La France est-elle préparée à un éventuel accident nucléaire ?
Un rapport confidentiel de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire publié par le JDD, indique qu'un accident pourrait coûter jusqu'à 5 800 milliards d'euros.
De 760 milliards d'euros pour un "cas de base" à 5 800 milliards d'euros. Voilà ce que pourrait coûter un accident nucléaire majeur dans l'Hexagone, selon un rapport confidentiel de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) publié dimanche 10 mars par le Journal du dimanche.
A l'approche du deuxième anniversaire de la catastrophe de Fukushima, au Japon, la question du coût et de la préparation à un éventuel accident a suscité la polémique.
Le JDD publie une estimation du coût
Dans une étude rendue publique il y a un mois, l'IRSN avait évalué le coût d'un accident nucléaire similaire à celui survenu en mars 2011 à Fukushima à environ 430 milliards d'euros. L'estimation de 760 milliards correspondrait en revanche plus au modèle de la catastrophe de Tchernobyl, où les rejets avaient été plus nombreux, explique au JDD l'économiste Patrick Momal, qui a travaillé sur les deux rapports.
Selon l'hebdomadaire, la facture pourrait même s'élever jusqu'à 5 800 milliards d'euros, soit trois années de PIB, dans le pire des scénarios nécessitant l'évacuation de 5 millions de personnes. Le rapport confidentiel, réalisé en 2007, est en cours de réévaluation et pourrait être rendu public cette année. Il est basé sur l'évaluation de plusieurs scénarios catastrophes sur la centrale de Dampierre, dans le Loiret.
Le plus lourd tribut découlerait dans ce cas de l'impact économique sur la zone contaminée au césium où habitent 90 millions de personnes, avec des coûts environnementaux et de santé explosant à 4 400 milliards d'euros.
Les experts nuancent les résultats de leurs travaux
Dans un communiqué publié dimanche, l'IRSN affirme que le chiffre de 5 800 milliards d'euros est "fort peu réaliste". L'objectif principal de ce rapport "était d'établir une analyse de sensibilité des conséquences économiques par rapport à différentes situations analysées, et non d'obtenir un coût réaliste d'un accident nucléaire majeur", explique l'IRSN. Le chiffre de 5800 milliards d'euros correspond à une analyse "à la fois majorante et rudimentaire", s'appuyant sur des "hypothèses et des outils très simplifiés pour le transfert des rejets dans l'atmosphère", poursuit l'institut.
"Nous avions à l'époque utilisé un code rudimentaire ne prévoyant qu'une seule météo, celle prévalant au site de l'accident", a précisé à l'AFP l'économiste Patrick Momal, auteur du rapport qui n'a jamais été publié."La météo extrême prévue dans l'étude de 2007 n'est pas réaliste", a-t-il ajouté.
Les députés EELV demandent un fonds en cas d'accident
Les députés écologistes ont fait savoir dans un communiqué distinct qu'ils déposeront mardi une proposition de résolution (PPR) à l'Assemblée nationale demandant la "transparence sur ces études, un complément des audits de sûreté des installations nucléaires prenant en compte les risques sous-estimés sous les gouvernements Sarkozy-Fillon et la mise en place d'une obligation d'assurance (ou de constitution d'un fonds provisionnant le coût d'un accident majeur) pour l'industrie nucléaire, et l'imputation de ce coût dans l'évaluation du coût réel du kWh nucléaire".
De sont coté, le secrétaire national d'Europe Ecologie - Les Verts, Pascal Durand, a réclamé"qu'un audit complémentaire indépendant et pluraliste soit réalisé au plus vite afin d'évaluer ces risques et les prévenir". "La France ne se relèverait pas d’un accident nucléaire. Nous demandons la constitution immédiate d’un fonds de provisionnement correspondant au coût d’un accident majeur, alimenté par l’industrie nucléaire", a-t-il réclamé.
Les anti-nucléaires se mobilisent
Quelque 600 personnes, dont une majorité d'Allemands, ont manifesté dimanche après-midi à Chalampé (Haut-Rhin), à la frontière franco-allemande, pour demander la fermeture immédiate de la centrale nucléaire toute proche de Fessenheim. La veille, des rassemblements ont été organisés en France et à l'étranger, notamment à l'initiative du réseau Sortir du nucléaire, à l'occasion du deuxième anniversaire de la catastrophe de Fukushima.
Selon un sondage Ifop pour Sud-Ouest Dimanche, publié le même jour, 42% des Français se disent inquiets à propos des centrales nucléaires de l'Hexagone.
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