Arabie Saoudite : des centres pour réinsérer les anciens islamistes
Sous ses faux airs de garçon rangé, Khaled Al-Jehani est un ancien terroriste membre d'Al-Qaïda. Aujourd'hui repenti, ce Saoudien de 38 ans est passé par le centre de réhabilitation à Thoumama dans la banlieue de Riyad – la capitale de l'Arabie Saoudite. Ce centre, qui a pour objectif de réinsérer les anciens islamistes, est le premier à avoir été créé en 2006.
C'est ici que des centaines de terroristes sont passés pour changer radicalement de vie. Au bout d'une semaine passée dans le centre, Khaled s'est rendu compte qu'il pouvait devenir quelqu'un de bien et commencer une nouvelle vie :
"Le centre m'a montré que du point de vue religieux, du point de vue de la société, nos agissements étaient mauvais. Et toute personne qui a commis ce genre d'actes en Afghanistan sait qu'elle a commis de mauvaises choses mais quand on en arrive là, on peut difficilement revenir en arrière."
Khaled Al-Jehani a un passif de djihadiste très lourd. Dès l'âge de 17 ans, il part en Bosnie sauver, dit-il, la cause des musulmans. Ensuite il effectue un bref séjour aux Philippines puis il rejoint les camps d'Al-Qaïda en Afghanistan. Spécialiste en électronique, il était chargé de fabriquer des télécommandes à distance pour des bombes. Il avoue que les soldats qu'il a formés ont tué des milliers d'innocents.
Khaled Al-Jehani a été arrêté à Peshawar au Pakistan. Il a ensuite été transféré à Guantanamo où il passera cinq ans. Ce sont les Saoudiens qui l'ont rapatrié jusqu'au centre de réhabilitation à Riyad.
Une prison cinq étoiles
Si l'extérieur ressemble à une prison, l'intérieur a des airs de village de vacances. Des enseignants y dispensent des cours de langue, d'informatique et surtout de religion. Khaled Al-Jehani reconnaît que ce centre lui a sauvé la vie. Avec du recul, et parce qu'il s'en est sorti, il souhaiterait que d'autres terroristes bénéficient de ce même programme de réinsertion :
"J'espère qu'ils se feront arrêter en amont. C'est peut-être ça qui va les aider. On doit prouver au monde entier, aux musulmans et aux Saoudiens que nous avons ce genre de programme. Et j'en suis le parfait exemple. Il y a beaucoup d'hommes qui sortent de ce centre et qui commencent une nouvelle vie ! Moi-même, j'aurais été stupide si je n'avais pas saisi cette chance. Vraiment, c'est la chance d'une vie !"
La lutte contre l'islamisme radical, priorité nationale
Pour les autorités saoudiennes, la lutte contre l'islamisme radical est une priorité nationale. C'est ce qu'explique le général Mansour Al-Turki porte-parole du ministère saoudien de l'Intérieur :
"Ce programme est fait pour combattre Al-Qaïda à la racine. Pas pour combattre directement Al-Qaïda ou ses membres, ça s'est le travail des forces de sécurité. Alors comment pouvons-nous combattre cette idéologie ? On ne peut pas arrêter les terroristes, les prendre, les emmener de force à moins que leur famille ne signale leur cas et nous disent 'nous remarquons un comportement suspect'. Ca nous permet d'approcher de manière indirecte ce genre de personnes. Et c'est pourquoi le programme ne s'inscrit pas que derrière les murs du centre."
Les centres de réhabilitation ne sont donc pas prêts d'être arrêtés, au contraire. Les autorités saoudiennes en ont construit un autre, flambant neuf dans le quartier de Khoreis, dans la banlieue de Riyad. On y trouve une salle de billard, une piscine, une salle de gym. Des conditions de vie plutôt agréables, dignes d'un club de loisirs ou de vacances.
Trois autres centres sont actuellement en construction dans le royaume. La liste d'attente pour intégrer ces centres est longue. Plus de 3.000 islamistes sont actuellement prisonniers en Arabie Saoudite. Pour être libérés, ils doivent obligatoirement passer par l'un de ces centres. Mais rien ne prouve que ce programme réussira à éradiquer le terrorisme et l'extrémisme.
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