avec un filet d'eau à son robinet. Au RSA, la dame de 56 ans était dans l'incapacité de régler ses factures. Malgré l'effacement de sa dette proposée par la commission de surendettement, la Saur a procédé au lentillage dès le mois de février 2016. Le tribunal de grande instance de Nanterre a condamné la Saur le 17 août à verser 9 000 euros à la Perpignanaise.

"Impact évident sur la dignité"

Soutenues par la Fondation France Libertés et la Coordination eau Île-de-France, les deux personnes ont obtenu gain de cause auprès des tribunaux. Le tribunal d'instance de Lens a ainsi rappelé que la réduction de débit d'eau "empêchant un usage normal de l’installation, est assimilable à l’interruption de la fourniture d’eau".  Un débit d'eau réduit, c'est n'avoir qu'un filet d'eau pour les besoins quotidiens. Impossible donc de se doucher, de faire fonctionner correctement une machine à laver ou encore les toilettes.

"L’eau, c’est la vie", témoigne l'habitant d'Hénin-Beaumont auprès de France Libertés. "Quand on vous coupe l’eau, cela a des répercussions sur toute votre vie sociale. Je ne voyais plus personne,  je ne pouvais plus manger correctement. Ça m’a détruit la santé et j’ai dû me couper de ma famille, que j’avais trop honte d’inviter chez moi." Dans leurs ordonnances, les juges soulignent "l'impact évident sur la dignité de la personne et les répercussions morales."

Des sommes "ridicules"

Interrogé par franceinfo, Emmanuel Poilane, le directeur de France Libertés, estime que, si ces condamnations sont fortes, les sommes sont "ridicules" car les entreprises de l'eau peuvent payer "sans problème" sans remettre en question le modèle de l'entreprise. Les associations attendent une vraie prise de conscience des sociétés de l'eau et en appellent au législateur. "Pourquoi notre loi française ne permet pas, à l'instar du Canada, de pouvoir attaquer directement une multinationale pour pratiques illégales répétées", s'interroge Emmanuel Poilane qui a déjà fait condamner à plusieurs reprises la Saur et Veolia.

Depuis septembre 2014, France Libertés et la Coordination eau Île-de-France ont fait condamner Veolia dix fois pour des coupures ou des réductions de débit d'eau, et la Saur quatre fois. Mais ces entreprises "s'en fichent", ajoute le directeur de France Libertés car elles savent "qu'on ne peut pas porter plainte pour pratiques illégales. On est obligé de trouver des cas précis et de porter plainte pour chaque cas."

Les associations rappellent que les coupures d'eau sont illégales depuis la loi Brottes de 2013. Et le Conseil constitutionnel a donné à ce droit à l'eau une valeur constitutionnelle le 29 mai 2015. Elles entendent continuer à "multiplier leurs actions" et à aider les familles victimes de réduction et débit d'eau.

"Des condamnations fortes mais des sommes ridicules", estime Emmanuel Poilane, directeur de France Libertés

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.