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Deux femmes radicalisées condamnées à sept mois de prison pour des menaces de mort à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis

Le tribunal correctionnel d'Évry a condamné jeudi deux jeunes mères à sept mois de prison ferme. Radicalisées et en détention provisoire à la prison de Fleury-Mérogis, elles ont insulté et menacé de mort des co-détenues et des surveillantes.

Article rédigé par Sophie Parmentier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La prison de Fleury-Mérogis (Essonne) en 2012 (photo d'illustration) (LOISY FLORIAN / MAXPPP)

C’est un procès peu courant qui a eu lieu jeudi 12 janvier devant le tribunal correctionnel d’Évry (Essonne). Deux jeunes femmes impliquées dans des affaires de filière terroriste ont comparu pour les menaces de mort qu’elles sont accusées d’avoir proférées en prison à l’encontre de co-détenues et de surveillantes. Pour ces menaces, elles ont été condamnées à sept mois de prison ferme, en attendant leur autre procès pour association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste.

L’une se prénomme Nadia. Elle a 35 ans, un joli visage, des yeux bruns écarquillés. Elle a enfilé un gilet de laine sur ses frêles épaules, ne porte pas de voile sur ses longs cheveux noirs bouclés. En détention à la prison de Fleury-Mérogis, le voile est interdit. Cela fait deux mois que Nadia est à l’isolement, sans son bébé de cinq mois, qui lui a été retiré et a été placé. "On craignait qu’elle ne se suicide avec son enfant", explique un représentant de l’administration pénitentiaire, l’une des parties civiles dans cette affaire sensible.

Insultes, gifles et menaces de mort au nom d'Allah

Nadia proteste. Elle est une boule de nerfs face aux juges et a bien du mal à contenir ses rires et ses larmes. Vanessa, 29 ans, cheveux châtains, yeux gris, tenue sport, paraît beaucoup plus calme. L’administration pénitentiaire ne l’a pas séparée de son bébé. Elle vit désormais confinée avec lui, dans sa cellule de la nurserie de Fleury-Mérogis, où les menaces de mort ont été proférées entre le 31 octobre et le 14 novembre 2016.

La présidente du tribunal correctionnel d’Evry égrène les accusations : une gifle sur une co-détenue, un doigt tordu et des menaces de tuer des détenues, des surveillantes et leurs familles au nom d’Allah. Elle détaille quelques menaces : "Elle va voir comment je vais lui arracher sa tête avec les dents" ou encore "Qu’Allah vous anéantisse".

Mécréantes ! Kouffardes !

insultes que Nadia et Vanessa auraient proférées

à la prison de Fleury-Mérogis

Les accusées nient et se défendent. À propos de la co-détenue giflée, qui était enceinte de six mois, Vanessa se justifie : "Elle avait fumé dans le réfectoire devant mon bébé, et ce n'était pas une vraie gifle que j’ai donnée." À propos d’une autre co-détenue menacée : "J’ai commencé à en avoir marre qu’elle me raconte ses ébats sexuels, j’en ai rien à foutre de ses positions." La présidente s’étonne : "Vous n’aviez jamais parlé de ça avant ?" Vanessa : "Faut bien que je prépare ma défense tout de même !" Nadia renchérit : "Je ne suis pas partisane des insultes, je ne parle pas comme ça."

La présidente note que Nadia a déjà dans son casier judiciaire une condamnation à six mois de prison avec sursis pour rébellion sur personne dépositaire de l’autorité publique. La détenue insiste : "Mon frère, il est à l’armée. Et ma sœur, elle prépare Sciences Po. Je suis pas une terroriste !" Nadia explique qu’elle est victime d’un complot. Un psychologue a récemment noté qu’elle avait un "vécu persécutif", une "psychose carcérale". Le psychologue estime qu’il faudrait "qu’elle ait de nouveau des contacts avec son fils", indique la présidente du tribunal.

Les avocats dénoncent une sévérité "disproportionnée"

À sa droite, la procureure prononce un réquisitoire sans concession. "Vous avez semé la terreur dans la nurserie", lance-t-elle aux deux détenues jugées pour les menaces proférées. Deux détenues qui ne se connaissaient pas avant d’arriver en prison et qui ne sont pas impliquées dans les mêmes dossiers terroristes, toujours à l’instruction.

"La République et le vivre-ensemble ne s’arrêtent pas aux portes de la prison", martèle la procureure. Elle réclame donc leur maintien en détention.

La République n’a pas peur. La justice n’a pas peur de vous.

la procureure

au tribunal correctionnel d'Évry

Après un rapide délibéré, la condamnation tombe. Sept mois de prison pour ces menaces proférées à la nurserie de Fleury-Mérogis. Me Keïta et Me Carruso, avocats de la défense, dénoncent un procès "inéquitable" et une sévérité "disproportionnée", uniquement régie par la peur dans le contexte de menace terroriste. Ils envisagent de faire appel.

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