Limitation à 80 km/h, sanction des salariés : les mesures polémiques envisagées par la Sécurité routière
Pour passer sous le seuil de 2 000 morts par an sur les routes d'ici 2020, la Sécurité routière réclame des mesures fermes, qui ne font pas l'unanimité.
L'objectif est ambitieux : passer de près de 3 400 tués sur les routes en 2014 à moins de 2 000 d'ici 2020. Mais, pour y arriver, les solutions envisagées divisent. Si l'abaissement du taux légal d'alcool dans le sang à 0,2g/l pour les jeunes conducteurs fait plutôt l'unanimité, tout comme l'interdiction totale des kits mains libres, d'autres mesures défendues par le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) peinent à s'imposer.
La limitation à 80 km/h sur les routes expérimentée
La mesure. Bernard Cazeneuve a annoncé lundi les trois tronçons de routes où sera expérimentée la limitation de vitesse à 80 km/h. Il s'agit des routes nationales RN 7 dans la Drôme, RN 151 dans l'Yonne et RN 57 en Haute-Saône. Le projet est vivement débattu depuis onze mois. Le ministre de l'Intérieur ne voulait pas entendre parler jusqu'à présent, ou seulement "de manière expérimentale et sur des segments très accidentogènes".
La polémique. Les partisans du passage à 80 km/h sur l'ensemble des routes secondaires fustigent le "manque de courage" du ministre pour une mesure "de rupture", certes impopulaire, mais qui permettrait, selon eux, de sauver 400 vies par an. "Quelques dizaines de kilomètres, ce n'est même plus une expérimentation, c'est une observation", raille la présidente de la Ligue contre la violence routière, Chantal Perrichon, partisane du 80 km/h et une des critiques les plus virulentes contre le ministre. "Ils ont pris le temps de trouver des endroits où l'expérimentation sera crédible, mais pas trop concluante", glisse un autre membre du CNSR.
"Le climat s'est extrêmement tendu parce qu'il y a quelques aigris qui se sont mis dans la tête d'imposer le 80 km/h", estime de son côté le délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes, Pierre Chasseray, en rappelant des sondages faisant état de 80% des Français opposés à cette mesure.
Les conducteurs de voiture d'entreprise sanctionnés ?
La mesure. Les voitures de société représentent 10 à 15% des véhicules flashés en France, mais la plupart des conducteurs ne règlent pas d'amende (payée par l'entreprise) et ne perdent aucun point. Le Conseil national de la sécurité routière souhaite en finir avec cette faille, qui permet à une catégorie d'automobilistes d'échapper à leur sanction.
Le CNSR veut "faciliter l'identification du conducteur lorsqu'une infraction est relevée" par les radars (vitesse, feu rouge, passage à niveaux). Il préconise notamment "l'obligation, assortie d'une sanction dissuasive, pour les personnes morales d'assurer la traçabilité temporelle des conducteurs sur leur parc de véhicules". Autrement dit, les employeurs devraient tenir un registre indiquant l'identité du salarié qui utilise un de ses véhicules.
La polémique. La mise en œuvre juridique de cette intention risque de se heurter au droit français puisque, légalement, rien ne peut obliger quiconque à dénoncer l'auteur d'une infraction. En outre, l'employeur de l'auteur de l'infraction pourrait aussi le désigner, mais il ne le fait généralement pas, de peur qu'à terme il ne perde son permis et ne puisse plus travailler ou ne travaille sans permis.
Les radars double face déployés en 2016
La mesure. Pour mieux identifier les conducteurs, de nouveaux types de radars sont déjà testés. Des radars double face, qui photographient les véhicules de face, mais aussi par l'arrière. Cette deuxième photo peut permettre de prendre les plaques des motos et également de vérifier sur les camions, car la plaque n'est pas la même sur la cabine et la remorque.
La polémique. L'association 40 millions d'automobilistes dénonce ce type de dispositif, qui "ne servirait qu'à renflouer une fois de plus les caisses de l'Etat". "Si la Sécurité routière voulait réellement réduire le nombre de décès sur les routes, elle se pencherait davantage sur les premières causes de mortalité, qui sont l'alcoolémie et la somnolence au volant", dénonce l'association dans un communiqué.
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