Cannabis : Hollande et Ayrault recadrent Peillon
Le chef du gouvernement a reproché lundi matin au ministre de l'Education sa prise de position en faveur de la dépénalisation du cannabis. Le chef de l'Etat en a fait de même, selon Europe 1.
POLITIQUE – Le ministre de l'Education nationale, Vincent Peillon, a tenté de rouvrir une brèche sur la question de la dépénalisation du cannabis, dossier qui divise la gauche. Dimanche 14 octobre, il s'est prononcé pour un débat sur le sujet, défendant la dépénalisation comme moyen de lutter contre les trafics dans les cités. Il a aussitôt été recadré par Matignon et l'Elysée. Retour sur ce feuilleton express.
Acte 1 : Peillon pour la dépénalisation du cannabis
"C'est un sujet majeur", a déclaré, dimanche sur France Inter, le ministre de l'Education, deuxième ministre à s'exprimer sur la dépénalisation du cannabis, après Cécile Duflot en juin.
"Je vois maintenant quasiment tous les soirs sur nos chaînes de télévision des reportages pour montrer les trafics illicites de nos banlieues et le danger dans lequel vivent nos concitoyens, y compris les enfants." Et d'ajouter : "On peut lutter par les moyens de la répression – je suis absolument pour – mais en même temps, je vois que les résultats ne sont pas très efficaces."
Pour appuyer ses propos, Vincent Peillon a rappelé la position de l'ancien ministre socialiste de l'Intérieur Daniel Vaillant. Ce dernier a rouvert le débat début octobre en proposant notamment une légalisation du cannabis à usage thérapeutique. "Je lui avais donné raison à l'époque, je le fais encore aujourd'hui", a fait savoir le ministre de l'Education. Quelques heures après ses déclarations, il a toutefois nuancé ses propos, assurant avoir eu "une réflexion personnelle" et se disant solidaire du gouvernement.
Acte 2 : les membres du gouvernement gênés
Malaise au sein de la majorité. Après la sortie de son collègue, le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a lui éludé la question sur le plateau des "Quatre Vérités", sur France 2, lundi 15 octobre. Sa réponse trahit une certaine gêne, car la question divise le gouvernement : "Je ne suis pas du tout compétent pour évoquer ce débat", a-t-il répondu.
En juin, les propos de Cécile Duflot sur le sujet avaient eux aussi suscité des réactions au sein du gouvernement, à l'instar du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls.
Acte 3 : l'UMP lance un ultimatum à François Hollande
"C'est une fausse solution, mais c'est aussi une responsabilité très grave que prend monsieur Peillon sur ce sujet : il met en cause la santé de nos enfants, de nos jeunes." Jean-François Copé, secrétaire général de l’UMP, a vivement réagi au micro de France Info, lundi.
"Je demande que ce débat soit immédiatement tranché et arrêté par Hollande", faute de quoi "je lance à partir de demain à la fois une campagne de pétition et un appel à témoignages de tous les parents, afin que nos dirigeants socialistes se rendent un peu compte de ce qu'ils sont en train de dire", a-t-il déclaré.
Lionnel Luca, député UMP des Alpes-Maritimes, a lui aussi dénoncé les propos du ministre de l'Education sur son compte Twitter :
Invraisemblable et scandaleux que le ministre de l'Education défende la dépénalisation du cannabis!L'UMP doit exiger sa démission!Belexemple
— Lionnel Luca 2012 (@lionnelluca2012) Octobre 14, 2012
Acte 4 : Matignon recadre son ministre
Au lendemain des déclarations de Vincent Peillon, la rue de Varennes a sifflé la fin de la partie et assuré qu'il n'y aurait "pas de dépénalisation" de cette drogue douce. "Le Premier ministre et Vincent Peillon se sont parlé au téléphone ce matin", a indiqué Matignon à la presse lundi.
Visiblement excédé par ces prises de position, Jean-Marc Ayrault a lancé un avertissement aux membres de son gouvernement, en marge d'un déplacement en Loire-Atlantique : "Lorsqu'ils sont à la radio et la télévision, ils doivent défendre à la fois la politique de leur ministère et la politique du gouvernement, et rien d'autre."
Acte 5 : Hollande décroche aussi son téléphone
Vincent Peillon a également reçu un blâme de l'Elysée lundi matin. Selon un conseiller de François Hollande cité par Europe 1, le chef de l'Etat "s’est livré à un recadrage explicite et le ministre de l'Education a eu droit à une engueulade maîtrisée".
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.