Coupe du monde de rugby : de la Namibie à l'Afrique du Sud, les trois semaines pendant lesquelles Antoine Dupont a brillé par son absence
Il aura donc fallu attendre 24 jours. Un délai extrêmement court pour certains, interminable pour d'autres. Antoine Dupont va retrouver le XV de France, dimanche 15 octobre face à l'Afrique du Sud, un peu plus de trois semaines après sa blessure à la mâchoire face à la Namibie, le 21 septembre dernier. "La convalescence s'était bien passée. J'ai eu la chance de bénéficier de plusieurs semaines pour retrouver tous mes moyens physiques et techniques pour être prêt pour ce match", s'est réjoui le Toulousain, vendredi 13 octobre, lors de l'annonce de la composition d'équipe.
Le soir du 21 septembre, le cri de stupeur du stade Vélodrome de Marseille, lors du ralenti du plaquage à la tête par Johan Deysel, avait donné le ton de la violence du choc.
Après sa sortie immédiate du terrain, les premières heures furent aux interrogations. Les médias présents en conférence de presse d'après-match même ont assailli Fabien Galthié de questions, laissant une nuit de doute planer sur le XV de France. Le lendemain, le couperet est tombé : fracture de la mâchoire, maxillo-zygomatique en jargon médical. S'en est alors suivie une période de questions, notamment sur la durée de l'absence de la star française. Certains esquissaient la possibilité de le revoir en quarts de finale, mais la plupart des experts interrogés voyaient sa compétition terminée. L'heure n'était pas à l'optimisme compte tenu de l'historique habituel de guérison d'une telle blessure.
Un compte à rebours lancé vers le quart de finale
"Touché mais pas coulé." Voilà ce qu'avait annoncé en réponse Antoine Dupont sur ses réseaux sociaux le lendemain de l'opération, sa seule communication officielle jusqu'à vendredi. Et quelle communication : son message a été "aimé" plus de 128 000 fois sur X (ex-Twitter), signe de sa dimension actuelle dans la sphère ovale, mais aussi nouvelle dans le cœur du public français. Le prodige, qui a débuté à Auch avec Anthony Jelonch, devait encore passer dans une nouvelle dimension pour ce Mondial à domicile. S'il a rayonné sur le terrain, il a ensuite brillé par son absence.
Reparti chez lui se reposer dans la région toulousaine, Dupont a coupé avec la compétition pendant dix jours. Et l'espoir d'un retour a rejailli par étincelles. Shaun Edwards, l'entraîneur de la défense du XV de France, avait allumé la première mèche : "Si nous atteignons ces phases finales, je serais très surpris qu'Antoine ne soit pas disponible pour les quarts ou les demi-finales", avait-il avancé dans sa chronique hebdomadaire du Daily Mail. Le lendemain, la FFR avait embrayé : "D’ici quelques jours, Antoine Dupont va ainsi pouvoir revenir au sein de l’équipe de France dans un processus de reprise sportive progressive et sous contrôle médical", avait-elle acté dans un communiqué.
Un feuilleton quotidien
William Servat, l'entraîneur des avants du XV de France, s'était même un peu emballé trois jours plus tard, le 26 septembre, ouvrant non seulement la perspective d'un retour en quarts, mais aussi, pourquoi pas, lors du dernier match de poules contre l'Italie le 6 octobre, deux semaines seulement après sa blessure. "Je n'ai pas forcément trop de doutes sur sa capacité à jouer [l'éventuel] quart de finale. C'est plutôt le match de l'Italie qui m'interroge", avait-il lancé.
Finalement, le 28 septembre, le manager santé des Bleus avait fait retomber le soufflé, parole médicale oblige. "Il évolue très favorablement. Je ne pense pas qu'on puisse le voir contre l'Italie, j'en suis convaincu. On ne se projette pas au-delà de la semaine prochaine. Pour le quart de finale ? On ne peut pas encore se poser cette question. Il y a tellement de choses à valider", avait-il évacué en conférence de presse.
A une semaine du match décisif face à l'Italie, la perspective de le voir revenir dans ce "huitième de finale" pour la qualification était presque enterrée, et confirmée par l'annonce de la composition, mercredi 4 octobre : pas d'Antoine Dupont, remplacé par Maxime Lucu.
Entre-temps, le demi de mêlée du Stade Toulousain, qui n'a jamais été aussi indispensable au XV de France, avait repris l'entraînement individuel, observant de loin ses coéquipiers, œil au beurre noir comme seule séquelle visible de sa blessure. Pour valider sa présence face à l'Afrique du Sud, il ne lui manquait alors que deux feux verts : celui de son chirurgien à Toulouse, puis celui du XV de France, ensuite.
Le premier a donné son aval lundi, et ça n'a pas traîné : dès le lendemain, Antoine Dupont était de retour à l'entraînement collectif. "Aujourd'hui, on s'est entraîné avec une intensité modérée, on va monter le curseur ensuite (...) Le but, c'était surtout de se reconnecter avec l'équipe. S'il est sur le terrain, c'est qu'il est à 100%", avait affirmé le jour même Laurent Labit, l'entraîneur de l'attaque.
Casque vissé sur la tête, tampon à Matthieu Jalibert : "Toto" est revenu comme s'il n'était jamais parti. La longue attente a donc pris fin en début de semaine. Proche de son épilogue, la saga Dupont n'offrait guère de doute sur sa présence face aux colossaux Springboks, dimanche. A commencer par l'entraîneur de la défense Shaun Edwards. "Il n’a pas perdu de poids, il n’y a pas un gramme de graisse sur lui. Compte tenu de son niveau, je le soutiendrai pour qu’il soit directement intégré à l’équipe. C’est un leader. Nous sommes confiants sur le fait qu'il pourra jouer face aux Springboks", avait-il soutenu dans le Daily Mail le 9 octobre, à six jours du match.
"Il est à 100% de ses capacités et il n'y a aucune raison de chambouler quoi que ce soit", avait confirmé William Servat le lendemain. La veille de la composition, Cobus Reinach, le demi de mêlée de l'Afrique du Sud titularisé pour le quart de finale, lançait : "On n’a pas beaucoup évoqué entre nous la question de savoir s’il allait jouer ou non. C’est un joueur phénoménal. Chaque fois qu’il joue, c’est comme si on repassait les meilleurs moments d’un match magique."
Lors de l'annonce de sa titularisation, vendredi 13 octobre, Fabien Galthié a assuré : "On n'a rien forcé, on a géré sa blessure avec sérénité car on avait le temps". Antoine Dupont est allé dans le même sens : "Je n'ai pas ressenti de pression de la part du staff, on a respecté les délais. Si je joue aujourd'hui, c'est que je me sens bien et que le médical a validé toutes les étapes." Ce moment a parachevé son retour autant qu'il a refermé cette longue période d'incertitude pour le joueur, le XV de France, les supporters, mais aussi leurs adversaires, les Sud-Africains. Car eux non plus n'ont sans doute pas raté une miette de cet interminable feuilleton.
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