"Thérapies de conversion" : les victimes "ne peuvent toujours pas déposer plainte", déplore la députée Laurence Vanceunebrock-Mialon
"Il y a sur notre territoire des victimes de ce genre de pratiques, pour certaines moyenâgeuses", affirme sur franceinfo la députée La République en marche de l'Allier.
À l'occasion de la journée internationale contre l'homophobie, la transphobie et la biphobie, la députée La République en marche de l'Allier, Laurence Vanceunebrock-Mialon, déplore lundi 17 mai sur franceinfo que "les victimes des thérapies de conversion ne peuvent toujours pas déposer plainte" pour ce motif, car sa proposition de loi, déposée en juin 2020 pour punir pénalement les thérapies de conversion, n'a pas encore été adoptée ni même discutée devant le Parlement.
franceinfo : Est-ce difficile de quantifier les "thérapies de conversion" en France, en l'absence d'une infraction pénale spécifique ?
Laurence Vanceunebrock-Mialon : C'est d'autant plus difficile que, si beaucoup disent que tout est prévu dans le code pénal pour prévenir et réprimer ces thérapies de conversion en citant par exemple les violences volontaires ou encore l'abus de confiance ou le harcèlement, en l'occurrence, les victimes des thérapies de conversion ne peuvent toujours pas déposer plainte pour le motif de thérapies de conversion. Donc elles ne rentrent pas dans les statistiques puisque chaque infraction inscrite dans le code pénal a sa propre identification par un code "Natinf" (pour "nature de l'infraction"). Le problème, c'est qu'il est impossible de quantifier réellement la problématique sur le territoire national, tout en sachant grâce à la mission d'information que j'ai pu mener l'année dernière avec Bastien Lachaud, député La France insoumise de la Seine-Saint-Denis, qu'effectivement il y a sur notre territoire des victimes de ce genre de pratiques, pour certaines moyenâgeuses.
"On a reçu plusieurs témoignages, en lien avec la religion mais également avec le monde médical."
Laurence Vanceunebrock-Mialon, députée LREM de l'Allierà franceinfo
Il y a une ou deux cliniques dans le sud de la France, vers Montpellier, qui, jusqu'à il n'y a pas très longtemps, pratiquaient la sismothérapie, c'est-à-dire les électrochocs, donc on voit bien comment sont maltraitées les victimes de thérapies de conversion.
Que peut-on faire contre ces "thérapies" aujourd'hui ?
J'ai coutume de dire que disperser ou dissoudre ce genre de groupes rend plus difficile ensuite le fait de vouloir les suivre, de vérifier, de contrôler leurs actions. Ça se rapproche des problèmes en lien avec les stupéfiants. Quand vous cassez un groupe dans une cité qui vend des stupéfiants, ses membres vont s'installer ailleurs. Ce n'est pas forcément la meilleure solution si on veut continuer à faire une observation de ce genre de groupuscules, l'idéal étant plutôt d'indiquer aux familles – qui sont les premiers vecteurs de thérapies de conversion – qu'elles sont interdites, qu'elles sont réprimées et qu'elles sont surtout très nocives pour leurs jeunes enfants parce que certains témoins, au moment des faits, étaient mineurs et c'est vraiment troublant et regrettable. Ce sont souvent des familles très croyantes, pratiquantes. Les enfants d'ailleurs sont également croyants et pratiquants et donc suivent les yeux fermés leurs parents dans ce cheminement et finalement se retrouvent devant un prêtre, un imam ou un rabbin très peu scrupuleux et qui pratique par exemple des séances d'exorcisme qui sont dévastatrices.
Aujourd'hui, ces victimes ne sont pas prises en compte ?
Non. Elles ne peuvent pas être prises en compte puisque, quand elles vont déposer plainte – si elles y vont parce que bien souvent on leur propose de déposer une main courante qui n'a aucun effet judiciaire – et quand une plainte est prise, c'est souvent en lien avec d'autres infractions, qui effectivement sanctionnent malgré tout les auteurs de ces faits mais ne sont jamais jamais jamais reconnues comme des victimes de thérapies de conversion puisque cette infraction n'existe pas.
Souhaitez-vous que l'infraction soit inscrite dans la loi avant la fin du quinquennat ? Que vous répond le gouvernement ?
Il le faudrait. Le gouvernement nous répond qu'il y a toujours des textes plus importants, qu'il y a, je ne peux pas le nier, des crises importantes comme celles des "gilets jaunes" ou du Covid-19 que nous traversons encore actuellement. Il y a toujours un texte plus urgent, plus pressé, plus important, qui touche un plus grand nombre de victimes. Moi, je considère qu'à partir du moment où il y a ne serait-ce qu'une seule victime par an, ça vaut la peine de créer un délit spécifique pour lutter contre ce fléau.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.