Regrouper les détenus radicalisés, une expérience concluante ?
"Avant la fin de l'année [...] la surveillance des détenus considérés comme radicalisés sera organisée dans des quartiers spécifiques créés au sein d'établissements pénitentiaires ", a assuré ce mardi Manuel Valls, au cours des 45 minutes du discours qu'il a tenu devant les députés. Le Premier ministre souhaite répondre, en urgence, au phénomène inquiétant de radicalisation dans les prisons françaises, en réponse aux attentats de Paris la semaine dernière.
L'idée renvoie en fait à l'expérience menée depuis la mi-octobre au centre pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne), et qui concerne actuellement 22 détenus, isolés du reste de la population carcérale. Ils sont regroupés dans une aile abritant des détenus dits médiatiques, comme des journalistes, policiers, douaniers... Une initiative pas forcément vue du bon oeil par la Garde des Sceaux elle-même. Christiane Taubira se disait en effet "extrêmement réservée ", fin novembre sur France Info. L'isolement n'est en fait pas total, car ces détenus radicalisés continuent à participer aux activités.
Un regroupement qui pose question
Si certains voient dans cette expérience une bonne idée, à mûrir pour renforcer la lutte contre la radicalisation en prison, d'autres sont franchement hostiles. Certes, c'est peut-être mieux que disséminer les détenus considérés comme radicaux dans plusieurs prisons - avec le risque d'un prosélytisme accru -, mais cela peut aussi renforcer les liens entre les détenus. Difficile dès lors de désendoctriner des individus convaincus de ce qu'ils prêchent.
Autre danger, plus pernicieux peut-être, celui soulevé par d'autres syndicats pénitentiaires : que ce groupe de détenus radicalisés devienne un "objectif" pour les autres détenus. En clair, que d'autres détenus désirent intégrer ce groupe isolé pour bénéficier, pourquoi pas, de plus de "calme" dans la détention. Le sujet est en tout cas compliqué à aborder, protéiforme. Manuel Valls, lors de son discours, a également évoqué la nécessité de professionnaliser la tâche d'aumônier. Et là, on le sait, les prisons françaises manquent cruellement d'aumôniers musulmans.
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